Jurisprudence : CAA Lyon, 2e, 12-03-2013, n° 12LY01436

CAA Lyon, 2e, 12-03-2013, n° 12LY01436

A9876MQT

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CAA Lyon, 2e, 12-03-2013, n° 12LY01436. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/17461542-caa-lyon-2e-12032013-n-12ly01436
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Références

COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON

N° 12LY01436
Inédit au recueil Lebon
2ème chambre - formation à 3
lecture du mardi 12 mars 2013
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS


Texte intégral

Vu la décision n° 325738 du 7 mai 2012 par laquelle le Conseil d'Etat, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de M. B...à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance, d'un montant de 58 180 euros, au titre des pénalités mises en recouvrement au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1995, a annulé l'arrêt n° 04LY01444 de la Cour administrative d'appel de Lyon du 18 décembre 2008, puis a renvoyé l'affaire à la Cour administrative d'appel de Lyon dans la limite des conclusions du recours d'appel du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur lesquelles il y a lieu de statuer ;

Vu le recours, enregistré le 27 septembre 2004 au greffe de la Cour, présenté par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;

Le ministre demande à la Cour :

A titre principal :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0300952 du Tribunal administratif de Lyon du 6 juillet 2004 déchargeant la S.A. Stilson du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des pénalités afférentes mis à sa charge au titre de la période du 1er juillet 1993 au 31 décembre 1996 par l'avis de mise en recouvrement n° 980105080 du 5 mars 1998 à concurrence de 339 077, 41 euros ;

2°) de remettre à la charge de la S.A. Stilson la taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été accordée à tort par les premiers juges, soit 241 843 euros en principal et 97 234 euros en pénalités dont le paiement a été réclamé à M. A...B...au titre de sa solidarité avec cette société ;

A titre subsidiaire :

1°) d'annuler l'article 1er du jugement n° 0300952 du Tribunal administratif de Lyon du 6 juillet 2004 en ce qu'il a accordé à la S.A. Stilson la décharge de la taxe sur la valeur ajoutée relative à la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1996, qui avait été mise à sa charge par voie de taxation d'office ;

2°) de remettre à la charge de la S.A. Stilson la taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été accordée à tort par les premiers juges soit 96 392 euros en principal et 16 145 euros en pénalités, dont le paiement a été réclamé à M. A...B...au titre de sa solidarité avec cette société ;

Il soutient que c'est à tort que les premiers juges ont fait droit au moyen tiré de l'irrégularité de l'avis de mis en recouvrement alors qu'un tel moyen ne pouvait être retenu en vertu de l'article R.*256-1 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction issue du décret du 20 avril 2000 et des dispositions du B du II de l'article 25 de la loi de finances rectificative pour 1999 ; que pour la période du 1er janvier au 31 décembre 1996 les dispositions de l'article R.* 256-1-2° du livre des procédures fiscales, qui prévoient que les éléments du calcul qui constituent la créance n'ont pas à être portés à la connaissance du contribuable lorsque ce dernier n'a pas fait la déclaration nécessaire au calcul de ses droits, sont applicables en raison de la situation de taxation d'office de la société en vertu des dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; qu'aucun des autres moyens soulevés par M. B...devant le Tribunal administratif de Lyon n'est fondé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 21 novembre 2008, présenté pour M. A... B..., demeurant... ; M. A... B... demande la confirmation du jugement attaqué, le rejet du recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie et la mise à la charge de l'Etat à son profit de la somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il fait valoir que le recours est irrecevable, la société Stilson n'étant ni partie, ni bénéficiaire en première instance et en raison d'une décision de dégrèvement du 12 juillet 2004 d'un montant de 339 077 euros ; que les moyens du recours sont inopérants ;

Vu le mémoire enregistré le 2 décembre 2008, intitulé note en délibéré, présenté pour M. B... tendant aux même fins que le mémoire en défense susvisé par les mêmes moyens et faisant valoir en outre que la requête est irrecevable comme ne comportant aucune demande visant à remettre à la charge de M. B...les impositions dégrevées par l'administration ; qu'aucun titre exécutoire n'a été émis à l'encontre de M. B...lui permettant de connaître le mode de détermination des sommes mises à sa charge ; que la procédure d'imposition d'office est irrégulière ; qu'il n'y a eu aucune fraude mais seulement des difficultés financières qui ont abouti au prononcé de la liquidation judiciaire de la société Stilson ;

Vu l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon n° 10LY02177 du 5 janvier 2012 ;

Vu le mémoire, enregistré le 2 juillet 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, tendant aux mêmes fins que le recours susvisé par les mêmes moyens mais en limitant la remise à la charge de la S.A. Stilson de la taxe sur la valeur ajoutée dont la décharge a été accordée à tort par les premiers juges, à titre principal, à la somme de 241 843 euros en droits et à la somme de 39 055 euros en pénalités et, à titre subsidiaire, à la somme de 96 392 euros en droits et 16 145 euros en pénalités ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2012, présenté pour M. B..., tendant aux mêmes fins que le mémoire en défense susvisé par les mêmes moyens ; il fait valoir en outre que la requête est tardive, les dispositions de l'article R.*200-18 du livre des procédures fiscales étant contraires au principe d'égalité, à l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, à l'article 1er du protocole additionnel n° 12 à cette convention, à l'article 14 de cette convention ;

Vu l'arrêt n° 12LY01706 du 16 octobre 2012 par lequel la Cour administrative d'appel de Lyon a décidé que jusqu'à ce qu'il soit statué sur le recours du ministre de l'économie et des finances, il est sursis à l'exécution du jugement n° 0300952 du 6 juillet 2004 du Tribunal administratif de Lyon en tant que celui-ci a déchargé la société anonyme Stilson du rappel de taxe sur la valeur ajoutée et des intérêts de retard dont il a été assorti, mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 octobre 2012, présenté par le ministre de l'économie et des finances, tendant aux mêmes fins que le recours et le mémoire susvisé par les mêmes moyens et soutenant en outre que le moyen tiré de l'inconventionnalité de l'article R.*200-18 du livre des procédures fiscales est inopérant ; qu'en tout état de cause, il n'est pas fondé, le recours introduit le 2 juillet 2012 ne pouvant qu'être irrecevable en vertu de l'autorité de la chose jugée ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 décembre 2012, présenté pour M. B..., demeurant...), tendant aux mêmes fins que les mémoires susvisés par les mêmes moyens ; il fait valoir en outre que l'administration n'a pas respecté les prévisions du 2° de la doctrine administrative 12 C-1221 du 1er décembre 1984 relative aux mentions des avis de recouvrement ;

Vu l'ordonnance en date du 21 décembre 2012 fixant la clôture d'instruction au 30 janvier 2013, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et son premier protocole additionnel ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 99-1173 du 30 décembre 1999 et notamment le B du II de son article 25 ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2013 :

- le rapport de M. Bourrachot, président,

- et les conclusions de M. Levy Ben Cheton, rapporteur public ;


1. Considérant que, par un arrêt de la Cour d'appel de Lyon en date du 29 mai 2002, M. A... B...a été condamné au paiement solidaire des droits et pénalités de taxe sur la valeur ajoutée dus par la S.A. Stilson au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ; que les sommes mises à la charge de M. B...en conséquence de cet arrêt sur le fondement de l'article 1745 du code général des impôts s'élèvent à 1 586 387 francs (241 843,14 euros) en droits et à 637 815 francs (97 234,27 euros) en pénalités, montants restant dus sur les sommes figurant sur l'avis de mise en recouvrement n° 980105080 du 5 mars 1998 adressé à la société redevable ; qu'après avoir vainement contesté ces impositions par une réclamation formée le 4 septembre 2002 devant le directeur des services fiscaux compétent, qui a pris, le 26 décembre 2002, une décision de rejet, M. B... a porté le litige devant le Tribunal administratif de Lyon ; que le ministre a relevé appel du jugement du 6 juillet 2004 par lequel ce Tribunal, motif pris de l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement du 5 mars 1998, a déchargé la société Stilson du montant des droits et pénalités dont M. B...était solidairement tenu au paiement ; que, par décision du 7 mai 2012, le Conseil d'Etat, après avoir constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur les conclusions du pourvoi de M. B...à concurrence du dégrèvement prononcé en cours d'instance, d'un montant de 58 180 euros, au titre des pénalités mises en recouvrement au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1995, a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon du 18 décembre 2008, puis a renvoyé l'affaire à la Cour dans la limite des conclusions du recours d'appel du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sur lesquelles il y a lieu de statuer ; que le ministre demande l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Lyon en tant que celui-ci a déchargé la société anonyme Stilson du rappel de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 1995 au 31 décembre 1996 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement ... par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (...) " ; qu'aux termes de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " A compter de la notification du jugement du tribunal administratif qui a été faite au directeur du service de l'administration des impôts ou de l'administration des douanes et droits indirects qui a suivi l'affaire, celui-ci dispose d'un délai de deux mois pour transmettre, s'il y a lieu, le jugement et le dossier au ministre chargé du budget. / Le délai imparti pour saisir la cour administrative d'appel court, pour le ministre, de la date à laquelle expire le délai de transmission prévu à l'alinéa précédent ou de la date de la signification faite au ministre. " ; qu'il résulte des stipulations précitées du § 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qu'un juste équilibre doit être ménagé entre les parties au procès, de telle sorte que chacune d'entre elles ait une possibilité raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; que si les dispositions précitées de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales ménagent au ministre chargé du budget un délai d'appel qui peut excéder celui dont le contribuable dispose, en application de l'article R. 811-2 du code de justice administrative, pour saisir la cour administrative d'appel territorialement compétente d'une requête tendant à l'annulation d'un jugement de tribunal administratif, même lorsque le Tribunal en cause a statué sur des pénalités fiscales ayant le caractère d'accusations en matière pénale, le contribuable conserve néanmoins la faculté, y compris lorsque le ministre a saisi la Cour après l'expiration du délai de deux mois prévu par l'article R. 811-2 du code de justice administrative, outre de présenter des observations en défense, de former un appel incident en vue de contester les pénalités qui étaient en litige devant le Tribunal, quand bien même le ministre ne contesterait que les impositions dont ce Tribunal aurait déchargé le contribuable ; que, par ailleurs, le contribuable est en mesure d'écourter le délai ouvert à l'administration, en application de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales, en signifiant directement au ministre, seul compétent pour faire appel, le jugement dont il a lui -même reçu notification ; que, dans ces conditions, les dispositions de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales ne placent pas le contribuable dans une situation de net désavantage par rapport au ministre chargé du budget et laissent à chaque partie une possibilité raisonnable de contester les pénalités fiscales qui, ayant le caractère d'accusations en matière pénale, seraient en litige ; qu'ainsi, les dispositions de l'article R.* 200-18 du livre des procédures fiscales doivent être regardées comme compatibles avec le principe de l'égalité des armes découlant des stipulations précitées de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elles ne méconnaissent pas davantage le principe d'égalité devant la loi ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à cette convention : "Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. " ; que, selon l'article 14 de la même convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus par la présente convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions publiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. " ;

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