Directive 2014/54/UE du Parlement européen et du Conseil
du 16 avril 2014
relative à des mesures facilitant l'exercice des droits conférés aux travailleurs dans le contexte de la libre circulation des travailleurs
LE PARLEMENT EUROPÉEN ET LE CONSEIL DE L'UNION EUROPÉENNE,
vu le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, et notamment son article 46,
vu la proposition de la Commission européenne,
après transmission du projet d'acte législatif aux parlements nationaux,
vu l'avis du Comité économique et social européen (1),
après consultation du Comité des régions,
statuant conformément à la procédure législative ordinaire (2),
considérant ce qui suit :
(1) La libre circulation des travailleurs est une liberté fondamentale des citoyens de l'Union et constitue l'un des piliers du marché intérieur de l'Union consacré par l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Elle trouve sa concrétisation dans le droit de l'Union visant à garantir le plein exercice des droits conférés aux citoyens de l'Union et aux membres de leur famille. L'expression "membres de leur famille" devrait être comprise comme ayant la même signification que l'expression définie à l'article 2, point 2), de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil (3), qui s'applique également aux membres de la famille des travailleurs frontaliers.
(2) La libre circulation des travailleurs est aussi un élément essentiel à la mise en place d'un véritable marché du travail de l'Union, car elle permet aux travailleurs de se rendre dans des régions connaissant une pénurie de main-d'uvre ou offrant plus de perspectives d'emploi, aide davantage de personnes à trouver des emplois mieux adaptés à leurs compétences et supprime les goulets d'étranglement sur le marché du travail.
(3) La libre circulation des travailleurs donne à chaque citoyen de l'Union, quel que soit son lieu de résidence, le droit de se rendre librement dans un autre État membre pour y travailler et/ou y résider à des fins d'emploi. Elle les protège de toute discrimination fondée sur la nationalité en ce qui concerne l'accès à l'emploi, les conditions d'emploi et de travail, en particulier la rémunération, le licenciement et les avantages fiscaux et sociaux, en leur garantissant l'égalité de traitement, en vertu du droit, des pratiques et des conventions collectives nationales, par rapport aux ressortissants de l'État membre en question. Ces droits devraient être reconnus, sans discrimination, à tous les citoyens de l'Union exerçant leur droit à la libre circulation, y compris aux travailleurs permanents, saisonniers et frontaliers. Il convient de distinguer la libre circulation des travailleurs de la libre prestation de services, qui octroie aux entreprises le droit de prester des services dans un autre État membre, dans lequel elles peuvent détacher leurs propres travailleurs à titre temporaire pour qu'ils y effectuent les travaux nécessaires à la prestation de services.
(4) En ce qui concerne les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille qui exercent leur droit de circuler librement, l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne confère des droits substantiels aux fins de l'exercice de cette liberté fondamentale, lesquels sont définis plus en détail dans le règlement (UE) n° 492/2011 du Parlement européen et du Conseil (4).
(5) Il n'en demeure pas moins que l'exercice effectif de la libre circulation des travailleurs reste un défi de taille et que de nombreux travailleurs de l'Union ignorent très souvent les droits liés à cette liberté. Entre autres en raison de leur situation potentiellement plus vulnérable, les travailleurs de l'Union peuvent continuer d'être confrontés à des restrictions ou à des obstacles injustifiés à l'exercice de leur droit à la libre circulation, comme la non-reconnaissance de qualifications, des discriminations fondées sur la nationalité et le fait d'être exploités lorsqu'ils se rendent dans un autre État membre. Il existe donc une fracture entre le droit et son application effective, fracture qu'il faut examiner.
(6) En juillet 2010, dans sa communication intitulée "Réaffirmer la libre circulation des travailleurs : droits et principales avancées", la Commission a précisé qu'elle étudierait les moyens de faire face aux nouveaux besoins et enjeux, notamment compte tenu des nouveaux modes de mobilité, auxquels sont confrontés les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille. Elle a aussi indiqué que, dans le cadre de la nouvelle stratégie pour le marché intérieur, elle examinerait comment il est possible d'encourager et d'améliorer les mécanismes de mise en uvre effective du principe de l'égalité de traitement pour les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille qui exercent leur droit à la libre circulation. La Commission a en outre résumé l'évolution de la législation et de la jurisprudence, en particulier pour ce qui concerne le champ d'application personnel du droit de l'Union relatif à la libre circulation des travailleurs et le contenu des droits dont jouissent les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille.
(7) Dans son rapport du 27 octobre 2010 sur la citoyenneté de l'Union, intitulé "Lever les obstacles à l'exercice des droits des citoyens de l'Union", la Commission citait l'application divergente et incorrecte du droit de l'Union relatif au droit de circuler librement parmi les principaux obstacles auxquels les citoyens de l'Union sont confrontés pour exercer les droits que leur confère le droit de l'Union. Elle y annonçait en conséquence son intention de prendre des mesures pour faciliter la libre circulation des citoyens de l'Union et des membres de leur famille issus de pays tiers en veillant à la stricte application de la réglementation de l'Union européenne, notamment dans le domaine de la lutte contre les discriminations, en favorisant les bonnes pratiques, en améliorant la connaissance de la réglementation de l'Union européenne sur le terrain et en renforçant la diffusion, aux citoyens de l'Union, d'informations sur leurs droits en matière de libre circulation (action 15 du rapport 2010 sur la citoyenneté de l'Union). Par ailleurs, dans le rapport 2013 sur la citoyenneté de l'Union intitulé "Citoyens de l'Union : vos droits, votre avenir", la Commission traitait de la nécessité de supprimer les entraves administratives et de simplifier les procédures pour les citoyens de l'Union qui vivent, travaillent et voyagent dans d'autres États membres.
(8) Dans la communication de la Commission intitulée "Vers une reprise génératrice d'emplois" du 18 avril 2012 (le paquet emploi), la Commission a annoncé son intention de déposer une proposition législative visant à aider les travailleurs mobiles (par des informations et des conseils) à exercer les droits que leur confèrent le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et le règlement (UE) n° 492/2011 et a invité les États membres à faire connaître davantage les droits conférés par le droit de l'Union en matière de non-discrimination, d'égalité entre les femmes et les hommes et de libre circulation des travailleurs et à en améliorer l'accès, ainsi qu'à permettre aux citoyens de l'Union d'accéder plus facilement aux emplois dans leur fonction publique, conformément à l'interprétation qui est faite du droit de l'Union par la Cour de justice de l'Union européenne. Dans ce contexte, selon une jurisprudence constante de la Cour, la restriction de l'accès à certains emplois dans l'administration publique aux ressortissants d'un État membre doit être d'interprétation stricte et ne concerne que les emplois qui comportent une participation, directe ou indirecte, à l'exercice de prérogatives de puissance publique et aux fonctions qui ont pour objet la sauvegarde des intérêts généraux de l'État ou d'autres pouvoirs publics.
(9) Il est essentiel, pour la protection des droits et l'égalité de traitement des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille, d'appliquer et de faire respecter correctement et effectivement l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et le règlement (UE) n° 492/2011, ainsi que de faire connaître les droits, un respect insuffisant compromettant l'effectivité des règles de l'Union applicables en la matière et affectant les droits et la protection des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille.
(10) Une application plus effective et uniforme des droits conférés par les règles de l'Union sur la libre circulation des travailleurs est également nécessaire au bon fonctionnement du marché intérieur.
(11) Il y a lieu d'améliorer l'application et le contrôle du respect des règles de l'Union sur la libre circulation des travailleurs pour faire en sorte que les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille, ainsi que les employeurs, les pouvoirs publics et les autres personnes concernées, soient mieux informés des droits et des responsabilités en matière de libre circulation, pour aider et protéger les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille lorsqu'ils exercent ces droits et pour lutter contre le contournement de ces règles par les pouvoirs publics et par les employeurs publics ou privés. Dans ce contexte, les États membres peuvent aussi prendre en considération les effets de l'accroissement de la mobilité tels que la "fuite des cerveaux" ou la "fuite de la jeune génération".
(12) Pour veiller à la bonne application et contrôler le respect des règles de fond de l'Union sur la libre circulation des travailleurs, les États membres devraient prendre les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille exerçant leur droit à la libre circulation de toute discrimination fondée sur la nationalité ainsi que de toute restriction ou de tout obstacle injustifiés à l'exercice de ce droit.
(13) Il convient, à cet effet, de prévoir des règles particulières permettant de faire respecter les règles de fond régissant la libre circulation des travailleurs au titre de l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et à celui du règlement (UE) n° 492/2011, et d'uvrer en faveur d'une meilleure application, plus uniforme, de ces règles. Le respect de cette liberté fondamentale devrait être assuré en tenant compte du principe de l'égalité entre les femmes et les hommes et de l'interdiction de toute discrimination à l'égard des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille pour l'un des motifs énoncés à l'article 21 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (ci-après dénommée "charte").
(14) Dans ce contexte, les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille qui sont victimes de discrimination fondée sur la nationalité ou de toute restriction ou de tout obstacle injustifiés dans l'exercice de leur droit de circuler librement devraient se voir garantir une protection juridictionnelle effective et efficace. Lorsque les États membres prévoient des procédures administratives comme voie de recours, ils devraient veiller à ce que toute décision administrative puisse être contestée devant un tribunal au sens de l'article 47 de la charte. Compte tenu du droit à une protection juridique efficace, les travailleurs de l'Union devraient être protégés contre tout traitement ou toute conséquence défavorable faisant suite à une plainte ou à une action en justice qui vise à faire respecter les droits garantis au titre de la présente directive.
(15) Il convient également, pour accroître le niveau de protection, d'habiliter les associations et personnes morales, y compris les partenaires sociaux, en fonction de ce que prévoient les États membres, à entreprendre une procédure au nom d'une victime présumée ou à soutenir la procédure engagée par celle-ci, avec son consentement. Cela devrait se faire sans préjudice des règles nationales de procédure en matière de représentation et de défense devant les tribunaux et d'autres compétences et droits collectifs des partenaires sociaux, représentants des travailleurs et des employeurs, tels ceux liés à l'application des conventions collectives, le cas échéant, y compris les actions collectives, en vertu du droit national ou des pratiques nationales. En vue d'assurer une protection juridique efficace, et sans préjudice des mécanismes de défense collective dont disposent les partenaires sociaux ainsi que du droit national ou des pratiques nationales, les États membres sont invités à se pencher sur la mise en uvre de principes communs applicables aux mécanismes de recours collectif en cessation et en réparation.
(16) Conformément à la jurisprudence de la Cour de justice, il convient que les règles nationales concernant les délais impartis pour faire respecter les droits prévus par la présente directive soient telles que ces délais ne puissent être considérés comme étant de nature à rendre pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice de ces droits.
(17) La protection contre la discrimination fondée sur la nationalité serait déjà renforcée s'il existait dans chacun des États membres des organismes efficaces disposant de compétences appropriées pour défendre l'égalité de traitement, analyser les problèmes rencontrés par les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille, étudier les solutions possibles et leur fournir une assistance ponctuelle. Ces organismes devraient notamment être habilités à fournir aux travailleurs de l'Union et aux membres de leurs familles une assistance, juridique et/ou autre, indépendante, par exemple la fourniture de conseils juridiques sur l'application qui leur est faite des règles pertinentes relatives à la libre circulation des travailleurs en vigueur dans l'Union et au niveau national, d'informations sur les procédures à suivre en cas de plaintes, et d'une aide lors de la défense des droits des travailleurs et des membres de leur famille. Une assistance dans le cadre d'une procédure judiciaire peut également être comprise.
(18) Il devrait appartenir à chaque État membre de décider si les tâches à accomplir en vertu de la présente directive doivent être attribuées aux organismes mentionnés ci-dessus ou à des organismes existants qui poursuivent des objectifs similaires au niveau national, par exemple, la promotion de la libre circulation des personnes, la mise en uvre du principe de l'égalité de traitement ou la sauvegarde des droits individuels. Si un État membre décide d'élargir le mandat d'un organisme existant, il devrait veiller à ce que cet organisme se voie attribuer suffisamment de ressources pour pouvoir s'acquitter de manière efficace et adéquate de ses tâches existantes et supplémentaires. Si les tâches sont attribuées à plus d'un organisme, les États membres devraient veiller à ce qu'elles fassent l'objet d'une coordination adéquate.
(19) Les États membres devraient faire en sorte qu'un ou plusieurs de ces organismes servent de point de contact et qu'ils coopèrent et échangent des informations, telles que les coordonnées de tous les organismes, les voies de recours et les coordonnées des associations, organisations ou autres personnes morales qui fournissent des informations et des services aux travailleurs de l'Union et aux membres de leur famille, avec des points de contact équivalents dans d'autres États membres. La liste des points de contact devrait être mise à la disposition du public.
(20) Les États membres devraient encourager la coopération entre les organismes qu'ils désignent au titre de la présente directive et les services d'information et d'assistance existants des partenaires sociaux, des associations, des organisations ou d'autres personnes morales concernées, comme les organisations chargées des modalités de coordination en vertu du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil (5) et, le cas échéant, les inspections du travail.
(21) Il convient que les États membres s'emploient à favoriser les synergies avec les outils d'information et d'aide existants au niveau de l'Union et, à cette fin, qu'ils veillent à ce que les organismes existants ou nouveaux coopèrent étroitement avec les services d'information et d'assistance existants, tels que L'Europe est à vous, Solvit, le réseau Enterprise Europe Network, les guichets uniques et EURES, y compris, le cas échéant, les partenariats EURES transfrontaliers.
(22) Il convient que les États membres favorisent le dialogue avec les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales appropriées aux fins du traitement et de la lutte contre les restrictions et les obstacles injustifiés au droit à la libre circulation ou les diverses formes de discrimination fondée sur la nationalité.
(23) Il convient que les États membres déterminent comment les citoyens de l'Union, tels que les travailleurs, les étudiants et les jeunes diplômés, ainsi que les employeurs, les partenaires sociaux et d'autres parties intéressées peuvent obtenir des informations utiles aisément accessibles sur les dispositions de la présente directive et du règlement (UE) n° 492/2011, y compris des informations sur les organismes désignés au titre de la présente directive et sur les voies de recours et les moyens de protection disponibles. Les États membres devraient prendre des mesures pour que ces informations soient disponibles dans plus d'une langue officielle de l'Union, compte tenu des exigences du marché du travail. Cela ne devrait pas interférer avec la législation des États membres relative à l'emploi des langues. Ces informations pourraient être fournies dans le cadre d'un accompagnement individualisé et devraient aussi être aisément accessibles par l'intermédiaire de L'Europe est à vous et EURES.
(24) Afin de faciliter le respect des droits conférés par le droit de l'Union, la directive 91/533/CEE du Conseil (6) devrait être mise en uvre et contrôlée de manière cohérente.
(25) La présente directive énonce des prescriptions minimales, donnant ainsi aux États membres la possibilité d'introduire ou de maintenir des dispositions plus favorables. Les États membres ont également la possibilité d'étendre les compétences des organisations chargées de tâches liées à la protection des travailleurs de l'Union contre toute discrimination fondée sur la nationalité, de manière à couvrir le droit à l'égalité de traitement, sans discrimination fondée sur la nationalité, de tous les citoyens de l'Union qui exercent leur droit de circuler librement et des membres de leur famille, comme le prévoient l'article 21 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et la directive 2004/38/CE. La mise en uvre de la présente directive ne peut servir à justifier une régression de la situation dans les États membres.
(26) La mise en uvre effective de la présente directive implique que les dispositions appropriées que les États membres adopteront pour se conformer aux obligations leur incombant en vertu de la présente directive contiennent une référence à cette dernière ou soient accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle.
(27) Conformément à la déclaration politique commune du 28 septembre 2011 des États membres et de la Commission sur les documents explicatifs, les États membres se sont engagés à accompagner, dans les cas où cela se justifie, la notification de leurs mesures de transposition d'un ou de plusieurs documents expliquant le lien entre les éléments d'une directive et les parties correspondantes des instruments nationaux de transposition. En ce qui concerne la présente directive, le législateur estime que la transmission de ces documents est justifiée.
(28) Il convient que, passé un délai suffisant pour la mise en uvre de la présente directive, la Commission établisse un rapport sur sa mise en uvre, dans lequel elle précisera notamment s'il est nécessaire de proposer des mesures pour mieux faire respecter le droit de l'Union sur la libre circulation. Dans ce rapport, la Commission devrait s'intéresser aux éventuelles difficultés rencontrées par les jeunes diplômés à la recherche d'un emploi dans l'Union et par les conjoints originaires de pays tiers des travailleurs de l'Union.
(29) La présente directive respecte les droits fondamentaux et les principes consacrés par la charte, notamment la liberté professionnelle et le droit de travailler, le droit à la non-discrimination, en particulier fondée sur la nationalité, le droit de négociation et d'actions collectives, des conditions de travail justes et équitables, la liberté de circulation et de séjour et le droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial. Elle doit être mise en uvre dans le respect de ces droits et principes.
(30) La présente directive respecte les différents modèles de marché du travail des États membres, y compris ceux régis par des conventions collectives.
(31) Étant donné que l'objectif de la présente directive, à savoir l'établissement d'un cadre commun général de dispositions, de mesures et de mécanismes appropriés nécessaires pour mieux appliquer et faire respecter, de manière plus uniforme, les droits liés à la libre circulation des travailleurs conférés par le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et par le règlement (UE) n° 492/2011, ne peut pas être atteint de manière suffisante par les États membres mais peut, en raison des dimensions ou des effets de l'action, l'être mieux au niveau de l'Union, celle-ci peut prendre des mesures, conformément au principe de subsidiarité consacré à l'article 5 du traité sur l'Union européenne. Conformément au principe de proportionnalité tel qu'énoncé audit article, la présente directive n'excède pas ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif,
ONT ADOPTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE :
Article 1er
Objet
La présente directive énonce des dispositions destinées à faciliter et à uniformiser la manière d'appliquer et de faire respecter les droits conférés par l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et par les articles 1er à 10 du règlement (UE) n° 492/2011. La présente directive s'applique aux citoyens de l'Union qui exercent ces droits et aux membres de leur famille (ci-après dénommés "travailleurs de l'Union et membres de leur famille").
Article 2
Champ d'application
1. La présente directive s'applique aux aspects suivants de la libre circulation des travailleurs, tels qu'ils sont visés de l'article 1er à l'article 10 du règlement (UE) n° 492/2011 :
a) l'accès à l'emploi ;
b) les conditions d'emploi et de travail, notamment en matière de rémunération, de licenciement, de santé et de sécurité sur le lieu de travail et, si un travailleur de l'Union perd son emploi, de réintégration professionnelle ou de réemploi ;
c) le bénéfice des avantages sociaux et fiscaux ;
d) l'affiliation syndicale et l'éligibilité aux organes de représentation des travailleurs ;
e) l'accès à la formation ;
f) l'accès au logement ;
g) l'accès des enfants des travailleurs de l'Union à l'enseignement, à l'apprentissage et à la formation professionnelle ;
h) l'assistance accordée par les bureaux d'emploi.
2. Le champ d'application de la présente directive est identique à celui du règlement (UE) n° 492/2011.
Article 3
Défense des droits
1. Les États membres veillent à ce que, après un recours éventuel à d'autres autorités compétentes, y compris, lorsqu'ils l'estiment approprié, dans le cadre de procédures de conciliation, des procédures judiciaires visant à faire respecter les obligations découlant de l'article 45 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de l'article 1er à l'article 10 du règlement (UE) n° 492/2011 soient accessibles à tous les travailleurs de l'Union et aux membres de leur famille qui estiment qu'ils ont souffert ou souffrent en raison de restrictions ou d'obstacles injustifiés à leur droit à la libre circulation ou s'estiment lésés par le non-respect à leur égard du principe de l'égalité de traitement, même après que les relations dans lesquelles la restriction, l'obstacle ou la discrimination sont présumés ont cessé.
2. Les États membres veillent à ce que des associations, des organisations, y compris les partenaires sociaux, ou d'autres personnes morales, qui ont, conformément aux critères établis dans leur droit, leurs pratiques ou leurs conventions collectives nationales, un intérêt légitime à faire en sorte que la présente directive soit respectée, puissent engager, soit au nom de travailleurs de l'Union et des membres de leur famille, soit en soutien à ceux-ci, avec leur consentement, toute procédure judiciaire et/ou administrative prévue pour faire respecter les droits visés à l'article 1er.
3. Le paragraphe 2 s'applique sans préjudice d'autres compétences et droits collectifs des partenaires sociaux, représentants des travailleurs et des employeurs, le cas échéant, y compris des actions collectives, en vertu du droit national ou des pratiques nationales.
4. Le paragraphe 2 s'applique sans préjudice des règles nationales de procédure en matière de représentation et de défense au cours d'une procédure judiciaire.
5. Les paragraphes 1 et 2 du présent article s'appliquent sans préjudice des règles nationales relatives aux délais impartis pour faire respecter les droits visés à l'article 1er. Toutefois, ces délais nationaux ne rendent pas pratiquement impossible ou excessivement difficile l'exercice de ces droits.
6. Les États membres introduisent dans leur ordre juridique interne les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs de l'Union contre tout traitement ou toute conséquence défavorable faisant suite à une plainte ou à une action en justice qui vise à faire respecter les droits visés à l'article 1er.
Article 4
Organismes chargés de promouvoir l'égalité de traitement et de soutenir les travailleurs de l'Union et les membres de leur famille
1. Chaque État membre désigne une ou plusieurs structures, un ou plusieurs organismes (ci-après dénommés "organismes") chargés de promouvoir, d'analyser, de contrôler et de soutenir l'égalité de traitement des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille sans discrimination fondée sur la nationalité, restriction ou obstacle injustifiés à l'exercice de leur droit à la libre circulation et prend les dispositions nécessaires au bon fonctionnement de ces organismes. Ceux-ci peuvent faire partie d'organismes existants au niveau national qui poursuivent des objectifs similaires.
2. Les États membres veillent à ce que ces organismes soient habilités :
a) à fournir ou à veiller à ce que soit fournie une assistance, juridique et/ou autre, indépendante aux travailleurs de l'Union et aux membres de leur famille, sans préjudice de leurs droits, et des droits des associations, organisations et autres personnes morales visées à l'article 3 ;
b) à servir de point de contact vis-à-vis de points de contact équivalents dans d'autres États membres pour la coopération et l'échange d'informations utiles ;
c) à mener ou à commanditer des enquêtes et des analyses indépendantes sur les restrictions et obstacles injustifiés au droit à la libre circulation ou sur la discrimination fondée sur la nationalité à l'encontre des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille ;
d) à assurer la publication de rapports indépendants et à formuler des recommandations sur toute question en rapport avec ces restrictions et obstacles ou discriminations ;
e) à publier des informations utiles sur l'application au niveau national des règles de l'Union sur la libre circulation des travailleurs.
En relation avec le point a) du premier alinéa, lorsque des organismes fournissent une assistance dans le cadre d'actions en justice, cette assistance est fournie à titre gracieux pour ceux qui ne disposent pas de moyens suffisants, conformément au droit national ou aux pratiques nationales.
3. Les États membres communiquent à la Commission les noms et les coordonnées des points de contact et toute information actualisée ou modification y afférente. La Commission tient une liste des points de contact et la met à la disposition des États membres.
4. Les États membres veillent à ce que les organismes existants ou nouveaux aient connaissance de l'existence des services d'information et d'assistance au niveau de l'Union, tels que L'Europe est à vous, Solvit, EURES, le réseau Enterprise Europe Network et les guichets uniques, et à ce qu'ils soient en mesure de les utiliser et de coopérer avec eux.
5. Si les tâches visées au paragraphe 2 sont attribuées à plus d'un organisme, les États membres veillent à ce que ces tâches fassent l'objet d'une coordination adéquate.
Article 5
Dialogue
Les États membres favorisent le dialogue avec les partenaires sociaux et les organisations non gouvernementales concernées qui ont, conformément au droit national ou aux pratiques nationales, un intérêt légitime à contribuer à la lutte contre les restrictions et obstacles injustifiés au droit à la libre circulation et contre la discrimination fondée sur la nationalité à l'encontre des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille, en vue de défendre le principe de l'égalité de traitement.
Article 6
Accès et diffusion d'informations
1. Les États membres veillent à ce que les mesures adoptées en application de la présente directive et en vertu des articles 1er à 10 du règlement (UE) n° 492/2011 soient portées à la connaissance des intéressés sur l'ensemble de leur territoire, en particulier les travailleurs et les employeurs de l'Union, par tous les moyens appropriés.
2. Les États membres fournissent à titre gracieux, dans plus d'une langue officielle des institutions de l'Union, des informations claires, aisément accessibles, exhaustives et actualisées sur les droits conférés par le droit de l'Union relatif à la libre circulation des travailleurs. Il y a lieu que ces informations soient aussi aisément accessibles par l'intermédiaire de L'Europe est à vous et EURES.
Article 7
Prescriptions minimales
1. Les États membres peuvent adopter ou maintenir des mesures plus favorables à la protection du principe de l'égalité de traitement que celles qui sont prévues dans la présente directive.
2. Les États membres peuvent prévoir que les compétences des organismes visés à l'article 4 de la présente directive, chargés de promouvoir, d'analyser, de contrôler et de soutenir l'égalité de traitement des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille sans discrimination fondée sur la nationalité, portent aussi sur le droit à l'égalité de traitement sans discrimination fondée sur la nationalité de tous les citoyens de l'Union qui exercent le droit à la libre circulation et des membres de leur famille, conformément à l'article 21 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et à la directive 2004/38/CE.
3. La mise en uvre de la présente directive ne constitue en aucun cas un motif suffisant d'abaissement du niveau de protection des travailleurs de l'Union et des membres de leur famille dans les domaines auxquels elle s'applique, sans préjudice du droit des États membres d'adopter, eu égard à l'évolution de la situation, des dispositions législatives, réglementaires ou administratives différentes de celles en vigueur le 20 mai 2014, à la condition que la présente directive soit respectée.
Article 8
Transposition
1. Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard le 21 mai 2016. Ils communiquent immédiatement à la Commission le texte de ces mesures.
Lorsque les États membres adoptent ces dispositions, celles-ci contiennent une référence à la présente directive ou sont accompagnées d'une telle référence lors de leur publication officielle. Les modalités de cette référence sont arrêtées par les États membres.
2. Les États membres communiquent à la Commission le texte des dispositions essentielles de droit interne qu'ils adoptent dans le domaine régi par la présente directive.
Article 9
Rapport
Au plus tard le 21 novembre 2018, la Commission transmet un rapport au Parlement européen, au Conseil et au Comité économique et social européen sur la mise en uvre de la présente directive, en vue de proposer, le cas échéant, les modifications nécessaires.
Article 10
Entrée en vigueur
La présente directive entre en vigueur le vingtième jour suivant celui de sa publication au Journal officiel de l'Union européenne.
Article 11
Destinataires
Les États membres sont destinataires de la présente directive.
Fait à Strasbourg, le 16 avril 2014.
Par le Parlement européen :
Le président, M. SCHULZ
Par le Conseil :
Le président, D. KOURKOULAS
(1) JO C 341 du 21.11.2013, p. 54.
(2) Position du Parlement européen du 12 mars 2014 (non encore parue au Journal officiel) et décision du Conseil du 14 avril 2014.
(3) Directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au droit des citoyens de l'Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) n° 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO L 158 du 30.4.2004, p. 77).
(4) Règlement (UE) n° 492/2011 du Parlement européen et du Conseil du 5 avril 2011 relatif à la libre circulation des travailleurs à l'intérieur de l'Union (JO L 141 du 27.5.2011, p. 1).
(5) Règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale (JO L 166 du 30.4.2004, p. 1).
(6) Directive 91/533/CEE du Conseil du 14 octobre 1991 relative à l'obligation de l'employeur d'informer le travailleur des conditions applicables au contrat ou à la relation de travail (JO L 288 du 18.10.1991, p. 32).