Jurisprudence : CA Riom, 05-03-2014, n° 13/00047, Confirmation

CA Riom, 05-03-2014, n° 13/00047, Confirmation

A2205MGR

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COUR D'APPEL

DE RIOM
Chambre Commerciale
TF
ARRÊT N°
DU 05 Mars 2014
RG N° 13/00047
CA
Arrêt rendu le cinq Mars deux mille quatorze

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré
M. Claude ANDRIEUX, Président
Mme Chantal JAVION, Conseillère
Mme Martine MILLERAND, Conseillère
lors des débats et du prononcé Mme Carine CESCHIN, Greffière
Sur APPEL d'une décision rendue le 19 décembre 2012 par le Tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand
A l'audience publique du 08 janvier 2014 M. ... a fait le rapport oral de l'affaire, avant les plaidoiries, conformément aux dispositions de l'article 785 du CPC

ENTRE
SCI ASTERION
MORLAAS
Représentant Me Christine ROGER, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND
APPELANT
ET
SA SOCOTEC FRANCE
siège social Les Quadrants SAINT QUENTIN EN YVELINES CEDEX, prise en son agence du PUY DE DOME
CLERMONT-FERRAND CEDEX 1
Représentants Me Sébastien ..., avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND - Me ... de la SCP LATRAICHE-GUERIN BOVIER PIRAS, avocat au barreau de LYON (plaidant par Me Marie-Emilie ...)
INTIMÉ
DÉBATS
A l'audience publique du 08 janvier 2014, la Cour a mis l'affaire en délibéré au 5 Mars 2014 l'arrêt a été prononcé publiquement conformément à l'article 452 du code de procédure civile

FAITS, PROCÉDURE ET DEMANDES DES PARTIES
La Sa SOCOTEC a établi le 30/06/05 un diagnostic amiante dans le cadre d'une vente intervenue le 16/01/06 entre la société SCETAUTOROUTE et la Sci ASTERION portant sur un immeuble de bureaux et ses dépendances sis à Aulnat (63510) ; le diagnostic a mentionné la présence d'amiante dans les dalles de sol plastique, les plaques ondulées de la toiture du local poubelle et les panneaux sandwich de l'ensemble des façades ;
La Sci ASTERION ayant confié à la société PHELINAS des travaux de démolition des bâtiments comprenant un désamiantage, a sollicité un nouveau repérage de la présence d'amiante, confié à la Sa SOCOTEC laquelle, dans un rapport du 28/06/11, a détecté la présence de cette substance dans d'autres parties de l'immeuble ce qui a eu pour effet de porter le montant des travaux de désamiantage de 15 300 à 36 161 euros ;
Estimant que la Sa SOCOTEC avait commis une faute dans son rapport du 30/06/05, la Sci ASTERION l'a assignée devant le tribunal de grande instance de Clermont-Ferrand qui, par jugement du 19/12/12, l'a déboutée de ses prétentions et condamnée à payer à la Sa SOCOTEC une facture se rapportant au rapport du 28/06/11 ainsi qu'une indemnité de procédure ;

Par déclaration reçue le 9/01/13, la Sci ASTERION a interjeté appel ;
Suivant conclusions transmises le 21/11/13, la Sci ASTERION souligne la différence entre les conclusions du rapport de SOCOTEC du 30/06/05 et celui du 28/06/11 qui fait état d'une présence majeure d'amiante dans tout le bâtiment ;
Elle estime avoir été trompée par le 1er rapport du 30/06/05 sur la base duquel elle a acquis l'immeuble ;
L'argumentation de SOCOTEC selon laquelle elle n'aurait commis aucune faute compte tenu de la différence de finalité entre les deux rapports, ne saurait être retenue dans la mesure où, même si chacun des rapports répond à des articles du code de la santé publique différents, ils ont le même objectif de repérer la présence d'amiante dans les locaux ;
Il appartenait à SOCOTEC de faire état d'une présence d'amiante dans tout le bâtiment dès lors que les matériaux concernés étaient repérables par reconnaissance visuelle ; en effet le bâtiment selon constat d'huissier du 29/03/12 est construit en panneaux préfabriqués parfaitement visibles sur toutes ses faces ; lesquels contiennent de l'amiante ;
Et ce d'autant que le programme de repérage de l'amiante avant vente mentionné à l'article R 1334-26 du code de la santé publique prévoit bien que sont à vérifier ou à sonder les revêtements durs, les projections et enduits, les panneaux de cloison, les panneaux vissés ou collés, les conduits, calorifuge et joints ;
La Sci ASTERION verse aux débats un rapport du cabinet ABEI, expert près la cour d'appel de Pau du 6/03/13 dont il ressort que le 1er rapport de 2005 présente un certain nombre d'écarts par rapport aux textes auxquels il fait référence ; qu'il est incomplet ;
La jurisprudence retient de manière constante la responsabilité d'une société de contrôle technique pour n'avoir pas révélé la présence d'amiante et établi un diagnostic incomplet ;
Cette faute de SOCOTEC est en lien de causalité avec le préjudice subi par l'appelante qui non seulement n'aurait peut-être pas acquis les locaux dans ces conditions, ou les aurait acquis pour un prix moindre compte tenu de la présence d'amiante affectant tout le bâtiment ;
Il résulte des devis de la Sarl PHELINAS que la Sci ASTERION doit faire face à un surcoût de 20 861 euros ; il ne saurait lui être reproché de n'avoir pas agi contre son vendeur;
Elle a fait établir un nouveau devis actualisé par l'entreprise MAZET et la Sarl MT2 qui chiffrent les travaux de désamiantage à 67 532,38 euros ttc ; elle est donc fondée à solliciter la condamnation sur le fondement de l'article 1382 du code civil, sans que SOCOTEC ne puisse lui opposer les clauses limitatives de responsabilité prévues à ses conditions générales, après réformation du jugement querellé, à lui payer les sommes suivantes
- 50 000 euros au titre du préjudice financier et matériel subi ;
- 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- 208,85 euros correspondant au coût du constat d'huissier ;
et à supporter les dépens de première instance et d'appel ;
Elle conclut encore au débouté des demandes de la Sa SOCOTEC ;
Selon conclusions transmises le 29/08/13, la Sa SOCOTEC France conteste sa responsabilité en l'absence de faute qui lui soit imputable ;
Elle s'est vu en effet confier deux missions distinctes de repérage de l'amiante ; les diagnostics avant vente et avant démolition ont tous deux pour finalité de rechercher les composants d'une construction contenant de l'amiante, mais ne portent pas sur les mêmes produits et matériaux et ne se réalisent pas selon les mêmes modalités ;
-le repérage avant vente relève de l'obligation incombant aux propriétaires d'immeubles, vise à la protection de la population et porte exclusivement sur des composants sans travaux destructifs, visibles et accessibles selon l'article R 1334-24 du code de la santé publique et mentionnés à l'annexe 13.9 à laquelle il renvoie ;
-le repérage avant démolition a pour objet la santé des travailleurs, et porte donc sur l'ensemble des composants constituant les ouvrages, selon l'article R 1334-27, et mentionnés à l'annexe 1 de l'arrêté du 2/01/02 ; la totalité des matériaux et produits susceptibles de contenir de l'amiante sont concernés et les sondages sont destructifs ;
La Sarl PHELINAS ne pouvait en aucune façon se fonder sur le rapport en vue d'une vente pour établir un devis de démolition puisque les articles L 4121-1 et R 1334-27 imposent à l'entreprise de démolition de s'enquérir du diagnostic avant l'établissement d'un plan de démolition auprès du propriétaire ;
Cette société n'a d'ailleurs pas pour activité les travaux de désamiantage et ne possède aucune certification amiante, et son premier devis ne mentionne même pas les plaques ondulées et les dalles de sol qui étaient signalées par le premier rapport ;
Et l'analyse faite par le cabinet ABEI en mars 2013 est tardive et non contradictoire ;
La Sa SOCOTEC souligne encore que l'existence d'un lien de causalité n'est pas rapportée, quant au fait que la Sci ASTERION n'aurait pas acheté le bâtiment si elle avait eu connaissance du coût du désamiantage ; le devis de démolition de la Sarl PHELINAS intervient le 5/01/11, donc plus de 5 ans après acquisition de l'immeuble ;
Elle rappelle que selon la jurisprudence seul le propriétaire vendeur doit répondre de la présence d'amiante et prendre en charge les frais de désamiantage ;
A titre subsidiaire, la Sa SOCOTEC relève que la demande formée par l'appelante au titre de son préjudice n'est pas justifiée ;
Le 1er devis de la Sarl PHELINAS était erroné pour avoir omis de prendre en compte plaques ondulées et dalles de sol ; la différence entre les deux devis du 5/01/11 et 11/07/11 s'élève à 19 261 euros HT ;
A titre très subsidiaire, si la cour entrait en voie de condamnation à son encontre, elle rappelle que les conditions générales du contrat de vérification technique prévoient en l'article 19 que sa responsabilité ne saurait être engagée au-delà de 2 fois le montant des honoraires perçus au titre de la mission ; soit 651,82 euros ;
Enfin, elle souligne que le tribunal a fait droit à sa demande reconventionnelle en paiement de sa facture du 20/07/11, pour le rapport du 28/06/11 ;
Elle conclut à la confirmation du jugement entrepris et formule une nouvelle demande d'indemnité de procédure à hauteur de 5 000 euros ;
La procédure a été clôturée par ordonnance du 5/12/13.

MOTIFS DE LA DÉCISION
Attendu que la Sa SCETAUTOROUTE avait, aux termes de l'article R 1334-24 du code de la santé publique dans sa version en vigueur lors de la passation de la vente de l'immeuble à la Sci ASTERION, obligation de produire, 'au plus tard à la date de toute promesse de vente ou d'achat, un constat précisant la présence ou, le cas échéant, l'absence de matériaux et produits contenant de l'amiante mentionnés à l'annexe 13-9. Ce constat indique la localisation et l'état de conservation de ces matériaux et produits' ;
Que le rapport de repérage établi à ce titre par la Sa SOCOTEC le 28/06/05 (sa pièce 1) se réfère (§ 2.2) à l'annexe susvisée, et énonce les résultats de la recherche en distinguant les composants contenant de l'amiante (§ 3.1) ceux n'en contenant pas (§ 3.2) et ceux pour lesquels l'analyse en laboratoire n'a pas encore été effectuée ; que des composants contenant de l'amiante ont été identifiés dans les dalles de sol plastique du rez-de-chaussée du bâtiment de bureaux, du rez-de-chaussée du préfabriqué, et du rez-de-chaussée faisant la liaison entre bâtiment et préfabriqué ;
Que devenue propriétaire, et envisageant la démolition des locaux, la Sci ASTERION s'est trouvée, conformément aux dispositions de l'article R 1334-27 du code de la santé publique, dans la version alors en vigueur, dans l'obligation 'd'effectuer un repérage des matériaux et produits contenant de l'amiante et de transmettre les résultats de ce repérage à toute personne physique ou morale appelée à concevoir ou à réaliser les travaux' ; que ce repérage est réalisé selon les modalités prévues au 7ème alinéa de l'article R 1334-26 ; que le 7ème alinéa en question précise que le repérage porte sur les matériaux et produits figurant sur la liste définie à l'annexe 13-9 et accessibles sans travaux destructifs ; et que sa réalisation est confiée à un organisme indépendant ;
Qu'il n'y a donc pas de différence dans la nature des investigations incombant au vendeur et celles à la charge du maître de l'ouvrage qui envisage une démolition, puisque les unes et les autres visent les matériaux et produits listés à l'annexe 13-9, accessibles sans travaux destructifs ;
Que néanmoins le rapport de repérage de l'amiante avant démolition d'un immeuble établi par la Sa SOCOTEC (sa pièce 2) le 20/06/11 à la requête de la Sci ASTERION révèle l'existence de composants contenant de l'amiante allant bien au-delà des dalles de sol plastique décelées lors des premières investigations, et concernant du mastic de fenêtre, des panneaux en fibrociment, des panneaux 'verts', à l'intérieur et à l'extérieur de l'immeuble ; existence reconnue en mode visuel ;
Attendu que pour autant, la Sci ASTERION ne verse pas aux débats de promesse de vente préalable à la vente, et à l'occasion de laquelle elle aurait dû se trouver en possession du rapport de repérage du 28/06/05, lequel aurait pu influer sur sa décision d'acquérir et de le faire au prix convenu ;
Qu'elle n'établit pas un lien de cause à effet entre la différence d'ampleur du repérage de composants recélant de l'amiante dans les deux rapports successivement établis par la Sa SOCOTEC, et le préjudice qui résulterait de la hausse du coût du désamiantage, puisqu'en tout état de cause elle devait y faire procéder dans le cadre de la démolition, dont il n'est pas établi qu'elle était envisagée lors de l'acquisition cinq ans plus tôt ;
Attendu qu'il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la Sci ASTERION de ses demandes et l'a condamnée à régler à la Sa SOCOTEC la somme de 651,82 euros au titre de la facture du 20/07/11, une indemnité de procédure de 1 500 euros, et à supporter les dépens ;
Qu'il n'apparaît pas contraire à l'équité de laisser supporter à la Sa SOCOTEC la charge des frais irrépétibles ;
Que la Sci ASTERION aura à supporter les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et après en avoir délibéré ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris ;
Condamne la Sci ASTERION aux dépens d'appel, et accorde à Maître ... le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.
Le greffier, Le président,
C. ... C. ...

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