Cour administrative d'appel de Nancy
Statuant au contentieux
S.A. Sodibrag
M. Philippoteaux, Président
M. Le Carpentier, Rapporteur
Mme Felmy, Commissaire du gouvernement
Lecture du 23 novembre 1993
R E P U B L I Q U E F R A N C A I S E
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
Vu la requête enregistrée le 13 avril 1992 présentée pour la SA SODIBRAG dont le siège social se trouve à Centre Leclerc - rue des Loyes - route de Chaumont - 52100 SAINT-DIZIER, représentée par le président de son conseil d'administration ;
La SA SODIBRAG demande à la cour :
1°) de réformer le jugement du 17 décembre 1991 par lequel le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne a limité à 605.000 F la réduction des bases d'imposition de l'impôt sur les sociétés auquel elle a été assujettie au titre des exercices clos les 29 février 1984 et 28 février 1985, 1986 et 1987 ;
2°) de lui accorder la décharge en droits et pénalités de l'intégralité des cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés au titre des exercices susmentionnés ;
Vu le mémoire en réplique enregistré le 2 septembre 1992 présenté pour la SA SODIBRAG ; la SA SODIBRAG conclut aux mêmes fins que la requête et demande la condamnation de l'Etat à lui payer la somme de 19.166,95 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 novembre 1993 :
- le rapport de M. LE CARPENTIER, Conseiller,
- et les conclusions de Mme FELMY, Commissaire du Gouvernement ;
Considérant que la SA SODIBRAG, qui exploite un centre commercial Leclerc à Saint-Dizier (Haute-Marne) a fait l'objet, à la suite d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos les 29 février 1984 et 28 février 1985, 1986 et 1987, de divers redressements à l'impôt sur les sociétés pour les exercices en cause selon la procédure contradictoire ; que la SA SODIBRAG ayant contesté les impositions résultant desdits redressements, le tribunal administratif de Châlons-sur-Marne par jugement du 17 décembre 1991 n'a prononcé qu'une réduction partielle desdites impositions ; que la SA SODIBRAG relève appel dudit jugement en se bornant à contester les redressements portant sur les rémunérations qu'aurait dû exiger ladite SA en se portant caution au profit d'autres centres commerciaux Leclerc ;
Considérant que le fait pour une entreprise de fournir gratuitement sa caution au profit d'un tiers, constitue en règle générale un acte étranger à une gestion commerciale normale, hormis les cas où une société mère vient en aide à une filiale en difficulté et lorsque la libéralité apparemment consentie a eu une contrepartie directe conforme au propre intérêt commercial de l'entreprise en cause ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SA SODIBRAG n'a avec les autres membres de l'association aucun lien de filiation et jouit par conséquent d'une totale autonomie juridique à leur égard ; que si les engagements litigieux de la SA SODIBRAG ont concouru à l'expansion économique de l'ensemble des centres commerciaux Leclerc, ils n'ont apporté à la société requérante aucun avantage spécifique qui lui soit propre ; qu'ainsi, en acceptant d'accorder sa garantie de caution à d'autres centres commerciaux Leclerc, la SA SODIBRAG leur a consenti une libéralité sans contrepartie directe ; que, par ailleurs, la circonstance qu'il était peu probable que les engagements conclus vinssent à se réaliser n'est pas de nature à écarter l'exigence de la contrepartie nécessaire ; que, par conséquent, l'administration établit que l'absence de rémunération des engagements de caution constitue pour la SA SODIBRAG un acte de gestion anormal ;
Considérant, au surplus, que contrairement à ce que soutient la SA SODIBRAG, les engagements de caution litigieux ne lui avaient pas été imposés par l'association des centres de distribution Edouard Leclerc dont elle est membre, en contrepartie de la jouissance gratuite du panonceau publicitaire Leclerc, dès lors que les statuts de ladite association prévoient que les obligations pesant sur les associés se limitent à la formation, au parrainage et au respect de certains principes de la profession ; qu'ainsi la SA SODIBRAG n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Considérant que la SA SODIBRAG, qui succombe dans la présente instance, ne peut demander la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 19.166,95 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Article 1er : La requête de la SA SODIBRAG est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SA SODIBRAG et au ministre du budget.