Jurisprudence : CA Versailles, 14e ch., 07-05-1997, n° 2780/97






VERSAILLES

DU 07.05.97

R.G. n° 2780/97

AFFAIRE

A B

C/

C.G.E. RENAULT

LE MINISTERE PUBLIC

APPEL D'UNE ORDONNANCE DE REFERE RENDUE LE



T.G.! DE NANTERRE

Conie certifiée conforme | Copie exécutoire

à Maître BOMMART



Extrait des minutes de Greffe

de la Cour d'Appel de Versailles

AU REPUBLIQUE NOM DU PEUPLE FRANCAISE FRANCAIS [COPIE

Le sept mai mil neuf cent quatre vingt dix-sept

la Cour d'Appel de VERSAILLES, 14ème Chambre

a rendu l'arrêt suivant

prononcé en AUDIENCE PUBLIQUE

la cause ayant été débattue en AUDIENCE PUBLIQUE

le vingt trois mars mil neuf cent quatre vingt dix-sept

devant Monsieur GILLET, Président et rédacteur

Madame OBRAM-CAMPION, Conseiller

Madame BOURQUARD, Conseiller

assistés de Madame PETILLAT, Greffier

et ces mêmes magistrats en ayant délibéré conformément la

loi

Dans l'affaire


ENTRE

LA SOCIETE RENAULT S.A - dont le siège est 34 Quai du Point du Jour - 92100 BOULOGNE SSEINE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette

qualité

APPELANTE

CONCLUANT par Maître BOMMART, Avoué

PLAIDANT par Maître TARASEWICZ et Maître BELIER, Avocats au

Barreau de Paris

ET

1°) LE COMITE DE GROUPE EUROPEEN RENAULT (C.G.E.) - dont le siège est 13 rue Jean-Pierre Timbaud - 92130 ISSY-LES-MOULINEAUX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège en cette qualité

INTIME

CONCLUANT par la S.C.P. JULLIEN-LECHARNY-ROL, Avoués

PLAIDANT par Maître BRIHI et Maître GRUMBACH, Avocats au

Barreau de Versailles

LA FEDERATION EUROPEENNE DES METALLURGIES (F.E.M.) - dont

le siège est EUROMETAL, Rue Royale 45 (Bte2) D-1000 BRUXELLES prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés

audit siège en cette qualité

INTERVENANTE VOLONTAIRE

CONCLUANT par la S.C.P. JULLIEN-LECHARNY-ROL, Avoués

PLAIDANT par Maître BRIHI et Maître GRUMBACH, Avocats au

Barreau de Versailles

En présence de

Monsieur le Procureur Général

près la Cour d'appel de Versailles, représenté

à l'audience par Monsieur DUPLAT, Avocat Général, entendu en ses conclusions.



I-1 Considérant que le Groupe RENAULT, constitué autour de la société française RENAULT, comprend notamment la société de droit belge RENAULT INDUSTRIE BELGIQUE (R.I.B.), filiale de la précédente, qui exploite, comme unité de production, une usine située à Vilvoorde ;

I-2 Considérant que par accord du 5 avril 1993 conclu entre le société RENAULT et les organisations syndicales du groupe a été créé le Comité de Groupe Européen (C.G.E.) RENAULT ’ qu'un accord du 5 mai 1995 a précisé les attributions, la composition, l'organisation et le fonctionnement de ce comité, en précisant qu'il faisait suite au "bilan des activités et de l'expérience de deux années de fonctionnement" et qu'il "(s'inscrivait) dans la perspective de la transposition nationale de la Directive du Conseil de l'Union Européenne du 22 septembre 1994 concernant l'institution d'un Comité d'Entreprise Européen"

1-3 Considérant que le 27 février 1997 le président-directeur-générai de la société RENAULT a publiquement annoncé le fermeture de l'usine de Vilvoorde; qu'une réunion du comité de groupe s'est tenue le 11 mars 1997 ; que le 3 avril 1997 a été rendue par le Tribunal du Travail de Bruxelles une décision constatant d'une part, en substance, "que la décision de fermeture et de licenciement collectif (appartenait) exclusivement au chef d'entreprise R.I.B." et ordonnant d'autre part à cette société "d'entamer sans tarder des consultations effectives concernant les prévisions relatives à l'emploi du personnel, à l'organisation du travail et à la politique de l'emploi en général"

I-4 Considérant que par ordonnance du 4 avril 1997 la formation des référés du Tribunal de Grande Instance de Nanterre, saisie par le C.G.E. RENAULT le 20 mars 1997 et tenant pour trouble manifestement illicite l'annonce de fermeture de l'usine de Vilvoorde sans information et consultation préalable de ce

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comité, a, en allouant au demandeur une somme de 15 000 F pour frais hors dépens

a). " (Constaté) que l'accord d'anticipation du 5 mai 1995 relatif au Comité de groupe européen RENAULT (faisait) obligation à Ja direction centrale de la société RENAULT d'informer et consulter celui-ci au sujet d’une décision à prendre intéressant ses orientations stratégiques et l'évolution majeure d’une filiale européenne de nature à avoir des répercussions au plan européen",

obligation n'(avait) pas été respectée avant l'annonce de la décision de la fermeture de l'usine de VILVOORDE faite le 27 février 1997",

c). " (fait) en conséquence interdiction à la société RENAULT, dirigeante du groupe RENAULT, de poursuivre y compris à travers ses filiales, dans le cadre de ses pouvoirs de direction, la mise en oeuvre de la fermeture de l'usine de VILVOORDE jusqu'à ce qu'elle ait rempli son obligation d'information et de consultation envers son comité de groupe européen en application de l'accord du 5 mai 1995" ;

II

II-1 Considérant que la société RENAULT, appelante de cette ordonnance, demande son annulation et subsidiairement son infirmation ; qu'elle estime n'y avoir lieu, en l'espèce, à référé ; qu'à titre subsidiaire elle demande qu'il soit constaté "que le juge français ne saurait ordonner la suspension d'une procédure se déroulant sur un territoire étranger"

II-2 Considérant que le C.G.E, RENAULT conclut à la confirmation . du l'ordonnance et sollicite une somme de 20 000 F au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; qu'à titre subsidiaire il demande que soient posées à la Cour de Justice des Communautés Européennes deux questions préjudicielles relatives à la portée de la



directive du 22 septembre 1994 et à celle des "accords d'anticipation" conclus au regard de cette directive, tel celui mentionné au paragraphe I-2 ci-dessus ; que la société RENAULT s'oppose à cette demande subsidiaire.

II-3 Considérant que la Fédération Européenne des Métallurgistes (F.E.M.), intervenante volontaire, conclut à la confirmation de l'ordonnance en déclarant faire siennes les écritures du C.E.G. RENAULT ;

II-4 Considérant que le Ministère Public conclut à une réformation de l'ordonnance, une telle réformation pouvant être totale ou partielle avec maintien d'un constatation d'irrégularité relative à la réunion du 11 mars 1997 ;

III

Sur la demande d'annulation de

l'ordonnance

III-1 Considérant qu'à l'appui de cette demande, la société RENAULT reproche au premier juge d'avoir méconnu le principe de contradiction et l'article 14 du Nouveau Code de Procédure Civile en interdisant à la société R.I.B. de poursuivre un processus de fermeture "sans que cette personne morale ait été appelée en la cause" ; quelle ajoute que si le juge des référés ."a cru pouvoir se réfugier derrière le pouvoir de direction détenu par la société dominante... il (a nié) les droits dont bénéficie toute personne morale de défendre à une action en justice indépendamment de son actionnaire majoritaire" ; qu'elle déclare en outre que l'ordonnance "porte atteinte aux principes de territorialité de la loi française et de souveraineté des Etats étrangers en faisant produire à la loi française des effets sur le territoire belge" ; qu'elle taxe cette "méconnaissance" d'une "particulière acuité” eu égard aux termes, rappelés plus haut, du jugement belge du 3 avril 1997 ;



III-2 Mais considérant que c'est précisément en sa qualité d'entreprise dominante du groupe RENAULT que la société RENAULT a reçu du premier juge l'injonction de ne pas faire qui constitue la matière de l'ordonnance ; que le pouvoir de décision nécessairement revendiqué par l'annonce publique du 27 février 1997 désignait évidemment cette société comme destinataire possible de l'interdiction prononcée sans que ne soit, par une telle interdiction, méconnus à la société R.I.B. des droits relatifs à une autonomie que la même annonce lui refusait ; que le principe de territorialité de la loi française ne souffre nullement d'une injonction donnée à une personne morale française de prendre en France, comme elle entend le faire, une décision susceptible d'effets en Belgique, la discussion portant d'ailleurs sur la mise en oeuvre de règles de droit présumées dotées d'une Aapplicabilité européenne; que le jugement belge, s'adressant à la société de droit belge prise comme personne morale susceptible de répercuter en Belgique, dans le respect du droit belge, des décisions prises en France, n'apporte aucune contradiction à la possibilité pour un juge français d'appliquer la loi française en interdisant à une personne morale française de prendre en France lesdites décisions ; que la demande d'annulation doit donc être rejetée ;

IV

Sur les causes du référé

IV-1 Considérant que la directive 94/45/CE du 22 septembre 1994 du Conseil de l'Union Européenne, qui intègre à l'ordre juridique communautaire des intentions contenues dans la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs du 9 décembre 1989, a pour objet, selon le paragraphe 1 de son article premier, "d'améliorer le droit à l'information et à la consultation des travailleurs dans les entreprises de dimension communautaire et les groupes d'entreprises de dimension communautaire" ; que le paragraphe 1 f) de son article 2 définit la consultation comme "l'échange de vues et l'établissement d'un



dialogue entre les représentants des travailleurs et la direction centrale ou tout autre niveau de direction plus approprié" ; que cette directive organise une procédure tendant à l'organisation, pour parvenir à l'objectif énoncé, d'un "comité d'entreprise européen ou d'une procédure d'information et de consultation des travailleurs" ; que cette organisation étant à rechercher par un accord, le paragraphe 3 de l'article 6 énonce que cet accord doit prévoir la communication d'informations portant "notamment sur des questions transnationales qui affectent considérablement les intérêts des travailleurs" ; que la charte du 9 décembre 1989 dont la directive est, sur le terrain de l'information et de la consultation, l'instrument de transposition juridique, énonce comme principe directeur, dans son article 18, que "cette information, cette consultation... doivent être mises en oeuvre en temps utile ... notamment...

à l'occasion de restructurations des entreprises affectant l'emploi des travailleurs... (ou) lors de procédures de licenciement collectif" ;

IV-2 Considérant qu'étant ainsi énoncées les obligations à imposer aux entreprises et groupes dans l'optique d'un dialogue social, l'article 13 de la directive énonce que "les entreprises ou groupes d'entreprises de dimension communautaire dans lesquels existe déjà (à la date de mise en oeuvre du texte dans l'Etat concerné) un accord applicable à l'ensemble des travailleurs, prévoyant une information et une consultation transnationale des travailleurs, ne sont pas soumises aux obligations découlant de la présente directive"; que cette directive a été transposée dans l'ordre juridique français par la loi n° 96/985 du 12 Novembre 1996 ; qu'il n'est pas sérieusement contesté que l'accord du 5 mai 1995 visé au paragraphe I-2 ci-dessus constitue un accord au sens de l'article 13 ; qu'en effet le comité de groupe qu'il institue est (article 1) "une structure d'information et de dialogue portant sur les orientations stratégiques de groupe au niveau ‘européen dans les domaines économique, financier et social, ainsi que sur les évolutions majeures des filiales relevant de l'union européenne dans la mesure où elles ont une répercussion au plan européen" ; que le même accord prévoit, comme modalités pratiques de fonctionnement du groupe, des sessions "au moins une fois par an" (article 3) avec transmission aux membres du comité "de documents... 8& jours au moins avant chaque session plénière pour

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permettre des échanges approfondis et l'expression des remarques et propositions du Comité” (article 1) ; que sont aussi prévues (article 7) les réunions d'un bureau constitué des secrétaires du comité et recevant "une information régulière sur la marche générale du groupe", cette information pouvant donner lieu à des réunions avec remise préalable de documents "sauf circonstances exceptionnelles"

qu'est ainsi caractérisée l'applicabilité dudit accord, s'agissant de la conduite à tenir par la société RENAULT vis-à-vis du C.G.E. RENAULT dans l'optique par exemple d'une fermeture de l'usine de Vilvoorde ;

IV-3 Considérant que pour tenir l'annonce de fermeture de l'usine pour trouble manifestement illicite le premier juge, approuvé par le C.G.E. RENAULT, a énoncé que la société RENAULT était, en vertu du l'accord, tenue d'informer le comité "avant d'annoncer la décision de fermeture" ce en vertu d'une "obligation d'information et de consultation" destinée "à permettre la mise en oeuvre des droits sociaux fondamentaux des travailleurs reconnus au niveau du droit européen comme du droit national" ; qu'il avait auparavant relevé qu'en fait l'annonce de la décision avait "précédé toute réunion du comité” et que la réunion du 11 mars 1997, "réunion en session plénière", n'avait été précédée d'aucune communication de document sous le délai de 8 jours ;

IV-4 Considérant qu'au soutien de son appel la société RENAULT fait valoir qu'"en aucun cas l'accord n'envisage la nécessité d'une consultation du comité de groupe européen, et encore moins avant la prise de décision", ses obligations portant seulement sur "l'information et le dialogue" ; qu'elle déclare que la périodicité annuelle retenue pour les réunions du comité signifie que "l'information dispensée et le dialogue se déroulant lors de cette réunion portent aussi bien sur des sujets passés que sur des perspectives futures" ; qu'elle souligne qu'une volonté de réunion préalable aux décisions aurait conduit à retenir comme obligatoire "la tenue de réunions ponctuelles à l'occasion de chaque prise de décision" ; qu'elle souligne encore que la charte de 1989 n'a pas entendu aligner l'obligation = d'information qu'elle prévoit sur celle, certes préalable, existant en droit interne ; qu'elle ajoute que la directive

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du 22 décembre 1994 ne prévoit pas davantage de consultation ni d'information préalable, et garantit de plus dans son article 3 "les prérogatives de la direction centrale", prérogatives auxquelles porterait atteinte une obligation de consultation préalable ; qu'elle cite enfin les dispositions de la loi de transposition du 12 novembre 1996, différentes dans leurs termes de celles des articles du Code du Travail organisant la consultation préalable du comité d'entreprise ‘ français ; qu'elle se tient pour quitte de ses obligations envers le comité des suites de la tenue de la réunion du 11 mars 1997, "réunion d'information du comité de groupe européen durant laquelle un dialogue a pu s'instaurer" ;

IV-5 Considérant que la même société fait encore valoir que la directive, en prévoyant expressément l'applicabilité des accords antérieurs à sa mise en application, oblige à respecter l'autonomie des parties signataires de ces accords, toute autre disposition n'étant que subsidiaire et ce principe étant consacré par la loi de transposition ; qu'elle rappelle que depuis sa création le comité de groupe a fonctionné sans qu'"aucun des sujets examinés au sein de cette instance n'(ait) donné lieu à saisine aux fins d'information et de consultation préalable et ce quand bien même il s'agissait de traiter de sujets transnationaux ou importants pour le groupe" ; qu'elle explique le défaut de communication préalable de documents lors de la réunion du 11 mars 1997 par la nécessité, à l'époque, d'une réunion du seul bureau en présence de circonstances exceptionnelles ;

IV-6 Considérant que le visa exprès, fait par l'accord du 5 mai 1995, à la directive du 22 septembre 1994 dans les termes rappelés au paragraphe I-2 ci-dessus, signifie évidemment que les signataires de cet accord ont entendu adopter, en anticipant au surplus sur leur transposition, les normes posées par la directive, après d'ailleurs la période expérimentale de deux années écoulée depuis l'accord de 1993 et dûment rappelée ; qu'étant ainsi établie la volonté des parties à l'accord il est évidemment impossible de tirer argument de l'autonomie de cette volonté pour écarter les termes de la directive et de sa loi de transposition, sauf pour reconnaître, ce que commande le bon sens, que la préexistence de

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l'accord et de la structure d'information et de consultation instaurée par lui a dispensé les parties concernées, conformément à l'article 13, de la procédure prévue pour l'organisation d'une autre structure ; qu'il doit donc être tenu pour acquis que la société RENAULT était tenue d'appliquer, à l'occasion de toute décision

intérêts des travailleurs”, les normes de la directive au moyen de la procédure d'information et de consultation prévue par l'accord ; que la directive devant elle-même, sauf à méconnaître sa fonction, être appliquée à la lumière de l'objectif mentionné par la charte de 1989 d'ailleurs citée comme référence dans l'accord initial de 1993, l'information et la consultation dont la société était débitrice devaient être "mises en oeuvre en temps utile”, ce qui correspond d'ailleurs simplement, en refusant même aux termes de la charte toute valeur intrinsèque de norme, à 'l'impératif général et logique de recherche de l'effet utile des règles de droit, impératif souligné par le C.G,E. RENAULT ;

IV-7 Considérant certes qu'une telle mise en oeuvre n'implique pas, de façon absolue, une antériorité par rapport à la décision à prendre ; que rien, dans l'accord ni dans la directive inspirée de la charte et transposée par la loi, ne prévoit, comme modalité obligatoire ou substantielle, une telle antériorité, laquelle caractérise au contraire la procédure prévue en droit interne ; que force est, dans ces conditions, de réformer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a, par une disposition générale, déclaré la direction centrale de la société RENAULT tenue d'informer son comité de groupe "au sujet d'une décision à prendre" ;

IV-8 Mais considérant qu'en l'absence de toute disposition écartant, à l'inverse, la même antériorité, force sera de rechercher si elle correspond ou non, - selon les circonstances, à l'impératif de temps utile ou plus simplement d'effet utile au regard des manifestations de volonté de l'instance investie du pouvoir de décision ; que cette recherche, qui correspond à la vérification d'une légalité ou d'une éventuelle illicéité, doit se cantonner à la constatation de ce qui est manifeste lorsqu'elle est sollicitée du juge des référés ; que sera manifestement illicite au regard des principes

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qui viennent d'être exposés un comportement décisionnel n'accordant manifestement pas à l'information et à la consultation une place susceptible de leur assurer un effet utile ; que cette utilité s'appréciera au regard de critères raisonnables, au nombre desquels figureront à tout le moins la place laissée aux observations, contestations ou critiques, l'importance et le caractère irrémédiable ou non des préjudices susceptibles d'être causés ou encore le respect

réactions utiles, voire à une modification des résolutions initiales, le tout pour que la décision prise ou à prendre ait un dégré minimum de souplesse ou rencontre le minimum d'acceptation ou de compréhension nécessaire à la régulation, apparemment recherchée, des rapports sociaux transnationaux ;

IV-9 Considérant qu'est manifestement illicite au regard de ces règles une absence d'information et de consultation préalable à l'annonce publique, par une entreprise dominante située en France, d'une décision pure et simple de fermeture d'une unité de production employant selon les informations fournies, dans une filiale située en Belgique, un nombre de salariés voisin de trois mille et exposant un tel nombre de personnes aux peines et inconvénients d'une perte potentielle d'emploi ; qu'une telle décision est, par son impact social, sans commune mesure avec les épisodes passés cités par la société comme ayant donné lieu à simples dialogues postérieurs ; que devait d'évidence être observée en l'espèce, par une réunion de comité éventuellement supplémentaire au regard du

antériorité d'information et de consultation certes insusceptible de constituer un principe général et absolu ; qu'étant ainsi caractérisé, au sens de l'article 809 du Nouveau Code de Procédure Civile, le trouble manifestement illicite à faire .cesser, sa cessation sera garantie par l'énoncé des mesures que devra prendre, vis-à-vis ‘de son comité de groupe, la société RENAULT si elle entend donner, par l'exercice normal de ses prérogatives de société dominante, une suite quelconque à l'annonce faite par son président-directeur-général le 22 février 1997 ; que les mesures à prendre le seront à l'égard du comité lui-même et non de son seul bureau, la question à débattre excédant d'évidence "la marche générale du groupe" au sens de l'article 7 de l'accord ;

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IV-10 Considérant qu'il sera évidemment procédé à cet énoncé de mesures sans recours à des questions préjudicielles dont la formulation même serait incompatible avec la constatation qui vient d'être faite d'une illicéité manifeste ; qu'il sera par ailleurs suffisamment répondu à la demande subsidiaire de la société RENAULT en observant qu'elle est sans fondement puisque le même énoncé concernera l'éventualité, pour cette société, de décider en France du sort de l'unité de production de sa filiale belge, ce qui n'est pas une "procédure se déroulant sur un territoire étranger" mais un simple acte de gestion inhérent au fonctionnement même d'une entreprise multinationale à direction française ;

Et considérant que l'équité commande d'allouer en cause d'appel au C.G.E. RENAULT une somme de 15 000 F en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ; que cette somme s'ajoutera à celle pertinemment accordée, en application du même texte, par le premier juge au titre de l'instance suivie devant lui ; que les dépens seront supportés par la société RENAULT, partie perdante pour l'essentiel.


PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Réformant l'ordonnance entreprise,

1°/ Dit que si -la société RENAULT entend apporter ou faire apporter par sa filiale la société RENAULT INDUSTRIE BELGIQUE une suite quelconque à l'annonce faite par son président- directeur-général le 22 février 1997 d'une fermeture de l'unité de production de Vilvoorde,

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elle devra auparavant réunir en session plénière, au besoin extraordinaire, le Comité de Groupe Européen RENAULT, avec transmission aux membres de ce comité, kuit jours au moins avant la session, des documents utiles à une connaissance des motifs et des répercussions d'une telle fermeture,

2°/ Interdit en conséquence qu'il soit donné suite à la même annonce sans la réunion préalable susmentionnée,

3°/ Dit n'y avoir lieu à plus ample référé,

4°/ Condamne la société RENAULT aux dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers droit de recouvrement direct au profit de la S.C.P. JULLIEN-LECHARNY-ROL, avoués. La condamne en outre à verser pour frais hors dépens au Comté de Groupe — Européen RENAULT une somme de 15 000 F (quinze mille francs) qui s'ajoutera à celle déjà allouée pour mêmes frais par le premier juge. :

ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRÊT

Monsieur GILLET, Président, qui l'a prononcé,

Mademoiselle IMBERT, Greffier, qui a assisté au prononcé,

LE PRESIDENT

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