N° J 23-85.798 F-B
N° 01431
ODVS
26 NOVEMBRE 2024
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 26 NOVEMBRE 2024
M. [V] [M] et Mme [Aa] [Z] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 20 septembre 2023, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 21 avril 2022, pourvoi n° 21-82.247), pour traite d'être humain, travail dissimulé et emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail, les a condamnés à deux ans d'emprisonnement avec sursis probatoire, et a prononcé sur les intérêts civils.
Les pourvois sont joints en raison de la connexité.
Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires, ont été produits.
Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [V] [M] et Mme [Aa] [Z], les observations de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [F] [X] et de l'association [1], et les conclusions de M. Tarabeux, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 octobre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'
article 567-1-1 du code de procédure pénale🏛, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [V] [M] et son épouse, Mme [Aa] [Z], ont eu recours aux services de M. [F] [X], qui logeait à leur domicile et y effectuait diverses tâches domestiques.
3. A la suite d'un signalement portant sur de possibles mauvais traitements et conditions d'hébergement indignes de M. [X], une enquête préliminaire a été diligentée.
4. M. [M] et Mme [Ab] ont été cités devant le tribunal correctionnel des chefs susvisés et ont été condamnés par jugement du 21 octobre 2019.
5. Ils ont interjeté appel de ce jugement.
Examen des moyens
Sur les premier et troisième moyens
6. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale.
Sur le deuxième moyen
Enoncé du moyen
7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné les époux [M] du chef de traite d'être humain, alors « que le délit de traite d'être humain est réalisé par l'une des quatre circonstances mentionnées à l'
article 225-4-1 du code pénal🏛 ; que selon le 4°) de l'article L 224-5-1 l'auteur de la traite doit avoir agi « en échange ou par l'octroi d'une rémunération ou de tout autre avantage ou d'une promesse de rémunération ou d'avantage » ; qu'en retenant que « le moyen de la traite » était « constitué par la rémunération certes dérisoire qu'ils [les prévenus] ont consentie à [F] [X] qui a déclaré percevoir directement quelques modiques sommes indépendamment de celles envoyés par les prévenus à son épouse » et qu' « il est également constitué par la promesse entretenue d'une rémunération ayant été faite par les prévenus », sans relever que les prévenus auraient eux agi en échange d'une rémunération ou promesse de rémunération, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé le moyen de la traite au regard d'une circonstance de l'article 225 4-1 du code pénal, et a violé l'article 225-4-1 du code pénal. »
Réponse de la Cour
8. Pour dire établi le délit de traite d'être humain, l'arrêt attaqué énonce notamment que le moyen de la traite est constitué par la rémunération certes dérisoire que les prévenus ont consentie à M. [X] qui a déclaré percevoir directement quelques modiques sommes indépendamment de celles envoyées par les prévenus à son épouse.
9. Les juges ajoutent que la traite est également constituée par la promesse entretenue d'une rémunération complémentaire faite par les prévenus.
10. En statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen.
11. En effet, il ressort tant des termes de l'article 225-4-1 du code pénal dans sa version issue de la
loi n° 2013-711 du 5 août 2013🏛 que des travaux préparatoires de cette dernière que la traite d'être humain peut être caractérisée par le fait de recruter, transporter, héberger une personne ou de l'accueillir à des fins d'exploitation, en échange ou par l'octroi ou la promesse d'une rémunération à celle-ci, sans qu'il soit besoin de constater que l'auteur a agi ainsi en échange d'une rémunération ou de la promesse d'une rémunération.
12. Ainsi, le moyen doit être écarté.
13. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE les pourvois ;
FIXE à 2 500 euros la somme globale que M. [V] [M] et Mme [Aa] [Z] devront payer à la SCP Le Guerer, Bouniol, Brochier en application de l'
article 618-1 du code de procédure pénale🏛 et de l'
article 37, alinéa 2, de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée🏛 ;
FIXE à 2 500 euros la somme globale que M. [V] [M] et Mme [Aa] [Z] devront payer à l'association [1] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six novembre deux mille vingt-quatre.