Jurisprudence : CA Paris, 16e ch., A, 08-01-2003, n° 2000/15011

CA Paris, 16e ch., A, 08-01-2003, n° 2000/15011

A9532A4S

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COUR D'APPEL DE PARIS
16è chambre, section A
ARRÊT DU 8 JANVIER 2003
(N° , 12 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 2000/15011 Pas de jonction
Décision dont appel Jugement rendu le 27/06/2000 par le TRIBUNAL DE COMMERCE de PARIS 2è Ch. RG n° 1997/44139 Date ordonnance de clôture 2 Septembre 2002 Nature de la décision CONTRADICTOIRE Décision CONFIRMATION

APPELANTE
S.A.R.L. CABINET FERRI-SOCOFINORD prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège PARIS
représentée par la SCP MONIN, avoué
assistée de Maître ... ..., Toque D 1263, Avocat au
Barreau de PARIS
INTIMÉ
Monsieur Y MehamedY
demeurant PARIS
représenté par Maître BLIN, avoué
assisté de Maître ... ....NCOISE, Toque D 661, Avocat au Barreau
de PARIS
INTIMÉ
Monsieur ... M.
demeurant PARIS
représenté par Maître BLIN, avoué
assisté de Maître ... ..., Toque D 40, Avocat au Barreau de
PARIS

COMPOSITION DE LA COUR Lors des débats et lors du délibéré
PRÉSIDENT Monsieur DUCLAUD
CONSEILLERS Madame ...
Madame ...
DÉBATS
A l'audience publique du 23 septembre 2002
GREFFIER
Lors des débats et lors du prononcé de l'arrêt N. ...
ARRÊT
contradictoire
Prononcé publiquement par Monsieur DUCLAUD, Président, lequel a signé la minute avec Madame BASTIN-CHAVANT, Greffier
La Cour statue sur l'appel interjeté par la S.A.R.L. le Cabinet FERRI-SOCOFINORD d'un jugement du Tribunal de Commerce de PARIS du 27 juin 2000 qui a
* condamné ledit Cabinet FERRI-SOCOFINORD à payer
- à Messieurs Y et ..., à charge pour eux de faire entre eux leur affaire du règlement des dettes à leur charge relative au fonds vendu et de se partager l'éventuel boni, la somme de 500.000 F,
ARRÊT DU 8 JANVIER 2003 RG N° 2000/15011 - 2ème page Cou d'App 1 de Pari
1 fiambr, section A
- à Monsieur Y la somme de 30.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
- à Monsieur ... la somme de 15.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
* a mis hors de cause la SOCAF et a condamné Monsieur Y à lui payer la somme de 10.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
* condamné le Cabinet FERRI-SOCOFINORD aux dépens.

Les faits et la procédure peuvent être résumés ainsi qu'il suit
Se disant orientés et conseillés par le Cabinet FERRI-SOCOFINORD, Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... ont, par acte sous-seing privé du 16 mai 1991, acquis un fonds de commerce de café-brasserie, à Paris (10 ème) pour le prix de 1.450.000 F, grâce à un prêt de la Compagnie Financière des Cafetiers Hôteliers Restaurateurs de 1.600.000 F au taux de 14,8 % par an remboursable en 81 mensualités de 31.347 F.
Lors de la vente, le Cabinet FERRI-SOCOFINORD, rédacteur de l'acte, a fait état d'un bail unique portant un loyer annuel hors taxes d'un montant de 54.705,60 F.. ... acquéreurs découvrent en 1993 qu'il y avait deux baux distincts pour un loyer total hors taxes de 89.293 F par an.
Après avoir étudié avec la société CFCHR diverses modalités de remboursement de leurs dettes de remboursement auxquelles ils n'arrivaient plus à faire face, Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... d'une part, et, Monsieur C. ..., client du brasseur J.. ... B.B.C. lié à la société CFCHR par des liens familiaux, ont signé le 23 juin 1994 une "promesse de vente du fonds de commerce ferme et définitive", acte rédigé par le Cabinet FERRI-SOCOFINORD.
Le prix de vente du fonds était fixé à 1.700.00. F et devait être versé le jour de la réalisation de la vente prévue pour le 31 juillet 1994. Monsieur ... a versé au compte séquestre du Cabinet FERRI-SOCOFINORD la somme de 350.000 F sous forme d'un chèque. Ledit Cabinet avait mandat de se dessaisir de cette somme afin de régler les dettes fixées par Monsieur Y dans un état annexé à la promesse de vente.

Cour d'Appel de Paris ARRÊT DU 8 JANVIER 2003 16è chambre, section RG N° 2000/15011 - 3ème page Le 29 août 1994, l'acte de cession du fonds était signé, mais avec les différences suivantes avec les termes de la promesse de vente du 23 juin 1994
- la Société Hôtelière Daumesnil représentée par Monsieur ... s'est substituée à celui-ci comme cessionnaire,
- le prix de la cession était ramené à la somme de 1.350.000 F,
- la Société Hôtelière Daumesnil "s'engageait à régler tout le passif dont un état était annexé au présent acte et s'engageait à régler celui-ci au titre de toutes dettes dues au 30 août 1994".

Par acte du 14 mai 1997, Monsieur Y a assigné Monsieur ..., la SOCAF et la Société FERRI-SOCOFINORD ainsi que la Société J. MILLIET et la Société CFCHR aux fins de voir lesdites sociétés condamner solidairement à lui verser une somme qui ne saurait inférieure à 3.000.000 F, de voir déclarer nul l'acte de vente du 29 août 1994 et ordonner l'exécution de celui du 23 juin précédent et de voir Monsieur ... condamner à lui payer la somme de 350.000 F, plus celle de 27.352 F.
Monsieur ... a été, par acte du 22 décembre 1999, appelé en intervention forcée par Monsieur ....
C'est dans ces conditions qu'est intervenu le jugement déféré.
La Société Cabinet FERRI-SOCOFINORD, appelante, demande à la Cour de
- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté les consorts ... de leurs demandes fondées sur le défaut de conseil lors de l'acquisition du 16 mai 1991, l'existence d'un autre bail commercial et de prétendues manoeuvres lors de la vente du 29 août 1994 à l'occasion de laquelle les consorts ... étaient assistés d'un avocat.
- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné le Cabinet FERRI-SOCOFINORD à payer aux consorts ... la somme de 500.000 F à titre de dommages-et-intérêts outre celle de 45.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
- et statuant à nouveau,
Vu les articles 1134 et 1165 du code civil,
- Débouter Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... de toutes leurs demandes, fins et conclusions.
Cour d' 16è cha
pel de Pari bre, sectio

ARRÊT DU 8 JANVIER 2003 RG N° 2000/15011 - 4ème page

- Constater que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD justifie de l'emploi du chèque de 350.000 F qu'il avait reçu et dont l'original est versé aux débats.
- Dire et juger que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD n'a commis aucune faute dans l'accomplissement de sa mission.
- Condamner Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... à payer au Cabinet FERRI-SOCOFINORD la somme de 15.000 euros à titre de dommages-et-intérêts.
- Condamner Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... à payer au Cabinet FERRI-SOCOFINORD la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
- Condamner Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... aux entiers dépens de première instance et d'appel dont distraction pour ces derniers au profit de la SCP MONIN, Avoué, dans les conditions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
Monsieur Mohamed Y, intimé, prie la Cour de
- Débouter le Cabinet FERRI-SOCOFINORD de ses demandes.
- Déclarer Monsieur Y recevable et bien fondé en son appel incident.
Y faisant droit,
- Constater que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD a manqué à son obligation de conseil et de renseignement, en sa qualité de rédacteur d'actes, lors de l'acquisition du fonds, en mai 1991.
- Constater que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD n'a pas respecté sa mission de séquestre et a commis une grave faute en ne désintéressant pas les créanciers du fonds.
- Constater que Monsieur Y a subi de graves préjudices du fait de ces manquements et s'est retrouvé interdit bancaire, inscrit au fichier de la Banque de France.
- Dire et juger que dans les conseils et tromperies du Cabinet FERRI-SOCOFINORD, Monsieur Y n'aurait jamais acquis le fonds de commerce et entrepris cette activité ruineuse.
Cour d'Appel de Paris 16è chambre, section A

ARRÊT DU 8 JANVIER 2003 RG N° 2000/15011 - Sème page


Monsieur M. ..., intimé, invite la Cour a
- Confirmé le jugement entrepris dans toutes ses dispositions.
Y ajoutant,
- Débouté la Société Cabinet FERRI-SOCOFINORD de son appel et de toutes ses demandes et déclarer le concluant recevable et bien fondé en son appel incident.
- Dit et jugé que sans les tromperies et les conseils de la Société Cabinet FERRI-SOCOFINORD, Monsieur ... n'aurait jamais acquis le fonds de commerce et entrepris cette activité ruineuse.
- Dit que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD a commis, de ce fait, une faute à l'égard de Monsieur ....
- Déclaré en conséquence la Société Cabinet FERRI-SOCOFINORD responsable à l'égard de Monsieur ... et l'a condamné à payer à Monsieur ... une somme de 91.469,41 euros de dommages et intérêts pour le préjudice qu'il a subi et une somme de 45.734,71 euros de dommages et intérêts pour le préjudice moral qu'il a subi.
- Condamné par conséquent la Société Cabinet FERRI-SOCOFINORD à payer à Monsieur ... la somme de 137.204,12 euros de dommages-et-intérêts en réparation des deux préjudices subis.
- Ordonné la présentation de l'original du chèque de 53.357,16 euros à la Cour.
- Dit que, du fait du non encaissement du chèque de 53.357,16 euros, la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD s'est tout de suite mise dans l'impossibilité d'accomplir sa mission de séquestre et y a même renoncé sans l'accord de tous les intéressés.
- Dit que ce comportement constitue une faute préjudiciable à Messieurs ... et Y.
- Constaté que la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD n'a pas respecté sa mission de séquestre et a commis une faute grave en ne désintéressant pas les créanciers du fonds.
- Constaté le non respect de la procuration du 17 juillet 1994 par la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD.
- Condamné la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD à payer à Monsieur ... la somme de 91.469,41 euros de dommages-et-intérêts pour le préjudice matériel résultant du non respect de la procuration du 17 juillet 1994 qui exigeait que la vente du fonds devait être faite à un prix permettant de rembourser l'intégralité des dettes grevant le fonds et pour le préjudice matériel résultant du fait de ne pas remplir sa mission qui, en tant que séquestre, consistait à encaisser le chèque et à payer les dettes jusqu'à hauteur de 53.357,16 euros avec les fonds séquestrés.
- Condamné la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD à payer à Monsieur ... la somme de 30.489,80 euros de dommages-et-intérêts pour le préjudice moral résultant du non respect de la procuration du 17 juillet 1994 qui exigeait que la vente du fonds devait être faite à un prix permettant de rembourser l'intégralité des dettes grevant le fonds et pour le préjudice moral résultant du fait de ne pas remplir sa mission qui, en tant que séquestre, consistait à encaisser le chèque et à payer les dettes jusqu'à hauteur de 53.357,16 euros avec les fonds séquestrés.
- Condamné la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD, à payer la somme de 21.091,63 euros, à titre de dommages-et-intérêts, à Monsieur ... pour le préjudice matériel résultant des sommes payées pour le bail supplémentaire dont la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD n'a pas révélé 1 'existence .
- Condamné la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD à payer la somme de 6.000 euros, à Monsieur ... en vertu de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
- Condamné la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD aux entiers dépens de première d'instance et d'appel dont distraction au profit de Maître M. ..., Avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.

CECI ÉTANT EXPOSÉ, LA COUR,
Considérant que Monsieur Y fait d'abord grief à la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD de ne pas l'avoir éclairé sur le prix exorbitant auquel Monsieur ... et lui ont eux-mêmes acquis le fonds dont il s'agit,

soit 1.450.000 F, alors que le montant annuel du remboursement du Cabinet CFCHR était de 376.488 Fpar an, soit une somme supérieure au chiffre d'affaires du fonds cédé pour les deux dernières sommes d'exploitation (1989 et 1990) ;
Mais considérant que Monsieur Y et Monsieur ... ont été à même de prendre une décision d'achat du fonds dont il s'agit en connaissance de cause, puisque les chiffres qu'ils étaient connus avant la cession ; qu'ils ne peuvent que s'en prendre à eux-mêmes s'ils ont mal évalué les risques commerciaux qu'ils prenaient ;
Considérant que Monsieur ... soutient ensuite que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD s'est rendu coupable de deux fautes ; qu'en premier lieu, il n'a pas rempli sa mission de séquestre de la somme de 350.000 F aux fins de désintéresser les créanciers du fonds cédé alors que cela résultait d'une stipulation de la promesse de vente du fonds du 23 juin 1994 ; qu'étant observé qu'en cours de procédure d'appel, la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD a produit le chèque de 350.000 F, il apparaît à l'évidence que celle-ci n'a jamais eu l'intention de séquestrer les fonds et de payer les créanciers dudit fonds ; qu'elle a donc failli à sa mission de séquestre ; qu'en second lieu, le Cabinet FERRI-SOCOFINORD a commis une faute en omettant de se conformer à la procuration qu'il avait donnée à Monsieur Y le 17 juillet 1994 en vue de la représenter à l'acte du 29 août 1994 dans laquelle il précisait que la vente du fonds devait être faite à un prix permettant de rembourser l'intégralité des dettes grevant le fonds; que dans l'acte du 29 août 1994, dès lors que le prix du fonds de 1.350.000 F ne permettait pas de régler toutes les dettes grevant le fonds, il y avait non respect des termes de son mandat; que la société FERRI-SOCOFINORD en tant que rédacteur et conseil avait l'obligation dans l'acte de vente de respecter les termes exacts de la procuration et de veiller à ce que le représentant de Monsieur ... avait le pouvoir de passer l'acte ; qu'en ne s'assurant pas du respect des termes de la procuration, la société FERRI-SOCOFINORD a commis, selon lui, une faute grave ;
Considérant que Monsieur Y fait lui aussi grief au Cabinet FERRI-SOCOFINORD d'avoir failli à sa mission de séquestre qui consistait d'une part à encaisser le chèque de 350.000 F, et, d'autre part, avec cette somme, désintéresser les créanciers du fonds ; qu'aucun document ne démontre qu'il ait été mis fin à sa mission de désintéressement des créanciers, que ce manquement fautif a entraîné, selon Monsieur Y, un grave préjudice en raison des poursuites des créanciers à son égard puisque dans l'acte de vente du 29 août 1994, le cessionnaire, la société Hôtelière Daumesnil qui devait apurer le passif grevant le fonds a déposé son bilan quelques mois après l'acquisition du fonds de commerce ; qu'il est interdit bancaire depuis cette date, a été poursuivi seul par l'ensemble des créanciers pour des dettes alourdies par les pénalités et majorations de retard ;


'Cour d'Appel de Paris 16è chambre, section A
ARRÊT DU 8 JANVIER 2003 RG N° 2000/15011 - 8ème page

Considérant que pour s'opposer à ces moyens, la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD argue du fait qu'elle produit en cause d'appel l'original du chèque de 350.000 F signé par Monsieur ... que celui-ci lui avait remise en sa qualité de séquestre ; que cela démontre qu'elle n'a pas dilapidé les fonds remis ; que dans ces conditions, selon elle, il n'est plus possible de retenir comme l'ont fait les juges de première instance que le non paiement des dettes lui est imputable ;
Considérant, ceci étant, qu'il est constant que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD a reçu en qualité de séquestre le chèque de 350.000 F, qui vaut paiement de celle-ci, "afin de régler les dettes fixées par Monsieur Y dont un état est annexé aux présentes (stipulations) en date du 13 juin 1994, sauf à parfaire ou à diminuer pour la date de signature de l'acte définitif au 31 juillet 1994" ;
Qu'il ressort de cette stipulation que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD avait un délai limité, le 31 juillet pour accomplir sa mission de séquestre en ce qu'elle lui faisait obligation de régler les dettes du fonds ; que la société FERRI-SOCOFINORD, en ne mettant pas le chèque dont il s'agit à l'encaissement montre qu'elle n'a jamais entendu remplir sa mission de paiement des créanciers ; qu'elle n'allègue pas qu'il y ait eu une contre-lettre ou un accord tacite pour s'abstenir d'exécuter les obligations découlant de sa mission, étant observé que la clause "Sort de ce versement ... le séquestre demeure chargé de conserver la somme à lui confier avec mission 1°) - de remettre cette somme au promettant, ou de s'en dessaisir à hauteur de l'état des dettes du 13 juin 1994 annexé aux présentes (stipulations)" ; que si comme elle le soutient, c'est parce que les parties avaient décidé de modifier les modalités de prise en charge du passif grevant le fonds qu'elle n'a pas mis le chèque à l'encaissement, cela appelle une première remarque ; qu'il ressort de la lettre que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD a adressé le 3 août 1994 à Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... ainsi qu'à leur conseil que la modification quant au sort du passif n'a été convenu que dans les jours qui ont précédé cette date ; que cela démontre que ce Cabinet n'avait aucun motif de ne pas encaisser le chèque de 350.000 F dès sa remise, le 23 juin 1994 ce qui aurait permis de régler les dettes les plus urgentes ;
Que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD a donc commis une faute indiscutable en sa qualité de séquestre ; qu'il convient de voir que celle-ci a entraîné pour Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... une perte de chance d'être définitivement déchargés au moins partiellement du passif du fonds ; que l'état des dettes au 13 juin 1994 annexé à la promesse de vente du 23 juin 1994 fait état d'un total de dettes de 322.833,61 F ; que la perte de chance n'a porté que sur les 3/4 de cette somme qui normalement auraient dus être réglés sans
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t'l
Cour d'Appel de Paris
16è chambre, section





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difficulté par le séquestre et ce, dans la mesure où il faut considérer que la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD n'a eu qu'un délai de trois semaines pour s'exécuter ; que la société FERRI-SOCOFINORD sera condamnée à verser à Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... la somme de 242.125 F, soit 36.911,15 euros à titre de dommages-intérêts ;
Considérant que la Cour relève que la mention de ce que la vente du fonds devait être faite à un prix permettant de rembourser l'intégralité des dettes grevant le fonds figurant dans le mandat donné par Monsieur ... à Monsieur Y ne saurait avoir entraîné une faute quelconque du Cabinet FERRI-SOCOFINORD puisque le Conseil des cédants a implicitement considéré que l'acte de cession du 29 août 1994 répondait à cette exigence ;
Considérant que Monsieur ... et Monsieur Y font l'un et l'autre aussi reproche au Cabinet FERRI-SOCOFINORD de leur avoir caché dans l'acte par lequel ils ont eux-mêmes acquis le fonds litigieux qu'il y avait un bail supplémentaire pour la boutique qui leur avait était présentée comme faisant partie intégrante du fonds ; qu'à raison de ce fait, Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... ont versé en "supplément" de loyers d'un montant total de 138.352 F ; que compte tenu de l'importance du droit au bail dans l'estimation de la valeur du fonds, il appartenait au Cabinet FERRI-SOCOFINORD, rédacteur de l'acte, d'interroger le propriétaire des murs sur l'existence des baux, et ce, d'autant qu'en qualité d'agent immobilier, c'est le Cabinet FERRI-SOCOFINORD qui a fait visiter les lieux aux futurs cessionnaires ;
Mais considérant que le fait qu'il ait existé deux baux portant sur les locaux du fonds qui avait été cédé à Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... est une information qu'il appartenait au cédant de faire insérer dans l'acte de cession ; que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD a inséré dans l'acte de cession les mentions habituelles relatives au bail ; qu'il y est fait état de deux boutiques ; que dans ces conditions, le Cabinet FERRI-SOCOFINORD n'a pas manqué de vigilance et s'est laissé surprendre par les indications de cessionnaires, seul éventuellement responsable d'un préjudice né de son abstention ;
Que Messieurs BEDRANEBEDRANE et ... seront donc déboutés de leur demande d'indemnisation de ce chef ;
/Cour d'Appel de Paris L 16è chambre, section

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Considérant que Monsieur Y demande encore la condamnation de la société FERRI-SOCOFINORD à lui verser la somme de 30.489,80 euros à raison de son préjudice moral ;
Mais considérant que Monsieur Y n'apporte nullement la preuve que sa réputation ait pu être entachée par ce fait ; que les soucis qui en découlent sont des contrariétés inhérentes aux affaires commerciales ; qu'il sera donc débouté de ce chef de demande ;
Considérant que Monsieur ... sollicite lui aussi la condamnation du Cabinet FERRI-SOCOFINORD à lui verser la somme de 30.489,80 euros à titre de dommages-intérêts "pour le non respect de la procuration du 17 juillet 1994" et "pour le préjudice moral résultant du fait de ne pas remplir sa mission qui, en tant que séquestre, consistait à encaisser le chèque de 350.000 F" et à payer les dettes à due concurrence avec cette somme ;
Mais considérant que la Cour a dit que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD n'avait commis aucune faute au regard de ladite procuration ; que quant au reste, les soucis inhérents aux affaires commerciales ne sauraient donner lieu à indemnisation ;
Considérant que le Cabinet FERRI-SOCOFINORD, qui succombe, ne saurait se plaindre d'une procédure abusive à son encontre, et, ne saurait se voir allouer une indemnité sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
Considérant que l'équité commande de condamner la Société FERRI-SOCOFINORD à verser à
- Monsieur Y la somme de 6.000 euros en paiement de ses frais irrépétibles de procédure de première instance et d'appel ;
- Monsieur ... la somme de 6.000 euros en paiement de ses frais irrépétibles de procédure de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement déféré en son principe de condamnation de la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD à verser à Monsieur Mohamed Y et à Monsieur M. ... une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour la faute commise par celle-ci dans l'exécution de son mandat de séquestre ;
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Cour d'Appei de Paris
16è chambre_section A
L'émende quant au montant de la condamnation ; Dit que celui-ci sera de 36.911,15 euros ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur Y et Monsieur ... de leurs autres chefs de demande d'indemnisation ;
Y ajoutant,
Déboute la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;
Condamne ladite société Cabinet FERRI-SOCOFINORD à verser à Monsieur ... la somme de 6.000 euros en paiement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Condamne encore ladite société de verser à Monsieur Y la même somme de 6.000 euros en paiement de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel ;
Confirme le jugement déféré en ce qu'il a décidé quant au sort des dépens ;
Condamne la société Cabinet FERRI-SOCOFINORD aux dépens d'appel ; autorise les avoués des intimés à les recouvrer, chacun en ce qui le concerne, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile
LE GREFFIER, LE PRESID
Cour d'A de de Paris 16è chamb, section A

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