Jurisprudence : CA Paris, 25, A, 28/01/2000, n° 1998/17073

CA Paris, 25, A, 28/01/2000, n° 1998/17073

A2809AYP

Référence

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**COUR D'APPEL DE PARIS

25è chambre, section A

ARRET DU 28 JANVIER 2000**

Numéro d'inscription au répertoire général : 1998/17073
1998/23519

Décision dont appel : Jugement rendu le 23/06/1998 par le TRIBUNAL DE
COMMERCE de PARIS (7ème Ch.) RG n°: 1997/07949 -M. VERROUST


**APPELANTS:
**
S.A. CEJIBE
ayant son siège 72, chemin de Ramatuelle - 84000 AVIGNON
agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette
qualité audit siège

Monsieur A B demeurant …, … … … … … …


S.A. TROC DE L'ILE
ayant son siège 3, rue des Alizés - 30133 LES ANGLES agissant en la personne
de son Président Directeur Général domicilié en cette qualité audit siège

représentés par Maître BAUFUME, avoué
assistés de Maître DESCHAMPS, Toque P 52, Avocat au Barreau de PARIS


**INTIMÉE
**
S.A. EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE ayant son siège 37, avenue des Champs Elysées
- 75008 PARIS agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés
en cette qualité audit siège

représentée par la SCP BOMMART-FORSTER, avoué
assistée de Maitre JAKUBOWICZ, Avocat au Barreau de LYON,

**COMPOSITION DE LA COUR
**lors des débats et du délibéré

PRÉSIDENT : Madame BRIOTTET
CONSEILLERS: Madame C et Madame Aa


DÉBATS : à l'audience publique du 3 DÉCEMBRE 1999

GREFFIER lors des débats et du prononcé de l'arrêt: Madame X

ARRET : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement par Madame BRIOTTET, Président, laquelle a signé la
minute, avec Madame MARTEYN, Greffier.

Par jugement du 23 juin 1998, le Tribunal de Commerce de PARIS a :

- débouté les Sociétés CEJIBE, TROC DE L'ILE et B A des
demandes qu'ils avaient formées contre la SA EUROPE FINANCE ET INDUSTRIE
"E.F.I." tendant à la résiliation aux torts de cette dernière du contrat
d'étude aux fins de présentation en Bourse, et payement de dommages-intérêts,

-condamné la SA CEJIBE à payer à la SA E.F.I. la somme de 265.320 francs majorée des intérêts légaux depuis le 17 décembre 1996, contre remise de la traite de même montant, outre une seconde somme de montant identique.

Les SA CEJIBE, TROC DE L'ILE ainsi que B A interjettent appel;
- Ils soutiennent qu'au stade de l'information précontractuelle la SA E.F.I.
les avait pleinement assurés que la présentation serait réussie "brillamment"
et que c'est ainsi qu'ils avaient consenti un mandat exclusif assorti d'un
honoraire de 660.000 francs lit;

- Ils observent, cependant, que la présentation qui s'analysait en une
obligation de résultat pour le second marché (l'heure et le jour étant prévus)
n°a pas abouti à l'introduction en Bourse et que dès lors aucune des 3
tranches de règlement à raison de 220.000 francs chacune n°était due; - Ils
réclament donc la restitution de la traite correspondant à la première
tranche, non réglée, sous astreinte de 1.000 francs par jour de retard;

- Ils estiment que les déclarations flatteuses de la SA E.F.I. les avaient
induits en erreur et conduits à des engagements excessifs au point que par la
suite ils n°avaient pas cru devoir reculer devant une introduction en Bourse,
fût-elle d'un bien moindre intérêt telle celle du marché libre O.T.C.; - Ils
ventilent leur préjudice en :frais inutiles, perte d'image, perte de
trésorerie, tandis que le préjudice propre de B A résidait
dans la vente de 70.000 actions à un prix réduit, requérant si nécessaire une
expertise; - Ils ne prétendent pas seulement à la résolution mais à la nullité
pour dol et défaut de cause, ainsi qu'à allocation de dommages-intérêts, soit
les sommes de 703.491 francs, 500.000 francs, 8.201.540 francs et pour Ab
Ac A 3.360.000 francs, outre 50.000 francs de frais irrépétibles
pour chacun d'eux.

En réponse, la SA E.F.I. objecte qu'il y a une demande nouvelle s'agissant de
l'annulation et comme telle irrecevable; - Au fond, celle-ci réfute la thèse
adverse d'une obligation de résultat, et, en toute hypothèse, dénie qu'elle
ait été responsable de la non introduction en Bourse; - Elle souligne, en
effet : que les co-contractants étaient des personnes averties, entourées de
conseils, même si elle-même pouvait prétendre à une excellente technicité; -
que l'acte stipulait "la mise en oeuvre de moyens" ... l'apport de soins
nécessaires, conformément aux usages; - Elle ajoute que le délai donné du 5
novembre 1996 était purement prévisionnel et que le retard mis par les
sociétés à fournir les comptes consolidées l'a anormalement fait allonger,
qu'au reste les dites sociétés avaient résilié le contrat le 21 novembre 1996;
- Subsidiairement, quant au préjudice elle estime que les frais n'ont pas été
inutiles ayant servi finalement à l'introduction au marché libre, que la perte
d'image est sans fondement sérieux et celle de trésorerie mal étayée sur des
chiffres inexacts. - Pour ce qui est du préjudice de B A, elle
remarque que la résiliation prématurée a pu y concourir mais que, de toutes
façons, les cours de Bourse sont de par leur nature, éminemment fluctuants; -
Elle note qu'actuellement le marché libre est beaucoup plus porteur que le
second marché; - Elle sollicite, le payement des honoraires prévus, dûs in
solidum par la SA CEJIBE et B A, la dernière tranche, au
besoin, à titre de dommages-intérêts, pour résiliation abusive, avec l'octroi
de 50.000 francs de frais irrépétibles;

Par d'ultimes écritures, les appelants écartent le moyen opposé de demande
nouvelle alors que l'annulation et la résolution tendaient aux mêmes fins,
contestent que B A soit de par ses activités de franchiseur
pleinement informé de la matière boursière et se plaignent du harcèlement
commercial exercé par la SA E.F.I. qui se faisait fort d'obtenir
l'introduction, ne leur laissant aucune latitude dans une précipitation qui se
voulait du meilleur effet; - Ils réitèrent que la commune intention des
parties dégageait une obligation de résultat ainsi qu'en attestait d'abondance
les courriers échangés;

L'intimée maintient sa position;

**SUR QUOI,
**
Considérant que, s'il est vrai qu'en première instance les appelants
demandeurs sollicitaient la résiliation, ce ne peut être que par une
maladresse d'écriture, puisqu'en réalité ils n°admettaient aucune exécution
successive ou non et entendaient mettre à néant le contrat en déclarant ne
devoir aucun honoraire et en requérant la restitution de la traite;

Qu'il suit qu'en prétendant en appel à une annulation, il n'apparaît pas qu'il
y ait demande nouvelle;

Qu'il reste que cette annulation n'est avancée sous aucun fondement réel et
sérieux et sans une quelconque explication circonstanciée au regard du dol ou
de l'absence de cause, l'essentiel de la discussion étant axé sur la
responsabilité qui déboucherait selon la gravité des manquements constatés sur
une résolution ou des dommages-intérêts;

Que, dès lors, la demande d'annulation qui est recevable manque de pertinence
et ne saurait être soumise à examen au fond;

Que se trouve donc uniquement en litige l'exécution du contrat dans sa
conformité à la volonté des parties;

Considérant que le contrat passé entre parties le 17 juillet 1996 donnait à la
SA E.F.I. diverses missions d'études aux fins de présentation en Bourse;

- qu'il s'agissait de prestations de services et que la qualification en
obligation de moyens ou de résultat dépendait de la maîtrise que le
prestataire exerçait sur l'obtention du résultat, que dès lors qu'un
quelconque risque était impliqué, il né pouvait y avoir qu'engagement à
diligence et non à obtention du résultat attendu par le créancier ;

Qu'en l'espèce il est d'évidence que l'obtention du résultat ne dépendait pas
des seules prestations de la SA E.F.I. mais de la décision des autorités de
marché; - qu'elles étaient au demeurant intellectuelles, et que d'ailleurs le
contrat ne stipulait que la mise en oeuvre de moyens et l'apport de soins; -
que le comportement antérieur, certes d'un optimisme excessif ne pouvait pour
autant altérer cette qualification raisonnée, peu important, comme écrivait à
maintes reprises la SA E.F.I., qu'elle soit "convaincue du succès de
l'opération, qu'elle affirme la réussir brillamment (puisque accumulant le
succès depuis le début de l'année), qu'elle se flatte de ne pas se tromper et
déjeuner avec les hauts responsables de l'autorité boursière ...;

Considérant, pour ce qui est des manquements et de leur gravité, qu'il sera
retenu que l'opération était faisable, même si elle ne le sera que par la
suite et à un moindre niveau, mais très rapidement après la résiliation du
contrat avec un tiers prestataire le CRÉDIT DU NORD; - que les difficultés de
restructuration du groupe et de taille de l'entreprise étaient susceptibles
d'être surmontées, que les retards dans la remise des comptes consolidés et
leur certification n'est pas imputable à la SA E.F.I.;

Considérant néanmoins que cette dernière, professionnelle de rigueur, a failli
à un devoir renforcé de réserve et de clairvoyance; - qu'elle n'a pas
suffisamment épaulé ses clients, ni fait preuve de discernement confrontée aux
prévisions d'évaluation boursière faites par la SA CEJIBE avec un trop grand
décalage de temps par rapport à la date fixée pour la présentation, ni réagi
devant leur manque apparent de précision; - que les reports d'introduction au
21 novembre, puis aux 3 et 17 décembre, sont révélateurs d'une certaine
négligence de la SA EFI., que c'est en effet elle qui avait fixé la date du 5
novembre;

Qu'il suit que, si ces manquements n°étaient pas assez graves pour justifier
une résiliation, il y ont concouru de fait, et justifiaient une sanction en
raison de la déconvenue finale des troubles et tracas divers suscités;

Qu'il est de principe que la rémunération du mandataire peut être réduite si
elle est hors de proportion avec les diligences effectuées et le service rendu
et si le mandant n'a pas été correctement informé de l'importance du service;

Que les manquements ponctuels et l'information exagérément optimiste
autorisent une réduction des honoraires supérieure à celle du tiers accordée
par les premiers Juges, qu'elle sera portée aux deux-tiers;

Que l'évaluation du préjudice subi par les appelants s'en satisfera;

Que dans ces conditions la SA E.F.I. ne saurait prétendre qu'à la somme de
265.320 francs majorée des intérêts légaux depuis le 16 décembre 1996 ;

Considérant que la SA E.F.I. est en définitive créancière et n°a jamais reçu
le moindre règlement; - qu'il lui sera alloué 30.000 francs de frais
irrépétibles;


PAR CES MOTIFS

Contradictoirement,

Dit recevable mais mal fondée la demande d'annulation du contrat de mandat en
date du 17 juillet 1996;

Infirme le jugement entrepris;

Constate la résiliation de fait du dit mandat aux torts partagés des parties;

En conséquence, et à titre de dommages-intérêts, réduit la rémunération de la
SA E.F.I. à l'unique somme de 265.320 francs majorée des intérêts légaux
depuis le 17 décembre 1996; - condamne in solidum les SA CEJIBE, TROC DE L'ILE
et B A à payer à la SA E.F.I. la somme précitée et les
intérêts, contre remise de la traite de même montant;

Condamne in solidum les SA CEJIBE, TROC DE L'ILE et B A à
payer, en outre, à la SA E.F.I. 30.000 francs de frais irrépétibles et à
s'acquitter des entiers dépens; - Admet la SCP BOMMART-FORSTER au bénéfice de
l'art. 699 du NCPC.


LE GREFFIER LE PRESIDENT l



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