Jurisprudence : CA Paris, 3, section A, 22-10-1996, n° 94-010621

CA Paris, 3, section A, 22-10-1996, n° 94-010621

A3380A4X

Référence

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N° Répertoire Général COUR D'APPEL DE PARIS
Grosse Délivrée
1 0 14 NOV. 1996
A la requête de
tLe
94-010621 3ème chambre, section A
ARRÊT DU 22 OCTOBRE 1996 (N° 13, 8 pages)
AIDE JURIDICTIONNELLE
Admission du au profit de'
Date de l'ordonnance
de clôture 23 septembre 1996
Sur appel d'un jugement rendu le 17 mars 1994 par le Tribunal de grande instance de Paris (4ème chambre, 2ème section - RG 93/11263)

PARTIES EN CAUSE
1°) Monsieur Jacques Z demeurant LYON
APPELANT
représenté par la SCP ROBLIN CHAIX DE LAVARENE, avoué
assisté de Maître ...,
avocat au barreau de Lyon
2°) Monsieur Y Philippe demeurant NEUILLY SUR SEINE actuellement décédé 3°) Monsieur Jean Y demeurant PARIS
CONTRADICTOIRE
CONFIRMATION 4°) Monsieur Jean X
demeurant 218 boulevard ... G. -75007- PARIS
21-
5°) Madame Y née Y
Chantal
demeurant
PARIS
ès qualités d'ayant droit de M.
Y Philippe, décédé
INTIMÉS
représentés par Maître Michel BLIN, avoué
assistés de Maître D.'...,
avocat au barreau de Marseille
la Cou' Ce;etc.u
ca5sé. Parrt ci-contre et renvoyé la.,
cause à Ee Cour de MPsi-oes'--,
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ti
-14

COMPOSITION DE LA COUR lors des débats et du délibéré
PRÉSIDENT Madame BESANÇON CONSEILLERS Monsieur ...
Monsieur ...
MINISTÈRE PUBLIC
Monsieur ARMAND, Avocat Général, auquel le dossier a été communiqué
GREFFIER
Madame STOFFT
DÉBATS
A l'audience publique du 24 septembre 1996 ARRÊT
Contradictoire - prononcé publiquement par Monsieur CARRE-PIERRAT, conseiller - signé par Madame le président BESANÇON et par Madame STOFFT, greffier.

La Cour statue sur l'appel interjeté par M. Jacques Z d'un jugement rendu le 17 mars 1994 par le Tribunal de grande instance de Paris ( 4ème chambre - 2°-_section) qui l'a débouté de toutes ses demandes formées à l'encontre de Mrs. Jean X, Philippe Y et Jean X, et débouté ces derniers de leur demande reconventionnelle.
Référence étant faite à cette décision pour un plus ample exposé des faits, de la procédure antérieure et des motifs retenus par les premiers juges, il suffit, pour la compréhension du litige, de rappeler les éléments suivants
La société TEXTILINTER ayant été créée en 1987, son assemblée générale a décidé, le 4 août 1989, de procéder à une augmentation de capital, ouverte à de nouveaux actionnaires, au nombre desquels Mrs. Y,X et Z.
A l'occasion de cette augmentation de capital, la société se dotait d'un directoire et d'un conseil de surveillance; les fonctions de président du directoire était confiées à M. Jean X, celles de président du conseil de surveillance à M. Jacques Z, Mrs Philippe Y et Jean X étant membres du conseil de surveillance.
Par acte sous seing privé en date du 14 septembre 1989, M. Philippe Y,M. Jean X et M. Jean X se sont engagés conjointement, solidairement et obligés de manière irrévocable à acquérir, entre le 1er février 1993 et le 15 février 1993, 22.600 actions de 100 francs de nominal chacune de la Société TEXTILINTER, détenues par M. Jacques Z; cette promesse devenait caduque s'il ne manifestait pas son intention avant le 15 février 1993, les promettants étant dégagés de toute obligation envers lui.
Le 25 novembre 1992, la société TEXTILINTER a déposé son bilan et a été déclarée en redressement judiciaire.
M. Z, après avoir à différentes reprises manifesté son intention de lever l'option et excipant du fait que les promettants s'étaient refusés à exécuter leurs engagements, a saisi le 29 mars 1993 le tribunal de grande instance de Paris.
Les premiers juges ont débouté M. Z de ses demandes, au motif essentiel que la convention du 14 septembre 1989 ayant été conclue concomitamment à l'acquisition par M. Z des 22.600 actions de la SA TEXTILINTER, devait s'analyser comme une opération de portage ayant pour effet de le soustraire aux pertes attachées à sa qualité d'actionnaire, contrevenant ainsi aux dispositions de l'article 1844-1 du code Civil; qu'elle devait donc être réputée non écrite.
M. Z, appelant, demande à la Cour de réformer la décision déférée et de
* condamner Mrs.X, Jean et Philippe Y à exécuter l'engagement d'achat qu'ils ont souscrit conjointement et solidairement le 14 septembre 1989;
* les condamner conjointement et solidairement à lui payer
- 3.122.868 F. et ce, avec intérêts au taux légal, à compter du 12 février 1993, date du procès-verbal de carence établi par Maître ..., notaire, à Monsieur Z, ainsi que tous droits éventuellement attachés à la cession,
- 100.00 F. à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive,
- 50.000 F au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,
Au soutien de son appel, M. Z estime que les premiers juges n'ont pas tiré toutes les conséquences juridiques de la qualification de convention de portage donnée à l'acte du 14 septembre 1989, eu égard à la nature des accords souscrits par les intéressés et à l'évolution de la jurisprudence; que la promesse contenue dans cet acte, extérieur aux statuts, est motivée par une cause qui lui est propre, la cession à terme d'actions; qu'elle n'est que l'un des éléments d'une opération complexe incluant trois accords complémentaires ; qu'il en résulte que la validité de la convention est indéniable, le transfert s'étant opéré le 1er février 1993, date de la levée d'option .
Par actes des 11 juin 1996 et 4 juillet 1996, M. Z a repris l'intégralité de ses demandes à l'encontre de Mme Y épouse Y et de M. Jean X, pris en leurs qualités d'ayant droit de M. Philippe Y, décédé le 7 janvier 1996.
M. Jean X, M. Jean X et Mme Chantal Y épouse Y, intimés, demandent à la Cour de confirmer le jugement déféré et forment un appel incident pour voir condamner M. Z à leur payer, à chacun, 50.000 francs de dommages et intérêts, outre 30.000 francs au titre de l'article 700 du NCPC.
Ils soutiennent, pour l'essentiel, la nullité de l'acte du 14 septembre 1989 en ce qu'il est contraire à la prohibition des clauses léonines posées par l'article 1844-1 du Code Civil ; qu'à supposer qu'une telle convention soit licite, il convient que celui qui effectue le portage ne soit pas associé à la gestion de la société ; que le seul fait pour M. Z d'avoir accepté les fonctions de président du conseil de surveillance ruine sa prétention de n'avoir accompli qu'un portage, dans la mesure où l'accès à ces fonctions impose, à peine de nullité, la qualité d'associé ;

SUR CE, LA COUR
Sur la validité de la promesse d'achat
Considérant que l'acte du 14 septembre 1989, contenant promesse d'achat, entre le 1er février 1993 et le 15 février 1993, par Mrs Philippe PAPELIERPAPELIER, Jean Y et Jean X des 22.600 actions de 100 francs de nominal chacune de la société TEXTILINTER, détenues par M. Jacques Z, prévoit leur acquisition, pour tout ou partie, " moyennant un prix unitaire de 100 F. par action, majoré d'un intérêt calculé au taux annuel moyen du marché monétaire capitalisé annuellement, pendant la période commençant à la date de la présente promesse jusqu'au jour de la levée de l'option, et minoré des dividendes éventuellement perçus pendant la même période, le prix étant payable le jour de la levée d'option " ;
Que cet acte stipule en outre que " monsieur Jacques Z pourra faire jouer cet engagement par simple lettre recommandée adressée avant l'expiration du délai de l'option. Passé le 15 février 1993, sans que Monsieur Jacques Z ait manifesté son intention de vendre lesdites actions, la présente promesse d'achat sera caduque et les soussignés seront dégagés de toute obligation envers Monsieur Jacques Z" ;
Considérant que dans son principe une telle convention, fût-elle qualifiée de "portage" en raison de la concomitance entre sa signature et l'acquisition par M. Z des 22.600 actions, n'est pas illicite ;
Qu'il convient, toutefois, de déterminer si les conditions fixées pour la cession des actions n'ont pas pour effet d'affranchir le bénéficiaire de la promesse de toute participation aux pertes de la société ;
Que l'engagement d'acquérir les actions au prix d'achat initial, majoré d'un intérêt calculé au taux annuel moyen du marché, capitalisé annuellement, a manifestement pour effet d'affranchir M. Z non seulement de toute participation aux pertes de la société, mais également de le garantir contre toute évolution défavorable des actions entre la signature de la promesse et le paiement du prix ;
Considérant que l'appelant n'est pas fondé à prétendre, pour se prévaloir de la validité de la promesse contestée, que celle-ci procède d'un acte de cession d'actions qui échappe, de ce fait, à la prohibition des clauses léonines prévue à l'article 18441 du code civil ;
Qu'en effet, la prohibition ainsi instituée ne vise que la seule clause qui porte atteinte au pacte social dans les termes de cette disposition légale, sans qu'il y ait lieu de distinguer selon que l'engagement a fait l'objet d'une clause des statuts ou, comme en l'espèce, d'un acte distinct ;
Que le caractère léonin de l'engagement n'est pas déterminé en fonction de sa nature statutaire ou extra statutaire, mais en fonction de son objet ;
Considérant que M. Z soutient également que la convention du 14 septembre 1994, n'est que l'un des éléments d'une opération complexe incluant des accords complémentaires de nature à préserver les intérêts de Mrs. Y et X ;
Considérant qu'effectivement la licéité d'une promesse de cession peut être admise, dès lors qu'elle a été complétée par des promesses croisées de rachat et de vente des mêmes actions libellées en des termes identiques au profit de chacune des parties contractantes, dans la mesure où une telle opération confère un caractère aléatoire aux engagements réciproques souscrits qui n'ont plus pour conséquence d'instituer notamment, au profit d'un seul bénéficiaire, une garantie contre la dépréciation de la valeur des actions détenues ;
Mais considérant que les conventions invoquées par l'appelant,
* promesse de vente souscrite le 14 septembre 1989 par M. Z en faveur de la société SCODIS,
* promesse de vente d'actions TEXTILINTER à la société DODWELL INTERNATIONAL BUYING OFFICE LTD, ne permettent pas de caractériser un aléa suffisant de nature à préserver le principe d'égalité entre les associés ;
Considérant, en premier lieu, que l'existence même de la promesse de vente que M. Z prétend avoir souscrit au profit de la société SCODIS, n'est pas établie ;
Qu'en effet, la pièce produite sous le n° 15 du bordereau de communication, cachet "Soulier & Associés", intitulée " PROMESSE DE VENTE ", commençant par " le soussigné Jacques Z" et s'achevant par "Fait à Lyon, le 14 septembre 1989 " n'est pas signée ;
Considérant, en second lieu, que s'agissant de la promesse de vente à la société DODWELL INTERNATIONAL BUYING OFFICE LTD d'un bloc de contrôle de la société TEXTILINTER, il convient de souligner que les conditions de cession ne sont pas identiques à celles mentionnées dans l'acte du 14 septembre 1989 ;
Qu'il est, en effet, stipulé " dans le cas où les options, seraient exercées par DODWELL, la vente des actions interviendra sur la base de la valeur nette divisée par le nombre total d'actions composant la capital de la société n;
Considérant, en conséquence, que M. Z ne justifie pas de la réalité des engagements croisés invoqués ;
Considérant enfin que M. Z ne peut sérieusement soutenir ne s'être prêté qu'à une simple opération de portage, alors que, devenu actionnaire de la société INTERTEXTIL en 1989, il a aussitôt manifesté sa volonté de s'impliquer dans la vie de la société en acceptant la présidence du conseil de surveillance ;
Considérant qu'admettre la validité de la convention du 14 septembre 1989 aurait pour conséquence d'exonérer M. Z, alors que la société TEXTILINTER a été placée en redressement judiciaire le 8 décembre 19992, de toute contribution aux pertes;
Que cette convention porte donc manifestement atteinte au pacte social ;
Que c'est donc à juste titre que les premiers juges ont estimé qu'elle contrevenait aux dispositions de l'article 1844-1 du code civil et qu'il convenait de la réputer non écrite;
Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré ;
Sur les demandes de dommages et intérêts respectives
Considérant que les premiers juges ont fait une juste appréciation en déboutant les parties de leurs demandes respectives en dommages et intérêts par une motivation pertinente à laquelle il est fait expressément référence ;
3ème chambre, section A ARRÊT DU 22 OCTOBRE 1996
7ème page Po)
Qu'il convient, en conséquence, de confirmer le jugement déféré ;
Sur l'article 700 du NCPC
Considérant qu'il n'apparaît pas inéquitable, compte tenu des circonstances de la cause, de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés ;
Sur les dépens
Considérant que M. Z, qui succombe dans ses prétentions, sera condamné aux dépens ;

PAR CES MOTIFS
CONFIRME le jugement déféré ;
DÉBOUTE les parties de toutes leurs demandes plus amples ou contraires à la présente motivation ;
CONDAMNE M. Jacques Z aux dépens d'appel;
ADMET Me ..., avoué, au bénéfice de l'article 699 du NCPC.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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