CIV. 3
FC
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 10 octobre 2024
Cassation
Mme TEILLER, président
Arrêt n° 537 F-D
Pourvoi n° S 23-11.308
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 OCTOBRE 2024
Le syndicat des copropriétaires de la résidence La Commanderie à [Localité 3], représenté par son administrateur provisoire, la société Ajassociés, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 23-11.308 contre le jugement rendu le 7 janvier 2022 par le tribunal judiciaire de Senlis, dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [Aa] [C] épousAb [P],
2°/ à M. [Ac] [P],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Schmitt, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence La Commanderie à [Localité 3], après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Schmitt, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Letourneur, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon jugement attaqué (tribunal judiciaire de Senlis, 7 janvier 2022), rendu en dernier ressort, M. et Mme [Ab] sont propriétaires de lots dans un immeuble soumis au statut de la copropriété.
2. Le syndicat des copropriétaires de cet immeuble (le syndicat des copropriétaires), représenté par la société Ajassociés, agissant en sa qualité d'administrateur provisoire désigné par le président d'un tribunal de grande instance, a obtenu à leur encontre une ordonnance portant injonction de payer un arriéré de charges de copropriété, à laquelle ils ont fait opposition.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa seconde branche
Enoncé du moyen
3. Le syndicat des copropriétaires fait grief au jugement de rejeter sa demande en paiement de charges, alors « que les copropriétaires ne peuvent remettre en cause des décisions prises par l'administrateur provisoire exerçant les pouvoirs normalement dévolus à l'assemblée générale qui lui ont été confiés par le président du tribunal ; qu'en retenant, pour débouter le syndicat de copropriétaires de sa demande en paiement d'arriérés de charges dus par les époux [P], que « si le syndicat des copropriétaires fait l'objet d'une administration provisoire par la Selarl Ajassociés, il n'expose pas en quoi il est dispensé de la tenue des assemblées générales » et qu' « il ne produit aucun procès-verbal d'assemblée générale si bien qu'il est impossible de déterminer si les appels de fonds correspondent aux dispositions adoptées en assemblée générale », sans rechercher si les pouvoirs dévolus normalement à l'assemblée générale en matière d'appel de charges avaient été confiés à l'administrateur provisoire dont les décisions ne pouvaient plus être remises en cause par les copropriétaires, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'
article 29-1 de la loi du n° 65-557 du 10 juillet 1965🏛. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 29-1 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, dans sa rédaction issue de la
loi n° 2014-366 du 24 mars 2014🏛 et antérieure à celle issue de l'
ordonnance n° 2019-738 du 17 juillet 2019🏛 :
4. Selon ce texte, le juge charge l'administrateur provisoire de prendre les mesures nécessaires au rétablissement du fonctionnement normal de la copropriété. A cette fin, il lui confie tous les pouvoirs du syndic dont le mandat cesse de plein droit sans indemnité et tout ou partie des pouvoirs de l'assemblée générale des copropriétaires, à l'exception de ceux prévus aux a et b de l'article 26, et du conseil syndical. Le conseil syndical et l'assemblée générale, convoqués et présidés par l'administrateur provisoire, continuent à exercer ceux des autres pouvoirs qui ne seraient pas compris dans la mission de l'administrateur provisoire.
5. Pour rejeter la demande en paiement de charges, le jugement retient que la créance du syndicat des copropriétaires relative à chaque quote-part de charges devient certaine, liquide et exigible par l'approbation des comptes par l'assemblée générale et que, si le syndicat des copropriétaires fait l'objet d'une administration provisoire, il n'expose pas en quoi il est dispensé de la tenue des assemblées générales.
6. En se déterminant ainsi, sans rechercher si l'administrateur avait été investi du pouvoir de l'assemblée générale d'approuver les comptes et budgets du syndicat des copropriétaires, de sorte que ces décisions n'avaient pas à être soumises à l'assemblée générale des copropriétaires, le tribunal judiciaire n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 7 janvier 2022, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Senlis ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Compiègne ;
Condamne M. et Mme [Ab] aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, condamne M. et Mme [P] à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence La Commanderie à [Localité 3] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille vingt-quatre.