Jurisprudence : Cass. soc., 18-09-2024, n° 23-13.069, F-B, Cassation

Cass. soc., 18-09-2024, n° 23-13.069, F-B, Cassation

A97205ZZ

Référence

Cass. soc., 18-09-2024, n° 23-13.069, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/111590468-cass-soc-18092024-n-2313069-fb-cassation
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Abstract

► Lorsque l'employeur et le salarié sont d'accord pour admettre que le contrat de travail a été rompu, chacune des parties imputant à l'autre la responsabilité de cette rupture, il incombe au juge de dire à qui cette rupture est imputable et d'en tirer les conséquences juridiques.


SOC.

CZ


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 18 septembre 2024


Cassation


Mme CAPITAINE, conseiller doyen
faisant fonction de président


Arrêt n° 886 F-B

Pourvoi n° F 23-13.069


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 18 SEPTEMBRE 2024


M. [O] [X], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 23-13.069 contre l'arrêt rendu le 22 novembre 2022 par la cour d'appel de Chambéry (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Jeanfred, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La société Jeanfred a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Valéry, conseiller référendaire, les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [X], de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de la société Jeanfred, après débats en l'audience publique du 2 juillet 2024 où étaient présentes Mme Capitaine, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Valéry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Salomon, conseiller, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 22 novembre 2022), M. [X] a été engagé par la société Jeanfred le 2 octobre 2012, en qualité de chef de cuisine.

2. Par courrier recommandé du 22 juillet 2019, la société a demandé au salarié de justifier de son absence à compter du 20 juillet 2019 et de réintégrer son poste.

3. Le salarié, soutenant avoir fait l'objet d'un licenciement verbal, a saisi la juridiction prud'homale le 26 août 2019.


Examen des moyens

Sur le moyen du pourvoi principal pris en sa première branche et sur le moyen du pourvoi incident, réunis

Enoncé des moyens

4. Par son moyen, pris en sa première branche, le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes d'indemnité compensatrice de congés payés, d'indemnité compensatrice de préavis, ainsi que les congés payés incidents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que lorsque l'employeur et le salarié sont d'accord pour admettre que le contrat de travail a été rompu, chacune des parties imputant à l'autre la responsabilité de la rupture, il incombe au juge de trancher ce litige en décidant quelle est la partie qui l'a rompu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la société Jeanfred soutenait à titre principal que le salarié avait démissionné et à titre subsidiaire qu'il avait pris acte de la rupture, imputant la responsabilité de celle-ci au salarié, tandis qu'elle relevait que ce dernier estimait avoir fait l'objet d'un licenciement verbal ; que les parties, invités à fournir leurs observations en délibéré sur l'existence de la rupture, ont maintenu leur position ; qu'en déboutant le salarié de ses demandes aux motifs qu'il ne résultait pas des pièces versées aux débats que le contrat de travail aurait été rompu, quand l'employeur et le salarié étaient d'accord pour admettre que le contrat de travail avait été rompu, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile🏛. »

5. Par son moyen, l'employeur fait grief à l'arrêt de le débouter de l'ensemble de ses demandes, alors « que lorsque l'employeur et le salarié sont d'accord pour admettre que le contrat de travail a été rompu, chacune des parties imputant à l'autre la responsabilité de la rupture, il incombe au juge de trancher ce litige en décidant quelle est la partie qui l'a rompu ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la société Jeanfred soutenait à titre principal que le salarié avait démissionné et à titre subsidiaire qu'il avait pris acte de la rupture, imputant la responsabilité de celle-ci au salarié, tandis qu'elle relevait que ce dernier estimait avoir fait l'objet d'un licenciement verbal ; que les parties, invitées à fournir leurs observations en délibéré sur l'existence de la rupture, ont maintenu leur position ; qu'en déboutant l'employeur le salarié de leurs demandes respectives quand il lui appartenait de décider quelle était la partie qui a rompu, la cour d'appel violé l'article 12 du code de procédure civile. »


Réponse de la Cour

Vu l'article 12 du code de procédure civile :

6. Selon ce texte, le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables. Il doit donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposée.

7. Pour débouter le salarié et l'employeur de l'ensemble de leurs demandes, l'arrêt retient qu'il ne résulte des pièces produites aux débats ni que le salarié ait manifesté une intention claire et non équivoque de démissionner, ni que l'employeur ait entendu rompre le contrat de travail du salarié ou même ait considéré que le contrat de travail était rompu du fait du salarié.

8. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'employeur et le salarié étaient d'accord pour admettre que le contrat de travail avait été rompu, chacune des parties imputant à l'autre la responsabilité de cette rupture, et qu'il lui incombait donc de dire à qui cette rupture était imputable et d'en tirer les conséquences juridiques, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 22 novembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes.

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille vingt-quatre.

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