Jurisprudence : Cass. crim., 13-11-2002, n° 01-88.643, F-P+F, Rejet

Cass. crim., 13-11-2002, n° 01-88.643, F-P+F, Rejet

A1301A4X

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Cass. crim., 13-11-2002, n° 01-88.643, F-P+F, Rejet. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/1114546-cass-crim-13112002-n-0188643-fp-f-rejet
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N° X 01-88.643 F P+FN° 6672
VD1 3 NOVEMBRE 2002
M. COTTE président,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le treize novembre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire ..., les observations de Me DELVOLVÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général ... ;

Statuant sur les pourvois formés par
- ... Alain,
- ... Michel,
contre l'arrêt de la cour d'appel de LYON, 4ème chambre, en date du 8 novembre 2001, qui, pour homicide involontaire, les a condamnés, chacun, à 5 mois d'emprisonnement avec sursis, et a prononcé sur les intérêts civils ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I - Sur le pourvoi de Michel ...
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II - Sur le pourvoi d'Alain ...
Vu le mémoire produit, Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 121-3, 221-6, 221-8 et 221-10 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt a retenu Alain ... dans les liens de la prévention du chef d'homicide involontaire, l'a condamné à une peine de cinq mois d'emprisonnement avec sursis et l'a déclaré entièrement responsable de l'accident avec Michel ... ;
"aux motifs que la cause directe de l'accident ayant causé la mort du jeune Vivien ... était constituée par le renversement de la grume sur laquelle il jouait et qui l'a écrasé ; que si Michel ... et Alain ... n'avaient pas causé directement le dommage, le premier avait créé la situation ayant permis la réalisation de ce dommage et le second n'avait pas pris les mesures permettant de l'éviter ; qu'il convenait, dès lors, de rechercher s'ils avaient commis les fautes qualifiées définies par l'article 123-1 du Code pénal ; qu'Alain ..., agent technique forestier ayant conclu le contrat avec Michel ..., était en vertu de l'article 4 du cahier des clauses générales "responsable de la surveillance de la coupe" ; que chargé des opérations de cubage dans le secteur, il avait constaté le lundi 8 avril 1996 vers midi que la grume n° 238 était dangereuse ; qu'il avait d'ailleurs demandé à son amie qui l'accompagnait de ne pas rester en aval du bois ; qu'il ne pouvait sérieusement prétendre que tant les enquêteurs que le juge d'instruction l'auraient contraint à déclarer qu'il avait constaté que la grume ayant causé l'accident avait présenté un danger ; que tout profane, et a fortiori un professionnel était aisément en mesure de faire une telle constatation des plus élémentaires ; que cependant Alain ... n'avait pris aucune disposition alors qu'il savait que les lots d'affouage venaient d'être distribués et que certains bénéficiaires étaient de ce fait susceptibles de venir prendre du bois un jour férié ; qu'Alain ... ne pouvait soutenir qu'il ne disposait d'aucun matériel pour signaler le danger ; qu'il aurait pu se rendre à son service pour confectionner une pancarte ou un panneau et le mettre en place ; qu'il était surprenant que ce professionnel n'eût jamais songé à se munir de cartons et de marqueurs de couleurs pour être en mesure de signaler sur le champ un danger quelconque ; que sa fatale inertie pendant plus de cinq heures constituait de la part de cet agent technique forestier une faute caractérisée dont il n'ignorait pas qu'elle exposait autrui à un risque d'une particulière gravité, les recommandations adressées d'entrée à son amie étant révélatrice de la conscience du danger qui était la sienne ; qu'en l'absence de toute circonstance particulière, telle que des travaux dans la forêt, la présence d'une signalisation de danger, des conditions climatiques défavorables, il ne pouvait être soutenu que les parents auraient commis une quelconque faute de surveillance de leurs enfants ; que dans des conditions normales, les lieux ne présentaient aucun danger, l'accident n'étant pas survenu au fond des bois, mais au bout d'un petit chemin peu fréquenté sur lequel des parents pouvaient légitimement laisser jouer des enfants, un jour férié, sans être tenus à une surveillance de tous les instants, alors qu'ils s'étaient trouvés de surcroît à quelques dizaines de mètres ;
"alors, d'une part, que les personnes physiques qui n'ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé ou contribué à créer la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n'ont pas pris les mesures pour l'éviter, sont responsables pénalement s'il est établi qu'elles ont commis une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d'une particulière gravité qu'elles ne pouvaient ignorer ; que pour retenir l'existence d'une telle faute à la charge d'Alain ..., la cour d'appel s'est contredite en énonçant d'une part que tout profane, et a fortiori un professionnel, était aisément en mesure de constater que la grume présentait un danger et juger d'autre part que les lieux ne présentaient aucun danger ;
"alors, d'autre part, que l'évidence du danger dispensait le prévenu de le signaler autrement, tout profane, et en particulier les parents, étant ainsi en mesure de connaître son existence et de veiller à ce que des enfants ne jouent pas sur les grumes ;
"alors enfin, qu'en présence du danger présenté par une grume en équilibre instable, une obligation particulière de vigilance et de surveillance pesait sur les parents qui devaient empêcher leurs enfants de jouer sur celle-ci ; qu'ayant expressément relevé que tout profane était aisément en mesure de constater de la manière la plus élémentaire l'existence d'un tel danger, la cour d'appel aurait dû en déduire que les parents de la victime avaient failli à une telle obligation et que cette défaillance était à l'origine de l'accident ; qu'en excluant cependant la faute de surveillance des parents de la victime, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations" ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les époux ..., titulaires d'un droit d'affouage, se sont rendus dans une forêt communale le 8 avril 1996, après-midi, avec six enfants dont leur fils Vivien, âgé de huit ans ; qu'alors que les adultes vaquaient à leur occupations, quatre enfants sont allés jouer, quelques dizaines de mètres plus loin, sur un tronc d'arbre long de 12,60 mètres, prenant appui en oblique sur deux autres grumes posées au sol parallèlement ; que le tronc, en basculant et en roulant en contrebas sur environ cinq mètres, a écrasé Vivien ..., qui est décédé dans la soirée ; qu'Alain ..., agent technique de l'Office national des forêts chargé par la commune de l'exploitation forestière, et Michel ..., artisan auquel l'Office avait confié des travaux de bûcheronnage et de débardage, ont été poursuivis pour homicide involontaire, le second pour avoir mal agencé les trois grumes, le premier pour n'avoir pris aucune précaution, ni averti quiconque du danger en résultant ;
Attendu que, pour déclarer Alain ... coupable des faits reprochés, les juges retiennent qu'il était responsable de la surveillance de la coupe ; que, chargé des opérations de cubage, il avait constaté le 8 avril, vers midi, le danger que représentait la grume en équilibre instable et recommandé à la personne qui l'accompagnait de ne pas rester en aval du tronc ; que, malgré ce constat, et bien que sachant que les lots d'affouage venaient d'être distribués et que certains bénéficiaires profiteraient du 8 avril, jour férié, pour ramasser du bois, il n'avait pris aucune disposition ; que les juges en déduisent que l'inertie du prévenu constitue, de la part d'un agent technique forestier, une faute caractérisée dont il n'ignorait pas qu'elle exposait autrui à un risque d'une particulière gravité ;
Que, pour déclarer Alain ... entièrement responsable, avec Michel ..., des conséquences dommageables de l'accident, l'arrêt relève que les parents de la victime ignoraient l'existence du tas de grumes ; que, se trouvant au bord d'un chemin qui, dans des conditions normales, ne présentait aucun danger, ils pouvaient légitimement, en l'absence de toute circonstance particulière, tels que des travaux ou une signalisation de danger, laisser jouer les enfants sans être tenus à une surveillance de tous les instants ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine, la cour d'appel a, sans se contredire, justifié sa décision au regard des articles 121-3, alinéa 4, et 221-6 du Code pénal ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré M. ... président, Mme ... conseiller rapporteur, MM. Roman, Blondet, Palisse, Le Corroller, Béraudo conseillers de la chambre, Mmes Agostini, Gailly, Salmeron conseillers référendaires ;
Avocat général M. Davenas ;
Greffier de chambre Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;

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