Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 20 juin 2000
Cassation
N° de pourvoi 96-18.942
Inédit
Président M. DUMAS
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1 / M. Max Z, demeurant Bonneville,
2 / M. Frédéric Z, demeurant Vimines,
en cassation d'un arrêt rendu le 7 juin 1996 par la cour d'appel de Paris (14e chambre, section B), au profit de la société Fiat Crédit France, société anonyme, dont le siège est Levallois-Perret,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 10 mai 2000, où étaient présents M. Dumas, président, M. Tricot, conseiller rapporteur, M. Badi, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Tricot, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de MM. ... et Z Z, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la société Fiat Crédit France, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 juin 1996), rendu en matière de référé, qu'après la mise en redressement judiciaire de la société Max Dubois, la société Fiat Crédit France a demandé que MM. Z, qui s'étaient portés cautions, à son égard, des engagements de la société débitrice, soient condamnés à lui payer une certaine somme ; que la cour d'appel a confirmé l'ordonnance qui a accueilli la demande ;
Sur le premier moyen, pris en ses première, troisième et quatrième branches
Attendu que MM. Z reprochent à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le pourvoi, 1 ) que la déclaration de créance au passif du redressement judiciaire du débiteur équivaut à une demande en justice ; que, dans le cas où le créancier ne l'effectue pas lui-même, elle ne peut être faite, pour son compte, par un tiers, qu'à la condition qu'il l'ait investi du mandat de le représenter en justice ; qu'en se bornant, pour retenir que la déclaration de créance avait été régulièrement effectuée, dans le cadre de son mandat, par la société Sofinco, au nom et comme représentant de la société Fiat Crédit France, à relever que les sociétés Fiat Crédit France et Sofinco étaient unies par un contrat de société en participation et disposaient d'un service contentieux unique géré par la seconde, la cour d'appel, qui n'a pas constaté que la société déclarante s'était vu confier par la société créancière le mandat de la représenter en justice, a privé sa décision de base légale au regard des articles 416, 853, 873, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, 2036, alinéa 1er, du Code civil, et 53, alinéa 4, de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, 2 ) qu'en se prononçant de la sorte, sans préciser si le mandat de déclarer sa créance que la société Fiat Crédit France prétendait avoir confié à la société Sofinco avait donné lieu, de sa part, à l'établissement d'un pouvoir spécial ayant date certaine, la cour d'appel a encore privé sa décision de base légale au regard des mêmes textes ; et alors, 3 ) qu'en énonçant que les sociétés Fiat Crédit France et Sofinco étaient unies par un contrat de société en participation et disposaient d'un service contentieux unique géré par la seconde, sans répondre aux conclusions qui lui étaient soumises, dans lesquelles il était soutenu que les documents produits aux débats pour établir l'existence de la société en participation -acte de constitution du 31 décembre 1987 et attestation du "président-directeur général" de la société Fiat Crédit France du 2 décembre 1992- et, en conséquence, la réalité du mandat allégué, ne permettaient pas de considérer que la société Sofinco ait eu le pouvoir de procéder à la déclaration de créance litigieuse le 14 janvier 1994, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'en présence des statuts, régulièrement communiqués aux débats, de la société en participation convenue, le 31 décembre 1987, entre la société Fiat Crédit France et la société Sofinco, à partir du 1er janvier 1988, pour une durée de douze mois renouvelable par tacite reconduction, par lesquels la société Fiat Crédit France a apporté la jouissance de son fonds de commerce de financement de vente à crédit et de l'ensemble des moyens attachés ou nécessaires à l'exploitation et à la gestion de ce fonds, tandis que la société Sofinco a apporté son savoir-faire, son industrie et la jouissance de l'ensemble de ses moyens matériels et techniques afin d'assurer l'encaissement ainsi que le recouvrement amiable et contentieux des créances de la société Fiat Crédit France, la cour d'appel a exactement retenu qu'en application de cette convention, dont il n'a pas été établi qu'elle n'était plus en application le 14 janvier 1994, jour de la déclaration de la créance litigieuse, la société Fiat Crédit France avait alors régulièrement donné, par écrit, à la société Sofinco, le pouvoir spécial de déclarer la créance, aucun texte n'exigeant que ce mandat ait date certaine ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Mais sur la deuxième branche du moyen
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour statuer comme il a fait, l'arrêt retient que la société Sofinco a effectué de façon régulière la déclaration au nom et comme représentant de la société Fiat Crédit France, dans le cadre de son mandat, et que cette déclaration est certifiée par le liquidateur judiciaire de la société Max Dubois ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans répondre aux conclusions de MM. Z qui soutenaient que la copie des statuts de la société en participation donnant pouvoir au mandataire ad litem n'avait pas accompagné la déclaration de créance et n'avait pas été produite dans le délai de celle-ci, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juin 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Fiat Crédit France aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Fiat Crédit France ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt juin deux mille.