COUR D'APPEL DE PARIS
15è chambre, section B
ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2002
(N° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général 2000/09804
Pas de jonction
Décision dont appel Jugement rendu le 26/04/2000 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de PARIS 9/1è Ch. RG n° 1999/04911 Date ordonnance de clôture 23 Mai 2002
Nature de la décision CONTRADICTOIRE
Décision CONFIRMATION
APPELANTE
S.A. FORTIS BANQUE FRANCE anciennement dénommée BANQUE
PARISIENNE DE CRÉDIT
prise en la personne de ses représentants légaux
ayant son siège PARIS
représentée par la SCP GOIRAND, avoué
assistée de Maître C.. ..., Toque R 110, Avocat au Barreau de PARIS
INTIMÉ
Monsieur X FrançoisX
demeurant 7 bis rue des Mécardes 92 - MEUDON
représenté par la SCP NARRAT-PEYTAVI, avoué
assisté de Maître J. W W W, Toque E 664, Avocat au Barreau
de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR
lors des débats et du délibéré,
Président Monsieur POTOCKI
Conseiller Madame GRAEVE
Conseiller Madame DAVID
DÉBATS
à l'audience publique du 21 juin 2002
GREFFIER
Lors des débats et du prononcé de l'arrêt
Monsieur ... agent du secrétariat-greffe ayant prêté le serment de
Greffier
ARRÊT -
Contradictoire, prononcé publiquement par Monsieur POTOCKI, Président,
lequel a signé la minute du présent arrêt avec Monsieur G. DUPONT, Greffier.
Monsieur X était titulaire d'un compte auprès de la BANQUE PARISIENNE DE CRÉDIT, aux droits de laquelle se trouve la FORTIS BANQUE FRANCE. Monsieur X louait un appartement à la société SORBEN. Celle-ci faisait donc virer chaque mois la somme de 6.662,50 francs de son compte à la banque MONTE-PASCHI sur celui de Monsieur X. La société SORBEN a donné congé pour le 31 juillet 1994 mais, après des hésitations sur sa volonté de mettre ou non fin au bail, a quitté les lieux le 7 septembre 1994. Le 2 septembre 1994, un virement de 6.662,50 francs est encore intervenu. Le 7 septembre 1994, la banque MONTE-PASCHI a demandé à la FORTIS BANQUE FRANCE de lui retourner cette somme, transmise à tort selon elle. Informé par sa banque, Monsieur X à fait part à celle-ci, par une lettre du 9 septembre 1998, de son "interdiction absolue de procéder à toutes opérations". Malgré cela, la FORTIS BANQUE FRANCE a débité le compte de son client du montant du virement, cette opération figurant sur le relevé qu'elle lui a adressé avec la mention "virement perçu deux fois à tort".
Le 3 janvier 1995, Monsieur X a exigé de la FORTIS BANQUE FRANCE que son compte soit crédité du montant du virement en cause. N'obtenant pas satisfaction, le 23 janvier 1995, il a fait connaître sa décision de clôturer immédiatement son compte. La FORTIS BANQUE FRANCE n'a exécuté cette instruction que le 7 mars 1997. Le compte présentait alors un solde débiteur de 6.022,80 francs. Le 5 décembre 1997, "face à la non régularisation de ce solde débiteur", la FORTIS BANQUE FRANCE a fait une déclaration à la BANQUE DE FRANCE entraînant l'inscription de Monsieur X sur le fichier institué par l'article L.3334 du code de la consommation.
Monsieur X a alors saisi le tribunal de grande instance de Paris qui, par jugement du 26 avril 2000, a
- dit que la BANQUE PARISIENNE DE CRÉDIT n'était pas fondée en l'espèce à débiter le compte de Monsieur X d'une somme de 6.662,50 francs en dépit des instructions formelles contraires du client,
- dit que la BANQUE PARISIENNE DE CRÉDIT n'était pas fondée par voie de conséquence à débiter des agios, refuser la clôture du compte pendant deux ans et procéder à inscription du client au FICP,
- dit que la BANQUE PARISIENNE DE CRÉDIT a engagé sa responsabilité envers Monsieur X et la condamne à lui payer en réparation la somme de 60.000 francs à titre de dommages-intérêts,
- ordonné à la BANQUE PARISIENNE DE CRÉDIT d'annuler la déclaration d'incident au FICP auprès de la BANQUE DE FRANCE et d'en justifier auprès de Monsieur X, ce sous astreinte provisoire de 1.500 francs par jour de retard passé un délai de quinzaine à compter du prononcé du jugement,
- débouté Monsieur X de sa demande de publication,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement,
- condamné la BANQUE PARISIENNE DE CRÉDIT à payer à Monsieur X la somme de 15.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Par déclaration du 18 mai 2000, la FORTIS BANQUE FRANCE a fait appel de cette décision.
Les dernières écritures des parties, prises en compte par la Cour au titre de l'article 954 du nouveau code de procédure civile, ont été déposées
- le 5 avril 2002 pour la FORTIS BANQUE FRANCE,
- le 16 janvier 2001 pour Monsieur X.
La FORTIS BANQUE FRANCE demande à la Cour de
- infirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions et de débouter Monsieur X de l'ensemble de ses demandes,
- condamner Monsieur X à rembourser à la FORTIS BANQUE les sommes que celle-ci lui a versées en exécution du jugement dont appel, assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de ce versement, en tant que de besoin à titre de dommages-intérêts,
- condamner Monsieur X à payer à la FORTIS BANQUE DE CRÉDIT une somme de 20.000 francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
Monsieur X demande à la Cour de
- confirmer le jugement entrepris,
- condamner la FORTIS BANQUE au paiement de la somme de 30.000 francs par application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
CELA ÉTANT EXPOSÉ,
LA COUR,
Considérant que la FORTIS BANQUE FRANCE a débité le compte de Monsieur X d'une somme dont elle l'avait crédité huit jours auparavant ; qu'elle a procédé à cette opération malgré les instructions contraires que son client lui avait adressées de façon écrite, formelle et motivée ; que, sur le relevé de compte de Monsieur X, elle a justifié ce débit par la mention "virement perçu deux x" qui était erronée ; qu'en agissant ainsi, la FORTIS BANQUE FRANCE a commis une faute au détriment de Monsieur X ;
Considérant que la FORTIS BANQUE FRANCE a refusé de reconnaître cette faute, malgré de nombreux courriers explicatifs ; qu'elle n'a pas plus modifié son attitude lorsque Monsieur X lui a fourni la preuve que la banque MONTE-PASCHI, d'où provenait le virement litigieux, en a reconnu le bien fondé ;
Considérant que la FORTIS BANQUE FRANCE ne pouvait valablement opposer à Monsieur X la circulaire de l'association française des banques ; qu'en effet, d'une part, ce texte n'avait à l'encontre de Monsieur X aucune force, ni contractuelle, ni réglementaire ; que, d'autre part, l'"erreur administrative", visée par cette circulaire et dont se prévalait la FORTIS BANQUE FRANCE, n'était pas établie en l'espèce, Monsieur X ayant expliqué de façon détaillée à la banque que ce virement était justifié par la volonté de son locataire de rester dans les lieux ;
Considérant que Monsieur X a clôturé son compte par lettre du 23 janvier 1995 ; que ce n'est que le 7 mars 1997, soit plus de deux ans après, que la FORTIS BANQUE FRANCE lui a répondu "Nous venons d'enregistrer la clôture de votre compte (...)" ; qu'à cette date, le compte de Monsieur X présentait un solde débiteur de 6.022,80 francs, soit inférieur au débit litigieux opéré par la FORTIS BANQUE FRANCE ;
Considérant que, le 5 décembre 1997, la FORTIS BANQUE FRANCE a fait une déclaration d'incident de paiement à la banque de France, afin que Monsieur X soit inscrit sur le fichier institué par l'article L.333-4 du code de la consommation, au titre d'un découvert au cours du mois de novembre 1997 ;
Mais considérant qu'à cette date, le compte de Monsieur X était clôturé et que le défaut de paiement que pouvait invoquer la FORTIS BANQUE FRANCE tenait au différent qui l'opposait à Monsieur X ; que ce litige ne constituait nullement un "incident de paiement caractérisé lié au crédits accordés aux personnes physiques" ; que cette déclaration était donc abusive et que c'est à bon droit que le tribunal en a ordonné l'annulation ;
Considérant que Monsieur X rapporte la preuve que cette inscription fautive a entraîné le refus d'un crédit immobilier qu'il avait sollicité ; que, au surplus, les fautes relevées ci-dessus à l'encontre de la FORTIS BANQUE FRANCE lui ont causé un préjudice matériel et moral ; que l'indemnisation de l'ensemble des dommages causés à Monsieur X par les fautes de la FORTIS BANQUE FRANCE a été justement évaluée par les premiers juges à la somme de 60.000 francs ;
Considérant que l'ensemble des circonstances rapportées ci-dessus établissent que, dans le différend qui l'opposait à Monsieur X, la FORTIS BANQUE FRANCE a manifesté une attitude caractérisée par une obstination opiniâtre dans l'erreur ; que malgré le jugement qui lui a donné tort, elle a persisté en faisant appel ; que cet appel est abusif et commande qu'elle soit condamnée à une amende civile de 1.500 euros ;
Considérant qu'il y a lieu de condamner la FORTIS BANQUE FRANCE à payer à Monsieur X la somme de 4.573,47 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, pour la procédure d'appel;
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions,
Condamne la FORTIS BANQUE FRANCE à une amende civile de 1.500 euros,
Condamne la FORTIS BANQUE FRANCE à payer à Monsieur X la somme de 4.573,47 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, pour la procédure d'appel,
Condamne la FORTIS BANQUE FRANCE aux dépens d'appel, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
Cour d'Appel de Paris
15è chambre, section B
ARRÊT DU 20 SEPTEMBRE 2002
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