SOC. MF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 31 octobre 2013
Rejet
M. BAILLY, conseiller doyen faisant fonction de président
Arrêt no 1808 F-D
Pourvoi no A 12-19.092
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par M. Hervé Z, domicilié Magné,
contre l'arrêt rendu le 14 mars 2012 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Le chat botté, société anonyme, dont le siège est Saint-Clément-des-Baleines,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 octobre 2013, où étaient présents M. Bailly, conseiller doyen faisant fonction de président,
M. Chauvet, conseiller rapporteur, Mme Deurbergue, conseiller, M. Lalande, avocat général, Mme Becker, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Chauvet, conseiller, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de M. Z, de la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat de la société Le chat botté, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 14 mars 2012), que M. Z a été engagé en 1998 par la société Le chat botté et qu'il occupait les fonctions de chef maître d'hôtel lors de son licenciement pour faute grave le 30 août 2008 ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de dire que le licenciement pour faute grave est fondé, alors, selon le moyen
1o/ que la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que la cour d'appel a retenu que " la perte de l'autorité et de la considération par les membres de l'équipe nécessaire à la fonction de maître d'hôtel générée par le comportement dépourvu de maîtrise de soi de M. Z ne permettait pas d'envisager son maintien à son poste, ce qui légitime le choix du licenciement pour faute grave " pour décider que la faute grave était établie qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est prononcée sur des motifs qui ne figuraient pas dans la lettre de licenciement et a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2o/ que la perte d'autorité et de considération d'un chef de rang envers les autres salariés d'un restaurant n'est pas constitutive d'une faute grave ; qu'en relevant que " la perte de l'autorité et de la considération par les membres de l'équipe nécessaire à la fonction de maître d'hôtel générée par le comportement dépourvu de maîtrise de soi de M. Z ne permettait pas d'envisager son maintien à son poste, ce qui légitime le choix du licenciement pour faute grave ", la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 et L. 1231-1 du code du travail ;
3o/ qu'en retenant l'existence d'une faute grave à l'encontre de M. Z, tout en relevant l'ancienneté de ce dernier, présent dans l'entreprise depuis 10 ans et sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il n'avait jamais fait l'objet d'une quelconque sanction disciplinaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, sans sortir des limites du litige fixées par la lettre de licenciement, la cour d'appel, qui a constaté que dans le contexte de l'altercation qu'il avait eu avec un autre salarié, la perte par M. Z de son autorité et de sa considération vis à vis des membres de l'équipe, nécessaires à sa fonction de maître d'hôtel, résultait de son défaut de maîtrise, a pu décider que ces faits rendaient impossible son maintien dans l'entreprise et constituaient une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un octobre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour M. Z.
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que le licenciement de M. Hervé Z pour faute grave était fondé et l'avoir débouté de l'ensemble de ses demandes de condamnation de la société Le Chat Botté à lui verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts, indemnité de licenciement et rappels de salaire pour mise à pied ;
AUX MOTIFS QU' qu'il appartient à l'employeur d'apporter la preuve de la faute grave imputée au salarié qui ne doit pas permettre le maintien du salarié dans l'entreprise ; que cette preuve est en l'espèce rapportée en ce qui concerne l'incident du 30 août 2008 à l'heure du service de midi ; qu'en effet, il résulte des témoignages précis de deux personnes présentes sur les lieux, salariés du restaurant mais qui ne sont ni le serveur impliqué, M. ..., ni sa compagne Isabelle, serveuse de l'établissement, M. ..., apprenti pâtissier, et Mme ..., cuisinière, que si effectivement, M. ... a sans raison refusé d'apporter un plat en salle, ce qui relevait de ses fonctions et des ordres que M. Z était habilité à lui donner, celui-ci a une réaction incompatible avec son niveau de responsabilité au sein de cet établissement de bonne renommée en traitant de façon récurrente le serveur de voleur au lieu de réitérer ses instructions ou d'en référer au pdg M. ..., également chef cuisinier, présent sur les lieux ; que si le serveur a eu une réaction violente en s'emparant d'une bouteille puis d'un couteau, M. Z a continué à le traiter de voleur et a persisté après que la compagne de M. Z fut arrivée dans la cuisine, amenée de force du bar par M. Z selon un des témoins ; que Mme ... indique que l'intervention d'un homme du bar, outre celle de M. ... a été nécessaire pour séparer M. Z et M. ..., ce qui implique que quelles qu'aient été les violences du serveur, auxquelles la provocation de M. Z n'est pas étrangère, celui-ci y a participé ; de plus, en admettant même que M. ... se fût livré à des larcins, ce qui n'est en rien établi, il ne relevait pas de la fonction de M. Z de veiller sur la caisse de l'établissement et il lui appartenait d'en référer au pdg s'il avait constaté des prélèvement anormaux ; qu'il est par ailleurs établi que M. ... a quitté l'établissement le 31 août 2008 et a remis à l'employeur une lettre de démission datée du 1er septembre 2008, ce qui entraînait la rupture de son contrat de travail à durée déterminée qui devait se terminer normalement le 16 novembre 2008, de sorte que M. Z ne peut se prévaloir d'une inégalité de traitement entre lui et le serveur fautif ; dans ce contexte, la perte de l'autorité et de la considération par les membres de l'équipe nécessaire à la fonction de maître d'hôtel générée par le comportement dépourvu de maîtrise de soi de M. Z ne permettaient pas d'envisager son maintien à son poste, ce qui légitime le choix du licenciement pour faute grave, sans qu'il y ait lieu d'examiner les allusions à des faits de 2002, dont il n'est pas prouvé qu'ils aient donné lieu à une procédure disciplinaire, alors qu'en revanche des attestations montrent une dégradation du comportement et de la tenue de M. Z au cours de l'année 2008 ; que le jugement sera en conséquence réformé et M. Z sera débouté de l'intégralité de ses demandes ;
1o) ALORS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; que la cour d'appel a retenu que " la perte de l'autorité et de la considération par les membres de l'équipe nécessaire à la fonction de maître d'hôtel générée par le comportement dépourvu de maîtrise de soi de M. Z ne permettait pas d'envisager son maintien à son poste, ce qui légitime le choix du licenciement pour faute grave " pour décider que la faute grave était établie ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel s'est prononcée sur des motifs qui ne figuraient pas dans la lettre de licenciement et a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;
2o) ALORS QUE la perte d'autorité et de considération d'un chef de rang envers les autres salariés d'un restaurant n'est pas constitutive d'une faute grave ; qu'en relevant que " la perte de l'autorité et de la considération par les membres de l'équipe nécessaire à la fonction de maître d'hôtel générée par le comportement dépourvu de maîtrise de soi de M. Z ne permettait pas d'envisager son maintien à son poste, ce qui légitime le choix du licenciement pour faute grave ", la cour d'appel a violé les articles L. 1234-1 et L. 1231-1 du code du travail ;
3o) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en retenant l'existence d'une faute grave à l'encontre de M. Z, tout en relevant l'ancienneté de ce dernier, présent dans l'entreprise depuis 10 ans et sans rechercher, comme elle y était invitée, s'il n'avait jamais fait l'objet d'une quelconque sanction disciplinaire, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L.1234-9 du code du travail ;