Jurisprudence : Cass. com., 29-01-1991, n° 90-10.525, Cassation Partielle



Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 29 Janvier 1991
Cassation Partielle
N° de pourvoi 90-10.525
Président M. DEFONTAINE

Demandeur SA Allegri Electricité
Défendeur Société Klockner Moeller et autres
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la société anonyme Allegri Electricité, dont le siège social est à Arc-sur-Tille (Côte-d'Or),
en cassation d'un arrêt rendu le 22 novembre 1989 par la cour d'appel de Dijon (1e chambre, 1e section), au profit de
1°) la société Klockner Moeller, dont le siège social est à Suresnes (Hauts-de-Seine),
2°) la société d'Assurances Crédit des Entreprises Sacren, société anonyme, dont le siège social est à Le Mans (Sarthe),
3°) M. ..., pris en sa qualité de représentant des créanciers de la société anonyme Allegri Electricité, demeurant à Dijon (Côte-d'Or),
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 18 décembre 1990, où étaient présents
M. Defontaine, président, Mme Pasturel, conseiller rapporteur, MM ..., ..., ..., ..., ..., conseillers, Mme Desgranges, conseiller référendaire, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme le conseiller Pasturel, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Allegri Electricité, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Liard, avocat des sociétés Klockner Moeller et Assurances Crédit des Entreprises Sacren, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Allegri Electricité (la société Allegri) a été mise en redressement judiciaire le 8 mars 1988 et a obtenu un plan de continuation arrêté par jugement du 16 mai 1989 sans avoir payé les matériels livrés par la société Klockner Moeller ;
que se fondant sur une clause de réserve de propriété, le vendeur a revendiqué la somme de 1 030 000 francs correspondant au prix des marchandises ;
Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches
Attendu que la société Allegri fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré recevable la revendication, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la déclaration de créance ne peut être faite par un tiers autre que le créancier que si ce tiers justifie d'un mandat non seulement exprès mais spécial ;
qu'en se contentant d'un simple mandat exprès du tiers déclarant, la
cour d'appel a violé l'article 50 de la loi du 25 janvier 1985 ;
alors, d'autre part, que ni la police souscrite par le créancier auprès de son assureur, ni la lettre qu'il lui a adressée le 11 mars 1988 en lui demandant "de prendre les mesures nécessaires qui s'imposent" ne constituaient un mandat spécial de déclarer la créance de la société Klockner
Moeller auprès de l'administrateur de la société Allegri ;
qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles 50 de la loi du 25 janvier 1985 et 1987 du Code civil ;
alors, de surcroît, que le mandat spécial doit autoriser le mandataire à effectuer une catégorie d'actes déterminée et précise ;
que la police aux termes de laquelle la société Klockner Moeller donnait mandat à son assureur pour exercer tous les droits qu'il tient de ses créances ne constituait pas un mandat exprès aux fins de déclaration des créances entre les mains des débiteurs ou de leurs administrateurs ;
que la cour d'appel a violé l'article 1988 du Code civil ;
et alors, enfin, que la lettre de la société Klockner Moeller du 11 mars 1988 ne constituait pas davantage un tel mandat exprès ;
qu'ainsi, la cour a derechef violé l'article 1988 du Code civil ;
Mais attendu que la déclaration de créance n'étant pas une condition de la revendication, la validité du mandat donné par la société Klockner Moeller à son assureur est sans influence sur la solution du litige ;
que le moyen est donc inopérant ;
Sur le deuxième moyen
Attendu que la société Allegri reproche encore à l'arrêt d'avoir accueilli la revendication du prix des marchandises alors, selon le pourvoi, que la revendication du prix ne peut être exercée à l'encontre du débiteur en redressement judiciaire lorsque les marchandises couvertes par une clause de réserve de propriété ont cessé d'exister en nature lors de l'ouverture de la procédure collective ;
qu'en admettant l'action en revendication engagée par la société Klockner Moeller à l'encontre de la société Allegri en redressement judiciaire sur le prix de marchandises dont elle reconnaissait la revente au jour de l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a violé les articles 121 et 122 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu que l'arrêt, après avoir fait état de la thèse de la société Allegri, qui prétendait que la marchandise avait été revendue avant le jugement d'ouverture de la procédure collective, ne s'est pas prononcé sur l'exactitude de cette assertion et n'a donc pas fait la constatation invoquée au moyen ;
que celui-ci manque par le fait qui lui sert de fondement ;
Mais sur le troisième moyen
Vu l'article 55 de la loi du 25 janvier 1985, selon lequel le jugement d'ouverture du redressement judiciaire arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels, ainsi que de tous intérêts de retard et majorations, à moins qu'il ne s'agisse des intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour un durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d'un paiement différé d'un an ou plus ;
Attendu que l'arrêt a condamné la société Allegri à payer à la société Klockner Moeller les intérêts au taux légal de la somme de 600 000 francs représentant la valeur de la marchandise, à compter du 23 mars 1988 et à l'assureur de cette société les intérêt au taux légal de la somme de 340 000 francs, versée par lui à son assuré à compter du 23 décembre 1988 ;
Attendu qu'en se prononçant ainsi pour les périodes comprises entre les dates susvisées, postérieures au jugement d'ouverture de la procédure collective et le jugement arrêtant le plan de continuation, et alors qu'aucune des exceptions prévues à l'article 55 du la loi du 25 janvier 1985 n'était en cause, la cour d'appel a violé ce texte ;
Et attendu qu'il y a lieu de faire application de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Allegri à payer à la société Klockner Moeller les intérêts au taux légal de la sommme de 690 000 francs à compter du 23 mars 1988 jusqu'au jugement arrêtant le plan de redressement de l'entreprise et à payer à l'assureur de cette société les intérêts au taux légal de la somme de 340 000 francs à compter du 23 décembre 1988 et jusqu'au jugement arrêtant le plan de redressement, l'arrêt rendu entre les parties le 22 novembre 1989 par la cour d'appel de Dijon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi de ce chef ;
Déboute la société Klockner Moeller ainsi que l'assureur de cette société de leur demande en paiement d'intérêts au taux légal au titre des périodes considérées ;
Condamne la société Allegri aux dépens de l'instance de cassation ;
d -d! Met en outre à sa charge les dépens afférents aux instances devant les juges du fond ;
Ordonne qu'à la diligence de M le procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit sur les registres de la cour d'appel de Dijon, en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commercial, et prononcé par M le président en son audience publique du vingt-neuf janvier mil neuf cent quatre vingt onze.

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