Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 1er Février 2000
Rejet
N° de pourvoi 96-21.718
Président M. GRIMALDI
conseiller
Demandeur société Banque parisienne de crédit "BPC", société anonyme
Défendeur M. Daniel ...
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la société Banque parisienne de crédit "BPC", société anonyme, dont le siège est Paris,
en cassation d'un arrêt rendu le 14 novembre 1996 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), au profit de M. Daniel ..., demeurant Maisons-Laffitte,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 7 décembre 1999, où étaient présents M. Grimaldi, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Aubert, conseiller rapporteur, M. Tricot, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Aubert, conseiller, les observations de Me Le ..., avocat de la Banque parisienne de crédit, de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. ..., les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 novembre 1996), que M. ... s'est porté caution solidaire du remboursement d'un prêt consenti par la Banque parisienne de crédit ( la banque) à la société Chauss 77 (la société) dont il était le dirigeant ; que la société ayant été mise en redressement judiciaire, la banque, après avoir déclaré sa créance, a assigné M. ... en exécution de son engagement ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que la déclaration de créance adressée par la banque mentionnait le nom du déclarant, à savoir Mme ... ; qu'aucune disposition de la loi du 25 janvier 1985 ou du décret du 27 décembre 1985 n'exige que la déclaration soit signée par son auteur ; qu'au surplus, le fait que la banque ait produit une déclaration de créance non signée, s'expliquait aisément par le fait que l'original, seul revêtu d'une signature, avait été adressé au représentant des créanciers ; que la cour d'appel en reprochant à la banque de ne pas produire une déclaration de créance signée a ajouté aux conditions légales et violé les textes susvisés ; alors, d'autre part, qu'une déclaration de créance peut être valablement faite par le préposé d'une personne morale agissant dans le cadre de ses fonctions conformément à sa mission comportant notamment pouvoir d'ester en justice ; que la déclaration de créance de la banque avait été effectuée par Mme ..., fondé de pouvoirs ; que la cour d'appel, en ne recherchant pas si ce préposé de la banque n'avait pas agi dans le cadre de ses fonctions et conformément à sa mission, a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1328 du Code civil, 853, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile et 175 du décret du 27 décembre 1985 ; et alors, enfin, que M. ..., qui n'alléguait pas avoir
contesté la créance de la banque dans le cadre de la procédure de vérification du passif de la débitrice principale, n'était pas recevable à opposer à la demande de paiement de la banque, le défaut d'habilitation du préposé ayant produit au passif ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse application, les articles 1328 du Code civil, 853, alinéa 1er, du nouveau Code de procédure civile et 175 du décret du 27 décembre 1985 ;
Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt effectuant la recherche prétendûment omise retient qu'il n'est pas établi que Mme ... bénéficiait d'une délégation de pouvoir suffisante pour déclarer la créance de la banque ; que la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
Attendu, en second lieu, qu'il ne résulte ni des conclusions ni de la décision attaquée que la banque ait soutenu que M. ... n'alléguait pas avoir contesté la créance dans le cadre de la procédure de vérification des créances ; que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit ;
D'où il suit qu'irrecevable en sa dernière branche, il n'est pas fondé pour le surplus ;
Sur le second moyen, pris en ses quatre branches
Attendu que la banque fait encore grief à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'objet du litige est déterminé par les parties ; qu'en appel, ces prétentions ainsi que les moyens sur lesquels elles sont fondées, sont formulées dans les conclusions ; qu'en l'espèce, la cour d'appel qui n'était saisie que d'une contestation relative à la déclaration de créance, émanant de M. ..., en qualité de caution de cette société, ne pouvait déclarer la créance éteinte à l'encontre de la débitrice principale ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en soulevant d'office le moyen tiré d'une prétendue extinction de la créance à l'encontre de la débitrice principale, sans inviter les parties à s'expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de troisième part, qu'aucune contestation n'a été élevée dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'encontre de la débitrice principale quant à la régularité de la déclaration de créance effectuée par la banque ; que la cour d'appel qui a affirmé néanmoins que la caution ne pouvait être tenue à plus que le débiteur principal, bien qu'à ce jour, aucune décision n'ait fixé le montant dû par ce dernier, a violé l'article 2015 du Code civil ; et alors, enfin, qu'aucun des organes de la procédure collective ouverte à l'encontre de la débitrice principale n'a contesté la régularité de la déclaration de créance effectuée par la banque, le juge-commissaire ayant seulement par ordonnance du 2 septembre 1994 estimé à tort d'ailleurs, qu'il y avait lieu de surseoir à statuer jusqu'à l'issue de la procédure en cours ; que la cour d'appel, qui a déclaré néanmoins la créance de la banque éteinte à l'encontre de la débitrice principale, a violé les articles 100 et 101 de la loi du 25 janvier 1985 et l'article 72 du décret du 27 décembre 1985 ;
Mais attendu que, tant que la créance n'est pas irrévocablement admise, la caution est fondée à contester, devant le juge du cautionnement, toutes les exceptions inhérentes à la dette ; que la cour d'appel, saisie dans les seuls rapports entre le créancier et la caution, ayant estimé que la preuve de la régularité de la déclaration de créance n'était pas faite, a, hors toute méconnaissance de l'objet du litige et du principe de la contradiction, exactement retenu que la caution pouvait bénéficier de cette exception ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses quatre branches,
D'où il suit qu'irrecevable dans ses deux dernières branches, il est inopérant pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Banque parisienne de crédit aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Banque parisienne de crédit à verser la somme de 10 000 francs à M. ... ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du premier février deux mille.