SOC. CF
COUR DE CASSATION
Audience publique du 23 octobre 2013
Rejet
M. LINDEN, conseiller le plus ancien faisant fonction de
président
Arrêt no 1714 F-D
Pourvoi no N 12-20.138
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Statuant sur le pourvoi formé par M. Guy Z, domicilié Les Abymes,
contre l'arrêt rendu le 27 février 2012 par la cour d'appel de Basse-Terre (chambre sociale), dans le litige l'opposant à la société Air France, société anonyme, dont le siège est Paris Roissy Charles-de-Gaulle cedex,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l'audience publique du 24 septembre 2013, où étaient présents M. Linden, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, M. Ludet, conseiller rapporteur, Mme Guyot, conseiller, Mme Taffaleau, avocat général, Mme Bringard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Ludet, conseiller, les observations de la SCP Richard, avocat de M. Z, de Me Le Prado, avocat de la société Air France, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 27 février 2012), que M. Z, engagé le 2 juin 1968 par la société Air France, a occupé à compter du 1er janvier 1986 les fonctions d'agent service hôtelier à Pointe-à-Pitre ; qu'ayant été détaché le 30 juin 1995 auprès de la société Sori, il a sollicité le 31 octobre 1995 sa réintégration au sein de la société Air France ; qu'il a été licencié le 10 novembre 1995 après avoir refusé deux postes de reclassement ; qu'une transaction a été conclue entre les parties le 13 novembre 1995 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'annulation de la transaction et de paiement d'indemnités ;
Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de déclarer ses demandes irrecevables, alors, selon le moyen
1o/ qu'il était stipulé à l'article II de la convention de détachement conclue le 30 juin 1995 que, " durant la période de détachement, la compagnie s'efforcera de proposer aux agents la réintégration à Air France, sous réserve de postes vacants, en priorité sur les embauches et sur les mutations métropole/antilles, dans des emplois de même niveau soit en Guadeloupe, soit en Martinique. L'adjoint ressources humaines de la délégation Caraïbes sera chargé du suivi des agents détachés à Sori/société anonyme. Il communiquera systématiquement tous les avis de prospections des Antilles, concernant les postes de même niveau vacants ou créés en Guadeloupe et Martinique " ; qu'il en résultait que la société Air France s'obligeait, en cas de postes vacants, à réintégrer les agents détachés à la société Sori ; qu'en affirmant néanmoins que la société Air France n'était pas dans l'obligation de réintégrer M. Z, de sorte qu'il ne pouvait soutenir avoir subi un préjudice matériel à hauteur de 100 000 euros du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette convention, en violation de l'article 1134 du code civil ;
2o/ que le protocole d'accord transactionnel du
13 novembre 1995 stipulait que la société Air France " remettra [à M. Z] son certificat de travail avec l'attestation Assedic " ; qu'en affirmant néanmoins que, " lors de la conclusion du protocole transactionnel,
M. Z ne faisait porter aucunement ses revendications sur la remise d'une attestation Assedic ", la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du protocole d'accord transactionnel, en violation l'article 1134 du code civil ;
3o / que l'employeur doit délivrer spontanément au salarié, au moment de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits ; qu'en décidant néanmoins que M. Z n'était pas fondé à réclamer une indemnisation au titre du défaut de remise de l'attestation Assedic par la société Air France, dès lors qu'il n'avait réclamé cette attestation à cette dernière qu'en 1998, la cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a violé l'article R. 1234-9 du code du travail ;
4o/ que le défaut ou la remise tardive au salarié, par l'employeur, des documents Assedic nécessaires à la détermination de ses droits entraîne nécessairement un préjudice qui doit être réparé ; qu'en décidant néanmoins que M. Z n'avait subi aucun préjudice résultant du défaut de remise de l'attestation Assedic par la société Air France, motif pris que la remise de cette attestation n'avait pas été revendiquée lors de la conclusion du protocole transactionnel puisqu'il avait continué à travailler pour la société Sori postérieurement à son licenciement, la cour d'appel a violé l'article R. 1234-9 du code du travail ;
Mais attendu, d'abord, que la cour d'appel, qui a relevé que la convention de détachement stipulait que la société Air France s'efforcerait durant la période du détachement de proposer la réintégration sous réserve de postes vacants, en priorité sur les embauches et sur les mutations métropole/Antilles, dans des emplois de même niveau, soit en Guadeloupe, soit en Martinique, n'a pas dénaturé ces stipulations en retenant qu'elles ne mettaient pas à la charge de la société Air France une obligation de résultat concernant la réintégration des agents détachés auprès de la société Sori ;
Attendu, ensuite, qu'aucun grief n'est développé par le moyen en ce qu'il vise l'irrecevabilité de la demande pour défaut de remise de l'attestation destinée à Pôle emploi ;
D'où il suit que le moyen, inopérant en ses trois dernières branches, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour M. Z
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les demandes formées par Monsieur Guy Z à l'encontre de la Société AIR FRANCE, tendant à voir condamner celle-ci à lui payer diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE dans les motifs du protocole d'accord transactionnel, il est rappelé que la Compagnie Air France a notifié à M. Z son licenciement pour refus de poste (...) ; qu'en ce qui concerne le préjudice matériel et financier invoqué par M. Z, il doit être observé que la convention de détachement du 30 juin 1995 ne mettait à la charge de la Compagnie Air France aucune obligation de résultat concernant la réintégration des agents détachés auprès de la Société Sori ; qu'en effet au paragraphe II de cette convention, il est indiqué que " Durant la période de détachement, la Compagnie s'efforcera de proposer aux agents la réintégration à Air France, sous réserve de postes vacants, en priorité sur les embauches et sur les mutations métropole/Antilles, dans des emplois de même niveau soit en Guadeloupe soit en Martinique. L'Adjoint Ressources Humaines de la délégation Caraïbes sera chargé du suivi des agents détachés à SORT/SA. Il communiquera systématiquement tous les avis de prospection des Antilles, concernant les postes de même niveau vacants ou créés en Guadeloupe et Martinique (...) L'Adjoint Ressources Humaines examinera avec les agents chaque réintégration possible et proposera compte tenu de la nature des postes à pourvoir, des actions de formation, de reconversion ou de remise à niveau afin de faciliter la prise du nouveau poste" ; qu'ainsi M. Z ne peut soutenir qu'il a subi un préjudice matériel et financier à hauteur de 100 000 euros résultants du licenciement sans cause réelle et sérieuse qu'il a subi, puisqu'en l'absence d'un tel licenciement, il aurait continué à travailler pour la Société Sori, la Compagnie Air France n'étant pas, en l'absence de licenciement, dans l'obligation de le réintégrer au sein de ses structures ; que M. Z ayant continué, après le licenciement intervenu, à travailler pour la Société Sori, on ne peut considérer qu'il ait subi un préjudice financier supérieur à l'indemnité minimale de 6 mois de salaires prévue par l'article L 1235-3 du code du travail, soit un montant de 92 346 francs ou 14 078,04 euros (...) ;
ET AUX MOTIFS QUE par ailleurs lors de la conclusion du protocole transactionnel, M. Z ne faisait porter aucunement ses revendications sur la remise d'une attestation ASSEDIC, et pour cause puisqu'il a continué à travailler pour la Société Sori, comme le montrent les bulletins de paie produits, et comme ne le conteste d'ailleurs pas M. Z lui-même ; que n'est qu'en 1998 que M. Z réclamait par courrier une attestation ASSEDIC à la Compagnie Air France ; qu'une telle attestation a d'ailleurs été établie puisqu'elle a été versée aux débats et régulièrement communiquée ; qu'ainsi, M. Z ne saurait être fondé à réclamer une indemnisation pour la non-remise de l'attestation ASSEDIC (...) ; qu'au regard de l'ensemble de ces préjudices, il y a lieu de considérer que l'octroi d'une somme de 20.648,18 euros consenti par la Compagnie Air France constitue une contrepartie sérieuse aux préjudices moral et matériel invoqué par M. Z et au défaut de paiement d'un mois de préavis, étant relevé au demeurant qu'il est précisé dans le protocole d'accord transactionnel que les parties ont décidé de mettre un terme définitif au litige dans les conditions fixées audit protocole, après consultation de leurs conseils ; qu'en conséquence, il n'y a pas lieu d'annuler le protocole d'accord transactionnel du 13 novembre 1995, lequel a, selon les dispositions de l'article 2052 du Code civil, autorité de la chose jugée entre les parties ; que les demandes en paiement formées par Monsieur Z à l'encontre de la Compagnie AIR FRANCE sont donc irrecevables ;
1o) ALORS QU'il était stipulé à l'article II de la convention de détachement conclue le 30 juin 1995 que, " durant la période de détachement, la Compagnie s'efforcera de proposer aux agents la réintégration à AIR France, sous réserve de postes vacants, en priorité sur les embauches et sur les mutations métropoles/antilles, dans des emplois de même niveau soit en Guadeloupe, soit en Martinique. L'Adjoint Ressources Humaines de la Délégation Caraïbes sera chargé du suivi des agents détachés à SORI/SA. Il communiquera systématiquement tous les avis de prospections des Antilles, concernant les postes de même niveau vacants ou créés en Guadeloupe et Martinique " ; qu'il en résultait que la Société AIR France s'obligeait, en cas de postes vacants, à réintégrer les agents détachés à la Société SORI ; qu'en affirmant néanmoins que la Société AIR France n'était pas dans l'obligation de réintégrer Monsieur Z, de sorte qu'il ne pouvait soutenir avoir subi un préjudice matériel à hauteur de 100.000 euros du fait de l'absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de cette convention, en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2o) ALORS QUE le protocole d'accord transactionnel du 13 novembre 1995 stipulait que la Société AIR FRANCE " remettra [à Monsieur Z] son certificat de travail avec l'attestation ASSEDIC " ; qu'en affirmant néanmoins que, " lors de la conclusion du protocole transactionnel, M. Z ne faisait porter aucunement ses revendications sur la remise d'une attestation ASSEDIC ", la Cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis du protocole d'accord transactionnel, en violation l'article 1134 du Code civil ;
3o) ALORS QUE l'employeur doit délivrer spontanément au salarié, au moment de la rupture du contrat de travail, les attestations et justifications qui lui permettent d'exercer ses droits ; qu'en décidant néanmoins que Monsieur Z n'était pas fondé à réclamer une indemnisation au titre du défaut de remise de l'attestation ASSEDIC par la Société AIR FRANCE, dès lors qu'il n'avait réclamé cette attestation à cette dernière qu'en 1998, la Cour d'appel, qui s'est prononcée par un motif inopérant, a violé l'article R. 1234-9 du Code du travail ;
4o) ALORS QUE le défaut ou la remise tardive au salarié, par l'employeur, des documents ASSEDIC nécessaires à la détermination de ses droits entraîne nécessairement un préjudice qui doit être réparé ; qu'en décidant néanmoins que Monsieur Z n'avait subi aucun préjudice résultant du défaut de remise de l'attestation ASSEDIC par la Société AIR FRANCE, motif pris que la remise de cette attestation n'avait pas été revendiquée lors de la conclusion du protocole transactionnel puisqu'il avait continué à travailler pour la Société SORI postérieurement à son licenciement, la Cour d'appel a violé l'article R. 1234-9 du Code du travail..