CIV. 1
C.B.
COUR DE CASSATION
Audience publique du 12 mars 2002
Cassation partielle
M. LEMONTEY, président
Pourvoi n° W 00-21.271
Arrêt n° 475 FS P
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1°/ Mme Jeanine Z, épouse Z, demeurant Annecy,
2°/ Mme Sophie Z, épouse Z, demeurant à Groisy,
3°/ M. Olaf Z, demeurant Thorens-Glières,
en cassation d'un arrêt rendu le 21 mars 2000 par la cour d'appel de Chambéry (Chambre civile, 2e Section), au profit de Mme Marie-Claude Y, demeurant Cran-Gevrier,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au Procureur général ;
LA COUR, composée conformément à l'article L. 131-6-1 du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 5 février 2002, où étaient présents M. X, président, M. W, conseiller rapporteur, MM. Bouscharain, Bargue, Pluyette, Croze, Mme Crédeville, M. Charruault, conseillers, Mmes Girard, Cassuto-Teytaud, Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. V, avocat général, Mme U, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. W, conseiller, les observations de la SCP Coutard et Mayer, avocat des consorts Z, de la SCP Nicolaÿ et de Lanouvelle, avocat de Mme Y, les conclusions de M. V, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Vu les articles 1121 et 1213 du Code civil ;
Attendu que Philippe Z et Mme Y ont fait, par un acte du 30 avril 1985, l'acquisition en indivision, chacun pour moitié, d'un immeuble ; qu'ils ont, à cette fin, souscrit solidairement un emprunt et adhéré à une assurance décès-invalidité, chacun pour la moitié du prêt ; que Philippe Z est décédé le 30 juillet 1990, laissant pour héritiers ses parents et frère et soeur, les consorts Z ; que l'assureur a remboursé au prêteur la moitié du capital et des intérêts échus ; que Mme Y et les consorts Z ayant revendu la maison, un désaccord s'est élevé entre eux pour le partage du prix, dont les consorts Z prétendaient avoir droit à la moitié, du fait du règlement opéré par l'assureur ;
Attendu que, pour écarter cette prétention, l'arrêt énonce que, lorsqu'un prêt garanti par un contrat d'assurance décès-invalidité a été souscrit par des coemprunteurs solidaires pour financer un achat en indivision, les héritiers de celui qui est décédé ne sont pas fondés à soutenir que la dette de l'indivision a été éteinte à l'aide des deniers propres de leur auteur de sorte qu'un droit à récompense est né au profit de celui-ci, alors que seul le bénéficiaire du contrat d'assurance, c'est-à-dire l'établissement prêteur de deniers, a droit à l'indemnité destinée au remboursement de la dette et que cette indemnité n'a jamais fait partie du patrimoine du coemprunteur décédé ;
Attendu, cependant, que, sauf convention contraire, lorsque les souscripteurs d'un emprunt destiné à l'acquisition d'un bien indivis ont adhéré à une assurance garantissant le remboursement du prêt, en cas de décès ou d'invalidité, chacun dans la mesure de sa part et portion, la mise en oeuvre de l'assurance à la suite de la survenance d'un sinistre a pour effet, dans les rapports entre les acquéreurs indivis, d'éteindre, à concurrence du montant de la prestation de l'assureur, la dette de contribution incombant à l'assuré concerné ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, sur le fondement de motifs inopérants, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté les consorts Z de leur demande en paiement de la moitié du prix de la vente, l'arrêt rendu le 21 mars 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;
Condamne Mme Y aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes des consorts Z et de Mme Y ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mars deux mille deux.