CIV. 2
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 23 mai 2024
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 478 F-B
Pourvoi n° D 22-23.735
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 23 MAI 2024
M. [V] [E], domicilié [Adresse 5], a formé le pourvoi n° D 22-23.735 contre l'arrêt rendu le 2 septembre 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 1, chambre 8), dans le litige l'opposant :
1°/ à Mme [N] [T], domiciliée [Adresse 1], prise en qualité d'administrateur provisoire de la société Immofonds Saint-Marc, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à M. [C] [O], domicilié [… …], pris en qualité de liquidateur judiciaire de Mme [Aa] [Ab],
3°/ à Mme [Aa] [Ab], … [… …],
défendeurs à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Bonnet, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [E], de la SCP Foussard et Froger, avocat de Mme [T], prise en qualité d'administrateur provisoire de la société Immofonds Saint-Marc, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 3 avril 2024 où étaient présentes Mme Martinel, président, Mme Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à M. [E] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre Mme [Ab].
Faits et procédure
2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 2 septembre 2022), Mme [T] a assigné M. [Ac], Mme [Ab] et M. [Ad] devant le juge des référés d'un tribunal judiciaire aux fins, notamment, d'être autorisée à vendre de gré à gré des biens immobiliers.
3. Cette autorisation ayant été accordée par ordonnance du 20 janvier 2022, M. [E] en a relevé appel.
Examen des moyens
Sur le second moyen
4. En application de l'
article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile🏛, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Mais sur le premier moyen
Enoncé du moyen
5. M. [E] fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande de Mme [T], en qualité d'administrateur provisoire de la société Immofonds Saint-Marc, et d'autoriser, en conséquence, cette dernière à vendre de gré à gré les lots n° 2, 27, 29, 30 et 31 dépendant de l'immeuble sis [Adresse 2]) moyennant le prix minimal net vendeur de 185 000 euros, à purger le droit de préemption du locataire et à vendre de gré à gré le lot n° 6 dépendant du même immeuble moyennant le prix minimal net vendeur de 145 000 euros et de le débouter de sa demande tendant à faire interdiction à Mme [T] de procéder à la vente des lots objets du bail commercial dans les conditions figurant dans la notification aux fins de purge du droit de préemption du locataire de la société Immofonds Saint-Marc du 30 mars 2022, alors « que le juge, qui doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction, ne peut se fonder sur des pièces produites en cours de délibéré à sa demande que s'il les soumet au débat contradictoire entre les parties ; qu'en se fondant, pour dire que Mme [T] était recevable à agir pour le compte de la société Immofonds Saint-Marc en qualité d'administrateur provisoire de celle-ci, sur une ordonnance en date du 11 mai 2022, rendue sur requête, prorogeant sa mission à compter du 15 mai 2022 jusqu'au prononcé de l'ordonnance de référé à intervenir, pièce produite en cours de délibéré à la demande de la cour d'appel, sans avoir ni invité les parties à formuler, dans un certain délai, leurs observations en cours de délibéré, ni ordonné la réouverture des débats, la cour d'appel a violé l'
article 16 du code de procédure civile🏛. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 16 du code de procédure civile :
6. Il résulte de ce texte que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
7. Il découle des
articles 442 et 445 du code de procédure civile🏛🏛 qu'après la clôture des débats, les parties ne peuvent déposer aucune note à l'appui de leurs observations, à moins qu'elles n'aient été invitées par le président et les juges à fournir les explications de droit ou de fait qu'ils estiment nécessaires ou à préciser ce qui paraît obscur.
8. L'
article 444 du code de procédure civile🏛 énonce que le président doit ordonner la réouverture des débats chaque fois que les parties n'ont pas été à même de s'expliquer contradictoirement sur les éclaircissements de droit ou de fait qui leur avaient été demandés.
9. Pour rejeter le moyen tiré de l'irrecevabilité à agir de l'administrateur provisoire, l'arrêt retient qu'en cours de délibéré, par message électronique du 22 juin 2022, il a été demandé la production de l'ordonnance portant prorogation de la mission de Mme [T], et qu'il en ressort que la mission de cette dernière a été prorogée à compter du 15 mai 2022 et jusqu'au prononcé de l'ordonnance de référé à intervenir.
10. En statuant ainsi, sans avoir ni invité les parties à formuler, dans un certain délai, leurs observations en cours de délibéré, ni ordonné la réouverture des débats, la cour d'appel a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 2 septembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;
Condamne Mme [T], prise en sa qualité d'administrateur provisoire de la société Immofonds Saint-Marc, aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par Mme [T], prise en sa qualité d'administrateur provisoire de la société Immofonds Saint-Marc, et la condamne à payer à M. [E] la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois mai deux mille vingt-quatre.