Jurisprudence : TA Guadeloupe, du 16-05-2024, n° 2200498

TA Guadeloupe, du 16-05-2024, n° 2200498

A93075BC

Référence

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Références

Tribunal Administratif de la Guadeloupe

N° 2200498

2ème Chambre
lecture du 16 mai 2024
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 12 mai 2022, Mme B A demande au tribunal :

1°) d'annuler son évaluation professionnelle établie le 15 mars 2022, au titre de l'année 2021 ;

2°) de mettre à la charge de l'État une somme de 200 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative🏛 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 35 euros, au titre des dépens.

Elle soutient que :

- la décision attaquée a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est illégale en raison de la partialité du notateur qui attendait le même avancement qu'elle ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le notateur a refusé de se prononcer sur l'aptitude à des fonctions plus importantes ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que le notateur n'a pas pris en compte son implication réelle dans le service en maintenant la notation à une moyenne raisonnable et qu'elle aurait dû être reconnue apte à des fonctions plus importantes.

La requête a été communiquée au préfet de la Guadeloupe le 26 septembre 2023, qui n'a pas produit d'observation en défense.

Par ordonnance du 29 janvier 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 29 février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la fonction publique ;

- le décret n° 95-654 du 9 mai 1995🏛 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale ;

- le décret n° 2010-888 du 28 juillet 2010🏛 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Sollier,

- les conclusions de M. Sabatier-Raffin, rapporteur public,

- et les observations de Mme A.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B A, brigadière de police affectée à la circonscription de sécurité publique de Capesterre-Belle-Eau depuis le 1er mars 2009, demande au tribunal d'annuler son évaluation professionnelle au titre de l'année 2021 établie le 15 mars 2022.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration🏛 : " Toute personne peut se prévaloir des documents administratifs mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-2, émanant des administrations centrales et déconcentrées de l'Etat et publiés sur des sites internet désignés par décret. Toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par ces documents pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée () ". Aux termes de l'article R. 312-10 de ce code🏛 : " Les sites internet sur lesquels sont publiés les documents dont toute personne peut se prévaloir dans les conditions prévues à l'article L. 312-3 précisent la date de dernière mise à jour de la page donnant accès à ces documents ainsi que la date à laquelle chaque document a été publié sur le site. Ces sites comportent, sur la page donnant accès aux documents publiés en application de l'article L. 312-3, la mention suivante : " Conformément à l'article L. 312-3 du code des relations entre le public et l'administration, toute personne peut se prévaloir de l'interprétation d'une règle, même erronée, opérée par les documents publiés sur cette page, pour son application à une situation qui n'affecte pas des tiers, tant que cette interprétation n'a pas été modifiée, sous réserve qu'elle ne fasse pas obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires préservant directement la santé publique, la sécurité des personnes et des biens ou l'environnement " () ". Aux termes de l'article D. 312-11 du même code🏛 : " Les sites internet mentionnés au premier alinéa de l'article L. 312-3 sont les suivants : () www.interieur.gouv.fr () ".

3. Il résulte des dispositions précitées que, pour être opposable, une circulaire du ministre de l'intérieur adressée aux préfets doit faire l'objet d'une publication sur le site www.interieur.gouv.fr par le biais d'une insertion dans la liste définissant les documents opposables et comportant les mentions prescrites à l'article R. 312-10, et doit comporter un lien vers le document intégral publié sur le site " Légifrance.gouv.fr ", site relevant du Premier ministre.

4. En l'espèce, si la circulaire du 26 décembre 2016 du ministre de l'intérieur relative à la réforme des entretiens professionnels des corps actifs de la police a fait l'objet d'une mise en ligne sur le site Légifrance le 4 janvier 2017, elle ne figure toutefois pas parmi la liste des documents opposables accessible sur le site du ministère de l'intérieur. Sa publication ne comporte ainsi aucune date de déclaration d'opposabilité. Par suite, la requérante ne peut utilement se prévaloir de cette circulaire qui n'a pas été publiée dans les conditions prévues par les dispositions citées au point 2.

5. Toutefois, aux termes de l'article L. 521-1 du code général de la fonction publique : " L'appréciation de la valeur professionnelle d'un fonctionnaire se fonde sur une évaluation individuelle donnant lieu à un compte rendu qui lui est communiqué ". Aux termes de l'article L. 521-2 du même code🏛 : " Par dérogation à l'article L. 521-1, les statuts particuliers des corps de la fonction publique de l'Etat peuvent prévoir des modalités différentes d'appréciation de la valeur professionnelle. " Aux termes de l'article 16 du décret du 9 mai 1995🏛 fixant les dispositions communes applicables aux fonctionnaires actifs des services de la police nationale : " La notation des fonctionnaires actifs des services de la police nationale fait l'objet d'un ou plusieurs entretiens d'évaluation. Elle est établie annuellement sur une notice qui comporte : 1. Une liste d'éléments d'appréciation non chiffrée permettant d'évaluer les qualités personnelles, professionnelles et les aptitudes manifestées dans l'exercice des fonctions ; 2. Une grille de notation par niveau de 1 à 7 qui rend compte de la situation du fonctionnaire ; 3. Une appréciation non chiffrée qui rend compte de l'évolution de la valeur du fonctionnaire ". Aux termes de l'article 3 du décret du 28 juillet 2010🏛 relatif aux conditions générales de l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de l'Etat : " L'entretien professionnel porte principalement sur : () 7° Ses perspectives d'évolution professionnelle en termes de carrière et de mobilité. " Et enfin, aux termes de l'article 12 de ce même décret : " Le tableau d'avancement prévu à l'article 58 de la loi du 11 janvier 1984🏛 susvisée est préparé, chaque année, par l'administration en tenant compte notamment : / 1° Des comptes rendus d'entretiens professionnels ou des notations pour les agents soumis au régime de la notation ; () ".

6. Il résulte des dispositions précitées qu'à l'issue de l'entretien professionnel d'un fonctionnaire actif des services de la police nationale, l'évaluateur doit se prononcer sur les perspectives d'évolution professionnelle de l'agent dans sa carrière, notamment en termes d'avancement ou de mobilité. Cet avis doit apparaître dans le compte rendu d'entretien professionnel de l'agent afin de permettre à l'administration d'établir utilement le tableau d'avancement du corps de celui-ci.

7. En l'espèce, il ressort de la fiche d'évaluation en litige que l'évaluateur de Mme A n'a pas renseigné la rubrique dédiée à l'appréciation de l'aptitude de l'intéressée à remplir des fonctions plus importantes. Ainsi, l'évaluateur ne s'est pas expressément prononcé sur les perspectives d'évolution professionnelle de la requérante. Dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que la décision attaquée est entachée d'erreur de droit et méconnaît les dispositions précitées.

8. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que Mme A est fondée à demander l'annulation de son évaluation professionnelle établie au titre de l'année 2021.

Sur les dépens :

9. La présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées par Mme A sur le fondement des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative🏛 doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

10. Dans les circonstances de l'espèce, en l'absence de tout justificatif quant aux frais de photocopies, de constitution de dossier et de déplacements au tribunal allégués par la requérante, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de celle-ci présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La fiche d'évaluation de Mme A au titre de l'année 2021 est annulée.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A est rejeté.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme B A et au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 25 avril 2024, à laquelle siégeaient :

M. Gouès, président,

Mme Le Roux, conseillère,

Mme Sollier, conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mai 2024.

La rapporteuse,

Signé

M. SOLLIER

Le président,

Signé

S. GOUÈS La greffière,

Signé

L. LUBINO

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

L'adjointe à la greffière en chef

Signé

A. CETOL

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