Jurisprudence : CE Contentieux, 08-02-1999, n° 168382

ARRÊT DU CONSEIL D'ETAT


Conseil d'Etat

Statuant au contentieux


N° 168382

9 / 8 SSR

Beaune

M Collin, Rapporteur

M Goulard, Commissaire du gouvernement

M Groux, Président

Lecture du 8 Février 1999


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la requête sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 3 avril et 24 juillet 1995 au secrétariat du Contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M Bernard BEAUNE, demeurant 12, rue Pierre Loti, à Yerres (91330) ; M BEAUNE demande au Conseil d'Etat d'annuler l'arrêt du 2 février 1995 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation du jugement du 6 octobre 1994 du tribunal administratif de Versailles, rejetant sa demande en réduction de la taxe d'habitation et de la taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles il a été assujetti dans les rôles de la commune d'Yerres, au titre de l'année 1991 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts ;

Vu la loi n° 82-213 du 2 mars 1982, modifié ;

Vu le décret n° 83-224 du 22 mars 1983 ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu l'ordonnance n° 45-1708 du 31 juillet 1945, le décret n° 53-934 du 30 septembre 1953 et la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 ;

Après avoir entendu en audience publique :

- le rapport de M Collin, Auditeur,

- les observations de la SCP Vier, Barthélemy, avocat de M BEAUNE,

- les conclusions de M Goulard, Commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité de l'arrêt attaqué de la cour administrative d'appel de Paris :

Considérant que, ni les dispositions de l'article R 27 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, selon lesquelles les chambres de ces cours peuvent siéger en formation de jugement avec trois membres seulement en cas d'absence ou d'empêchement de certains de leurs membres, ni aucun autre texte ou principe général de droit n'oblige la chambre qui siège en une telle formation à faire mention dans ses décisions de cette absence ou de cet empêchement ; que l'article R 28 du même code, qui, dans sa rédaction applicable en l'espèce, dispose que "le président de la cour administrative d'appel peut présider une chambre siégeant en formation de jugement" et que "le président de la chambre siège alors à la place du conseiller le plus ancien affecté à la chambre", n'implique pas que, lorsqu'elle est présidée par le président de la Cour, une chambre ne peut siéger en l'absence de son président ;

Considérant que l'arrêt attaqué a été rendu par la 3ème chambre de la cour administrative d'appel de Paris, composée du président de la Cour, d'un conseiller et du conseiller-rapporteur ; que, contrairement à ce que soutient M BEAUNE, cette chambre a pu régulièrement siéger sans que son président fût présent ; que M BEAUNE ne peut davantage prétendre que le défaut de mention de l'absence ou de l'empêchement d'autres membres de la chambre dans l'arrêt qu'il conteste entacherait celui-ci d'irrégularité ;

Sur le bien-fondé de l'arrêt :

Considérant qu'aux termes des dispositions, alors applicables, de l'article 11 de la loi n° 82-213 du 2 mars 1982 : "Ne sont obligatoires pour les communes que les dépenses nécessaires à l'acquittement des dettes exigibles et les dépenses pour lesquelles la loi l'a expressément décidé. - La chambre régionale des comptes saisie par le représentant de l'Etat dans le département , constate qu'une dépense obligatoire n'a pas été inscrite au budget communal ou l'a été pour une somme insuffisante. Elle opère cette constatation dans le délai d'un mois à partir de sa saisine et adresse une mise en demeure à la commune concernée. - Si, dans un délai d'un mois, cette mise en demeure n'est pas suivie d'effet, la chambre régionale des comptes demande au représentant de l'Etat d'inscrire cette dépense au budget de la commune et propose, s'il y a lieu, la création de ressources ou la diminution de dépenses facultatives destinées à couvrir la dépense obligatoire. Le représentant de l'Etat dans le département règle et rend exécutoire le budget rectifié en conséquence. S'il s'écarte des propositions formulées par la chambre régionale des comptes, il assortit sa décision d'une motivation explicite" ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le préfet de l'Essonne, après avoir constaté que le budget primitif voté le 28 mars 1991 par le conseil municipal d'Yerres ne comportait aucun crédit pour couvrir la dépense résultant de la mise en jeu de la garantie que la commune d'Yerres, à ce autorisée par une délibération de son conseil municipal du 17 décembre 1986, avait accordée à l'emprunt contracté par la société d'économie mixte "Yerres Objectif Loisirs" auprès de la Caisse d'aide à l'équipement descollectivités locales en vue de la réalisation des "Jardins aquatiques de Yerres", a saisi, le 25 avril 1991, la chambre régionale des comptes d'Ile-de-France, en application de l'article 11, précité, de la loi du 2 mars 1982 ; qu'estimant que la dépense présentait un caractère obligatoire, la chambre régionale des comptes a mis en demeure la commune d'Yerres, le 23 mai 1991, d'ouvrir un crédit complémentaire de 7 853 790 F ; que cette mise en demeure n'ayant pas été suivie d'effet, la chambre régionale a, par un nouvel avis du 18 juillet 1991, demandé au préfet de l'Essonne d'inscrire d'office la dépense au budget de la commune et de la couvrir, notamment, par un accroissement du produit des contributions directes locales ; que, par un arrêté du 16 septembre 1991, le préfet de l'Essonne a inscrit un crédit complémentaire de 7 500 000 F au budget primitif de la commune d'Yerres pour 1991, porté les dépenses et les recettes de ce budget à 180 884 446 F, assigné de nouveaux taux aux quatre contributions directes locales (taxe d'habitation : 16,83 %, taxe foncière sur les propriétés bâties : 24,61 %, taxe foncière sur les propriétés non bâties : 56,45 %, taxe professionnelle : 16,92 %), fixé le produit de ces taxes à 74 008 318 F, et rendu exécutoire le budget primitif de la commune d'Yerres pour 1991 ainsi rectifié ; que M. BEAUNE se pourvoit contre l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris qui a confirmé le rejet que le tribunal administratif de Versailles avait opposé à sa demande en décharge de la taxe d'habitation et de la taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles il a été assujetti, au titre de l'année 1991, aux taux ci-dessus indiqués, dans les rôles de la commune d'Yerres ;

Considérant que, dans le cas où, comme en l'espèce, il a été fait application de la procédure et des mesures prévues par l'article 11 de la loi du 2 mars 1982, les contribuables assujettis aux contributions directes perçues au profit d'une commune, telles que la taxe d'habitation et la taxe foncière sur les propriétés bâties, peuvent en demander la décharge ou la réduction en se prévalant des irrégularités ou de l'illégalité dont serait entaché l'arrêté préfectoral qui a fixé le taux de ces contributions ; qu'ils ne peuvent, en revanche, du fait de l'absence de corrélation entre les taxes perçues au profit de la commune, dont le produit fait partie des ressources générales de cette dernière, et telle ou telle dépense inscrite au budget municipal, utilement invoquer, à l'appui de leur demande en décharge ou en réduction, l'irrégularité ou l'illégalité de la prise en charge par la commune d'une dépense inscrite d'office à ce budget par le préfet, comme dépense obligatoire ;

Considérant que les dispositions combinées des articles 26 et 29 du décret n° 83-224 du 22 mars 1983, en vertu desquelles le préfet qui a réglé et rendu exécutoire le budget rectifié d'une collectivité territoriale en application de l'article 11 de la loi du 2 mars 1982, adresse sa décision à cette collectivité dans le délai de vingt jours qui suit la notification de l'avis de la chambre régionale des comptes, ne lui impartissent pas ce délai à peine de nullité ; que la cour administrative d'appel a donc pu sans erreur de droit juger que le fait que l'arrêté du préfet de l'Essonne du 16 septembre 1991, précité, avait été pris plus de vingt jours après notification de l'avis de la chambre régionale des comptes d'Ile-de-France du 18 juillet 1991, était sans influence sur sa légalité ;

Considérant que M BEAUNE a soulevé devant la cour administrative d'appel, au soutien de sa contestation de la taxe d'habitation et de la taxe foncière sur les propriétés bâties auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1991 dans les rôles de la commune d'Yerres, un moyen tiré de ce que, en raison des irrégularités qui auraient affecté la décision prise par cette commune de garantir l'emprunt contracté auprès de la Caisse d'aide à l'équipement des collectivités locales par la société d'économie mixte "Yerres Objectif Loisirs", le produit des deux taxes qui lui sont réclamées servirait illégalement à couvrir la dépense résultant de la mise en jeu de cette garantie, à tort regardée par le préfet comme obligatoire et inscrite comme telle par son arrêté du 16 septembre 1991 au budget de la commune ; qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessuset ainsi que le ministre du budget l'avait fait valoir devant la cour administrative d'appel, que ce moyen était inopérant ; qu'il doit être écarté pour ce motif, substitué à celui qui a été retenu dans l'arrêt attaqué, dont il justifie légalement sur ce point le dispositif ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M BEAUNE n'est pas fondé à demander l'annulation de cet arrêt ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M BEAUNE est rejetée.

Article 2 : La présente décision sera notifiée à M Bernard BEAUNE, à la commune d'Yerres et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

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