Directive communautaire
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DIRECTIVE DU CONSEIL
du 3 octobre 1989
visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle
(89/552/CEE)
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 57 paragraphe 2 et son article 66,
vu la proposition de la Commission (1),
en coopération avec le Parlement européen (2),
vu l'avis du Comité économique et social (3),
considérant que les objectifs de la Communauté, tels qu'ils sont énoncés dans le traité, consistent à réaliser une union sans cesse plus étroite entre les peuples européens, à établir des relations plus étroites entre les États que la Communauté réunit, à assurer par une action commune le progrès économique et social des pays en éliminant les barrières qui divisent l'Europe, à promouvoir l'amélioration constante des conditions de vie de ses peuples, ainsi qu'à veiller à la sauvegarde et à l'affermissement de la paix et de la liberté;
considérant que le traité prévoit l'établissement d'un marché commun comportant l'abolition, entre les États membres, des obstacles à la libre circulation des services et l'établissement d'un régime assurant que la concurrence n'est pas faussée;
considérant que les émissions transfrontières réalisées grâce aux différentes technologies sont l'un des moyens permettant de poursuivre les objectifs de la Communauté; qu'il convient d'adopter des mesures assurant le passage des marchés nationaux à un marché commun de production et de distribution de programmes et créant des conditions de concurrence loyale sans préjudice de la fonction d'intérêt public qui incombe aux services de radiodiffusion télévisuelle;
considérant que le Conseil de l'Europe a adopté la convention européenne sur la télévision transfrontière;
considérant que le traité prévoit l'adoption de directives en vue de la coordination des dispositions destinées à faciliter l'accès aux activités non salariées;
considérant que la radiodiffusion télévisuelle constitue, dans des circonstances normales, un service au sens du traité;
considérant que le traité prévoit la libre circulation de tous les services fournis normalement contre rémunération, sans exclusion liée à leur contenu culturel ou autre et sans restriction à l'égard des ressortissants des États membres établis dans un pays de la Communauté autre que celui du destinataire du service;
considérant que ce droit appliqué à la diffusion et à la distribution de services de télévision est aussi une manifestation spécifique, en droit communautaire, d'un principe plus général, à savoir la liberté d'expression telle qu'elle est consacrée par l'article 10 paragraphe 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ratifiée par tous les États membres; que, pour cette raison, l'adoption de directives concernant l'activité de diffusion et de distribution de programmes de télévision doit assurer le libre exercice de cette activité à la lumière dudit article, sous réserve des seules limites prévues au paragraphe 2 du même article et à l'article 56 paragraphe 1 du traité;
considérant que les dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres applicables à l'exercice d'activités de radiodiffusion télévisuelle et de distribution par câble présentent des disparités dont certaines sont susceptibles d'entraver la libre circulation des émissions dans la Communauté et de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun;
considérant que toutes ces entraves à la libre diffusion à l'intérieur de la Communauté doivent être supprimées en vertu du traité;
considérant que cette suppression doit aller de pair avec une coordination des législations applicables; que celle-ci doit avoir pour objet de faciliter l'exercice des activités professionnelles concernées et, plus généralement, la libre circulation des informations et des idées à l'intérieur de la Communauté;
considérant que, dès lors, il est nécessaire et suffisant que toutes les émissions respectent la législation de l'État membre dont elles émanent;
considérant que la présente directive prévoit les dispositions minimales nécessaires pour assurer la libre diffusion des émissions; que, de ce fait, elle n'affecte pas les compétences que possèdent les États membres et leurs autorités en ce qui concerne l'organisation - y compris les systèmes de concession, d'autorisation administrative ou de taxation - et le financement des émissions, ainsi que le contenu des programmes; que l'indépendance de l'évolution culturelle d'un État membre à l'autre et la diversité culturelle de la Communauté restent ainsi préservées;
considérant qu'il est nécessaire, dans le cadre du marché commun, que toutes les émissions émanant de la Communauté et destinées à être captées à l'intérieur de celle-ci, et notamment les émissions destinées à un autre État membre, respectent la législation de l'État membre d'origine applicable aux émissions destinées au public dans cet État membre, ainsi que les dispositions de la présente directive;
considérant que l'obligation de l'État membre d'origine de s'assurer que des émissions sont conformes à la législation nationale telle que coordonnée par la présente directive est suffisante, au regard du droit communautaire, pour garantir la libre circulation des émissions sans qu'un second contrôle pour les mêmes motifs soit nécessaire dans les États membres de réception; que, toutefois, l'État membre de réception peut, à titre exceptionnel et dans des conditions déterminées, suspendre provisoirement la retransmission d'émissions télévisées;
considérant qu'il est essentiel que les États membres veillent à ce que soient évités des actes préjudiciables à la libre circulation et au commerce des émissions télévisées ou susceptibles de favoriser la formation de positions dominantes qui imposeraient des limites au pluralisme et à la liberté de l'information télévisée ainsi que de l'information dans son ensemble;
considérant que la présente directive, en se limitant à une réglementation visant spécifiquement la radiodiffusion télévisuelle, ne préjuge pas les actes communautaires d'harmonisation en vigueur ou futurs ayant notamment pour objet de faire respecter les impératifs concernant la défense des consommateurs, la loyauté des transactions commerciales et la concurrence;
considérant qu'une coordination est cependant nécessaire pour assurer aux personnes et aux industries productrices de programmes télévisés à vocation culturelle un meilleur accès à la profession et à son exercice;
considérant que des exigences minimales applicables à tous les programmes télévisés, publics ou privés de la Communauté en ce qui concerne les productions audiovisuelles européennes sont un moyen permettant de promouvoir la production, la production indépendante et la distribution dans les industries susmentionnées et complètent d'autres instruments qui ont été ou seront proposés dans le même sens;
considérant qu'il importe dès lors de promouvoir la formation de marchés qui aient une taille suffisante pour que les productions télévisuelles des États membres puissent amortir les investissements nécessaires, non seulement en établissant des règles communes ouvrant les marchés nationaux les uns aux autres, mais aussi, chaque fois que cela est réalisable, en oeuvrant par les moyens appropriés pour que les productions européennes soient majoritaires dans les programmes de télévision des États membres; que, pour permettre l'application de ces règles et la poursuite de ces objectifs, les États membres doivent faire rapport à la Commission sur la réalisation de la proportion que la présente directive prévoit de réserver aux oeuvres européennes et aux productions indépendantes; que, pour le calcul de cette proportion, il convient de tenir compte de la situation particulière de la République hellénique et de la République portugaise; que la Commission doit porter le rapport de chaque État membre à la connaissance des autres en l'assortissant, le cas échéant, d'un avis tenant compte, notamment, du progrès réalisé par rapport aux années précédentes, de la part que les oeuvres de première diffusion représentent dans la programmation, des circonstances particulières des nouveaux organismes de télédiffusion et de la situation spécifique des pays à faible capacité de production audiovisuelle ou à aire linguistique restreinte;
considérant que, aux fins susvisées, il y a lieu de définir les " oeuvres européennes " sans préjudice de la possibilité pour les États membres de préciser cette définition en ce qui concerne des organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence conformément à l'article 3 paragraphe 1, dans le respect du droit communautaire et compte tenu des objectifs de la présente directive;
considérant qu'il importe de rechercher les instruments et procédures appropriés et conformes au droit communautaire qui favorisent la réalisation de ces objectifs en vue de l'adoption des mesures qui s'imposent pour encourager l'activité et le développement de la production et de la distribution audiovisuelles européennes, notamment dans les pays à faible capacité de production ou à aire linguistique restreinte; considérant que des dispositifs nationaux de soutien au développement de la production européenne pourront être appliqués dans la mesure où ils sont conformes au droit communautaire;
considérant que le fait de s'engager à diffuser, dans la mesure du possible, une certaine proportion d'oeuvres indépendantes réalisées par des producteurs indépendants des organismes de radiodiffusion télévisuelle encouragera l'apparition de nouvelles sources de production télévisuelle, notamment la création de petites et moyennes entreprises; qu'il en résultera de nouvelles possibilités et de nouveaux débouchés pour le génie créatif, pour les professions culturelles et pour les travailleurs du secteur de la cuture; que, en définissant la notion de producteur indépendant, les États membres devront tenir compte de cet objectif et, pour cela, accorder toute l'attention voulue aux petites et moyennes entreprises de production et veiller à rendre possible la participation financière des sociétés de coproduction filiales des organismes de radiodiffusion télévisuelle;
considérant que des mesures sont nécessaires pour permettre aux États membres de veiller à une certaine chronologie entre la première diffusion cinématographique d'une oeuvre et la première diffusion télévisuelle;
considérant que, dans le souci de promouvoir activement telle ou telle langue, les États membres doivent conserver la faculté de fixer des règles plus strictes ou plus détaillées en fonction de critères linguistiques, pour autant que ces règles respectent le droit communautaire et, notamment, ne soient pas applicables à la retransmission de programmes originaires d'autres États membres;
considérant que, pour assurer de façon complète et adéquate la protection des intérêts des consommateurs que sont les téléspectateurs, il est essentiel que la publicité télévisée soit soumise à un certain nombre de normes minimales et de critères, et que les États membres aient la faculté de fixer des règles plus strictes ou plus détaillées et, dans certains cas, des conditions différentes pour les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence;
considérant que, tout en respectant le droit communautaire, les États membres doivent pouvoir fixer, pour les émissions destinées uniquement au territoire national qui ne peuvent être reçues, directement ou indirectement, dans un ou plusieurs autres États membres, d'autres conditions relatives à l'insertion de la publicité et d'autres limites applicables au volume de publicité afin de favoriser la diffusion de ce type d'émissions;
considérant qu'il y a lieu d'interdire toute publicité télévisée pour les cigarettes et les autres produits du tabac, y compris les formes indirectes de publicité qui, sans faire directement mention du produit, essaient de tourner l'interdiction de publicité en utilisant des noms de marque, des symboles ou d'autres traits distinctifs de produits de tabac ou d'entreprises dont les activités connues ou principales comprennent la production ou la vente de tels produits;
considérant qu'il est également nécessaire d'interdire toute publicité télévisée pour les médicaments et les traitements médicaux uniquement disponibles sur prescription médicale dans l'État membre de la compétence duquel relève l'organisme de radiodiffusion télévisuelle, ainsi que de prévoir des critères stricts en matière de publicité télévisée pour les boissons alcooliques;
considérant que, étant donné l'importance croissante du parrainage dans le financement des programmes, il convient d'établir des règles appropriées à ce sujet;
considérant qu'il est en outre nécessaire de prévoir des règles pour la protection de l'épanouissement physique, mental et moral des mineurs dans des programmes et dans la publicité télévisée;
considérant que, si les organismes de radiodiffusion télévisuelle sont normalement tenus de veiller à ce que les émissions présentent loyalement les faits et les événements, il importe cependant de les soumettre à des obligations précises en matière de droit de réponse ou de mesures équivalentes pour que toute personne lésée dans des droits légitimes à la suite d'une allégation faite au cours d'une émission télévisée puisse effectivement faire valoir ces droits,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
CHAPITRE I
Définitions
Article premier
Aux fins de la présente directive, on entend par:
a) " radiodiffusion télévisuelle " l'émission primaire, avec ou sans fil, terrestre ou par satellite, codée ou non, de programmes télévisés destinés au public. Est visée la communication de programmes entre entreprises en vue d'une rediffusion à l'intention du public. Ne sont pas visés les services de communications fournissant, sur appel individuel, des éléments d'information ou d'autres prestations, tels que les services de télécopie, les banques de données électroniques et autres services similaires;
b) " publicité télévisée " toute forme de message télévisé contre rémunération ou paiement similaire par une entreprise publique ou privée dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale ou de profession libérale dans le but de promouvoir la fourniture, contre paiement, de biens ou de services, y compris les biens immeubles, les droits et les obligations
(1) JO n° C 179 du 17. 7. 1986, p. 4
(2) JO n° C 49 du 22. 2. 1988, p. 53 et JO n° C 158 du 26. 6. 1989
(3) JO n° C 232 du 31. 8. 1987, p. 29
Sauf pour les fins visées par l'article 18, cela n'inclut pas les offres directes au public en vue de la vente, de l'achat ou de la location de produits ou en vue de la fourniture de services contre rémunération;