Directive communautaire
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DIRECTIVE DU CONSEIL
du 21 décembre 1988
relative à un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans
(89/48/CEE)
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 49, son article 57 paragraphe 1 et son article 66,
vu la proposition de la Commission (1),
en coopération avec le Parlement européen (2),
vu l'avis du Comité économique et social (3),
considérant que, en vertu de l'article 3 alinéa c) du traité, l'abolition entre les États membres des obstacles à la libre circulation des personnes et des services constitue un des objectifs de la Communauté; que, pour les ressortissants des États membres, elle comporte notamment la faculté d'exercer une profession, à titre indépendant ou salarié, dans un autre État membre que celui où ils ont acquis leurs qualifications professionnelles;
considérant que les dispositions qui ont été adoptées jusqu'à présent par le Conseil, et en vertu desquelles les États membres reconnaissent entre eux et à des fins professionnelles les diplômes d'enseignement supérieur qui sont délivrés sur leur territoire, concernent peu de professions; que le niveau et la durée de la formation qui conditionnait l'accès à ces professions étaient réglementés de façon analogue dans tous les États membres ou ont fait l'objet des harmonisations minimales nécessaires pour instaurer de tels systèmes sectoriels de reconnaissance mutuelle des diplômes;
considérant que, pour répondre rapidement à l'attente des citoyens européens qui possèdent des diplômes d'enseignement supérieur sanctionnant des formations professionnelles et délivrés dans un État membre autre que celui où ils veulent exercer leur profession, il convient de mettre également en oeuvre une autre méthode de reconnaissance de ces diplômes telle qu'elle facilite à ces citoyens l'exercice de toutes les activités professionnelles qui sont subordonnées dans un État membre d'accueil à la possession d'une formation postsecondaire, pour autant qu'ils possèdent de tels diplômes qui les préparent à ces activités, sanctionnent un cycle d'études d'au moins trois ans et aient été délivrés dans un autre État membre;
considérant que pareil résultat peut être atteint par l'instauration d'un système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations professionnelles d'une durée minimale de trois ans;
considérant que, pour les professions pour l'exercice desquelles la Communauté n'a pas déterminé le niveau minimal de qualification nécessaire, les États membres conservent la faculté de fixer ce niveau dans le but de garantir la qualité des prestations fournies sur leur territoire; que, cependant, ils ne peuvent, sans méconnaître leurs obligations inscrites à l'article 5 du traité, imposer à un ressortissant d'un État membre d'acquérir des qualifications qu'ils se bornent généralement à déterminer par référence aux diplômes délivrés dans le cadre de leur système national d'enseignement, alors que l'intéressé a déjà acquis tout ou partie de ces qualifications dans un autre État membre; que, en conséquence, tout État membre d'accueil dans lequel une profession est régle
mentée est tenu de prendre en compte les qualifications acquises dans un autre État membre et d'apprécier si celles-ci correspondent à celles qu'il exige;
considérant qu'une collaboration entre les États membres est propre à leur faciliter le respect de ces obligations; qu'il convient donc d'en organiser les modalités;
considérant qu'il convient de définir notamment la notion d'activité professionnelle réglementée afin de prendre en compte différentes réalités sociologiques nationales; qu'est à considérer comme telle non seulement une activité professionnelle dont l'accès est subordonné dans un État membre à la possession d'un diplôme, mais également celle dont l'accès est libre, lorsqu'elle est exercée sous un titre professionnel réservé à ceux qui remplissent certaines conditions de qualification; que les associations ou organisations professionnelles qui délivrent de tels titres à leurs membres et qui sont reconnues par les pouvoirs publics ne peuvent invoquer leur caractère privé pour se soustraire à l'application du système prévu par la présente directive;
considérant qu'il est également nécessaire de déterminer les caractéristiques de l'expérience professionnelle ou du stage d'adaptation que l'État membre d'accueil peut, en plus du diplôme d'enseignement supérieur, exiger de l'intéressé, lorsque les qualifications de celui-ci ne correspondent pas à celles prescrites par les dispositions nationales;
considérant qu'une épreuve d'aptitude peut également être instaurée à la place du stage d'adaptation; que l'un comme l'autre auront pour effet d'améliorer la situation existant en matière de reconnaissance mutuelle des diplômes entre les États membres et donc de faciliter la libre circulation des personnes à l'intérieur de la Communauté; que leur fonction est d'évaluer l'aptitude du migrant, qui est une personne déjà formée professionnellement dans un autre État membre, à s'adapter à son environnement professionnel nouveau; qu'une épreuve d'aptitude aura l'avantage, du point de vue du migrant, de réduire la durée de la période d'adaptation; que, en principe, le choix entre le stage d'adaptation et l'épreuve d'aptitude doit relever du migrant; que, toutefois, la nature de certaines professions est telle qu'il doit être permis aux États membres d'imposer, sous certaines conditions, soit le stage, soit l'épreuve; que, en particulier, les différences entre les systèmes juridiques des États membres, même si elles sont d'importance variable d'un État membre à l'autre, justifient des dispositions particulières puisque la formation attestée par le diplôme, les certificats ou d'autres titres dans une matière du droit de l'État membre d'origine ne couvre pas, en règle générale, les connaissances juridiques exigées dans l'État membre d'accueil en ce qui concerne le domaine juridique correspondant;
considérant par ailleurs que le système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur n'a pour objet ni de modifier les règles professionnelles, y compris déontologiques, qui sont applicables à toute personne exerçant une profession sur le territoire d'un État membre, ni de soustraire les migrants à l'application de ces règles; qu'il se borne à prévoir des mesures appropriées permettant d'assurer que le migrant se conforme aux règles professionnelles de l'État membre d'accueil;
considérant que l'article 49, l'article 57 paragraphe 1 et l'article 66 du traité attribuent à la Communauté les compétences pour adopter les dispositions nécessaires à l'instauration et au fonctionnement d'un tel système;
considérant que le système général de reconnaissance des diplômes d'enseignement supérieur ne préjuge en rien l'application de l'article 48 paragraphe 4 et de l'article 55 du traité;
considérant qu'un tel système, en renforçant le droit du citoyen européen d'utiliser ses connaissances professionnelles dans tout État membre, vient parfaire et en même temps renforcer son droit d'acquérir de telles connaissances où il le désire;
considérant que ce système doit faire l'objet, après un certain temps d'application, d'une évaluation portant sur l'efficacité de son fonctionnement, pour déterminer notamment dans quelle mesure il peut être amélioré ou son champ d'application élargi,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
Article premier
Aux fins de la présente directive, on entend:
a) par diplôme, tout diplôme, certificat ou autre titre ou tout ensemble de tels diplômes, certificats ou autres titres:
- qui a été délivré par une autorité compétente dans un État membre, désignée conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives de cet État,
- dont il résulte que le titulaire a suivi avec succès un cycle d'études postsecondaires d'une durée minimale de trois ans, ou d'une durée équivalente à temps partiel, dans une université ou un établissement d'enseignement supérieur ou dans un autre établissement du même niveau de formation et, le cas échéant, qu'il a suivi avec succès la formation professionnelle requise en plus du cycle d'études postsecondaires, et
- dont il résulte que le titulaire possède les qualifications professionnelles requises pour accéder à une profession réglementée dans cet État membre ou l'exercer,
dès lors que la formation sanctionnée par ce diplôme, certificat ou autre titre a été acquise dans une mesure prépondérante dans la Communauté, ou dès lors que son titulaire a une expérience professionnelle de trois ans certifiée par l'État membre qui a reconnu un diplôme, certificat ou autre titre délivré dans un pays tiers
Est assimilé à un diplôme au sens du premier alinéa tout diplôme, certificat ou autre titre, ou tout ensemble de tels diplômes, certificats et autres titres, qui a été délivré par une autorité compétente dans un État membre dès lors qu'il sanctionne une formation acquise dans la Communauté et reconnue par une autorité compétente dans cet État membre comme étant de niveau équivalent, et qu'il y confère les mêmes droits d'accès à une profession réglementée ou d'exercice de celle-ci;
b) par État membre d'accueil, l'État membre dans lequel un ressortissant d'un État membre demande à exercer une profession qui y est réglementée, sans y avoir obtenu le diplôme dont il fait état ou y avoir exercé pour la première fois la profession en cause;
c) par profession réglementée, l'activité ou l'ensemble des activités professionnelles réglementées qui constituent cette profession dans un État membre;
d) par activité professionnelle réglementée, une activité professionnelle dont l'accès ou l'exercice, ou une des modalités d'exercice dans un État membre est subordonné, directement ou indirectement par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives, à la possession d'un diplôme. Constituent notamment des modalités d'exercice d'une activité professionnelle réglementée:
- l'exercice d'une activité sous un titre professionnel dans la mesure où le port de ce titre est autorisé aux seuls possesseurs d'un diplôme déterminé par des dispositions législatives, réglementaires ou administratives,
- l'exercice d'une activité professionnelle dans le domaine de la santé dans la mesure où la rémunération et/ou le remboursement de cette activité est subordonné par le régime national de sécurité sociale à la possession d'un diplôme
Lorsque le premier alinéa ne s'applique pas, est assimilée à une activité professionnelle réglementée une activité professionnelle qui est exercée par les membres d'une association ou organisation qui a notamment pour objet de promouvoir et de maintenir un niveau élevé dans le domaine professionnel en cause et qui, pour la réalisation de cet objet, bénéficie d'une reconnaissance sous une forme spécifique par un État membre et
- délivre à ses membres un diplôme,
- les soumet à des règles professionnelles édictées par elle, et
- leur confère le droit de faire état d'un titre, d'une abréviation ou d'une qualité correspondant à ce diplôme
Une liste non exhaustive d'associations ou organisations qui remplissent, au moment de l'adoption de la présente directive, les conditions du deuxième alinéa, figure en annexe. Chaque fois qu'un État membre accorde la reconnaissance visée au deuxième alinéa à une association ou organisation, il en informe la Commission, qui publie cette information au Journal officiel des Communautés européennes;
e) par expérience professionnelle, l'exercice effectif et licite de la profession concernée dans un État membre;
f) par stage d'adaptation, l'exercice d'une profession réglementée qui est effectué dans l'État membre d'accueil sous la responsabilité d'un professionnel qualifié et qui est accompagné éventuellement d'une formation complémentaire. Le stage fait l'objet d'une évaluation. Les modalités du stage et de son évaluation ainsi que le statut du stagiaire migrant sont déterminés par l'autorité compétente de l'État membre d'accueil;
g) par épreuve d'aptitude, un contrôle concernant exclusivement les connaissances professionnelles du demandeur, qui est effectué par les autorités compétentes de l'État membre d'accueil et qui a pour but d'apprécier l'aptitude du demandeur à exercer dans cet État membre une profession réglementée
Pour permettre ce contrôle, les autorités compétentes établissent une liste des matières qui, sur la base d'une comparaison entre la formation requise dans leur État et celle reçue par le demandeur, ne sont pas couvertes par le diplôme ou le ou les titres dont le demandeur fait état
L'épreuve d'aptitude doit prendre en considération le fait que le demandeur est un professionnel qualifié dans l'État membre d'origine ou de provenance. Elle porte sur des matières à choisir parmi celles figurant sur la liste et dont la connaissance est une condition essentielle pour pouvoir exercer la profession dans l'État membre d'accueil. Cette épreuve peut également comprendre la connaissance de la déontologie applicable aux activités concernées dans l'État membre d'accueil. Les modalités de l'épreuve d'aptitude sont déterminées par les autorités compétentes dudit État dans le respect des règles du droit communautaire
Le statut dont jouit dans l'État membre d'accueil le demandeur qui souhaite se préparer à l'épreuve d'aptitude dans cet État est fixé par les autorités compétentes de cet État
Article 2
La présente directive s'applique à tout ressortissant d'un État membre voulant exercer à titre indépendant ou salarié une profession réglementée dans un État membre d'accueil
La présente directive ne s'applique pas aux professions qui font l'objet d'une directive spécifique instaurant entre les États membres une reconnaissance mutuelle des diplômes
(1) JO n° C 217 du 28. 8. 1985, p. 3 et JO n° C 143 du 10. 6. 1986, p. 7
(2) JO n° C 345 du 31. 12. 1985, p. 80 et JO n° C 309 du 5. 12. 1988
(3) JO n° C 75 du 3. 4. 1986, p. 5
Article 3
Lorsque, dans l'État membre d'accueil, l'accès à une profession réglementée ou son exercice est subordonné à la possession d'un diplôme, l'autorité compétente ne peut refuser à un ressortissant d'un État membre, pour défaut de qualification, d'accéder à cette profession ou de l'exercer dans les mêmes conditions que les nationaux:
a) si le demandeur possède le diplôme qui est prescrit par un autre État membre pour accéder à cette même profession sur son territoire ou l'y exercer et qui a été obtenu dans un État membre, ou bien
b) si le demandeur a exercé à plein temps cette profession pendant deux ans au cours des dix années précédentes dans un autre État membre qui ne réglemente pas cette profession au sens de l'article 1er point c) et de l'article 1er point d) premier alinéa en ayant un ou plusieurs titres de formation: