Directive communautaire
DIRECTIVE 93/37/CEE DU CONSEIL
du 14 juin 1993
portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux
LE CONSEIL DES COMMUNAUTÉS EUROPÉENNES,
vu le traité instituant la Communauté économique européenne, et notamment son article 57 paragraphe 2, son article 66 et son article 100 A,
vu la proposition de la Commission(1) ,
en coopération avec le Parlement européen(2) ,
vu l'avis du Comité économique et social(3) ,
considérant que la directive 71/305/CEE du Conseil, du 26 juillet 1971, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux(4) , a été modifiée à plusieurs reprises et de façon substantielle; qu'il convient, dans un souci de clarté et de rationalité, de procéder à la codification de ladite directive;
considérant que la réalisation simultanée de la liberté d'établissement et de la libre prestation de services en matière de marchés publics de travaux, conclus dans les États membres pour le compte de l'État, des collectivités territoriales et d'autres organismes de droit public, comporte, parallèlement à l'élimination des restrictions, une coordination des procédures nationales de passation des marchés publics de travaux;
considérant que cette coordination doit respecter, dans toute la mesure du possible, les procédures et les pratiques en vigueur dans chacun des États membres;
considérant que la présente directive ne s'applique pas à certains marchés de travaux qui sont passés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications couverts par la directive 90/531/CEE;
considérant que, compte tenu de l'importance croissante des concessions dans les travaux publics et de leur nature spécifique, il est opportun d'inclure dans la présente directive des règles de publicité en la matière;
considérant que les marchés de travaux inférieurs à 5 000 000 d'écus peuvent être laissés en dehors de la concurrence telle qu'elle est organisée par la présente directive et qu'il convient de prévoir que les mesures de coordination ne doivent pas leur être appliquées;
considérant qu'il importe de prévoir des cas exceptionnels dans lesquels les mesures de coordination des procédures peuvent ne pas être appliquées, mais qu'il importe aussi de limiter ces cas expressément;
considérant que la procédure négociée doit être considérée comme exceptionnelle et qu'elle ne doit donc être appliquée que dans ces cas limitativement énumérés;
considérant qu'il importe de prévoir des règles communes dans le domaine technique qui tiennent compte de la politique communautaire en matière de normalisation et de standardisation;
considérant que le développement d'une concurrence effective dans le domaine des marchés publics nécessite une publicité communautaire des avis de marchés établis par les pouvoirs adjudicateurs des États membres; que les informations contenues dans ces avis doivent permettre aux entrepreneurs de la Communauté d'apprécier si les marchés proposés les intéressent; que, à cet effet, il convient de leur donner une connaissance suffisante des prestations à fournir et des conditions dont elles sont assorties; que, plus spécialement dans les procédures restreintes, la publicité a pour but de permettre aux entrepreneurs des États membres de manifester leur intérêt aux marchés en sollicitant des pouvoirs adjudicateurs une invitation à soumissionner dans les conditions requises;
considérant que les informations supplémentaires concernant les marchés doivent figurer, comme il est d'usage dans les États membres, dans le cahier des charges relatif à chaque marché ou dans tout document équivalent;
considérant qu'il convient de prévoir des règles communes de participation aux marchés publics de travaux, comprenant des critères de sélection qualitative et des critères d'attribution du marché;
considérant qu'il est opportun de permettre que certaines conditions techniques relatives aux avis et rapports statistiques requis par la présente directive puissent être adaptées en fonction de l'évolution des besoins techniques; que l'annexe II de la présente directive fait référence à la nomenclature générale des activités économiques dans les Communautés européennes (NACE); que la Communauté peut, en tant que de besoin, réviser ou remplacer sa nomenclature commune et qu'il est nécessaire de prendre des dispositions pour permettre d'adapter en conséquence les références faites à la nomenclature NACE dans ladite annexe II;
considérant que la présente directive ne devrait pas porter atteinte aux obligations des États membres concernant les délais de transposition et d'application indiqués à l'annexe VII,
A ARRÊTÉ LA PRÉSENTE DIRECTIVE:
TITRE PREMIER DISPOSITIONS GÉNÉRALES
Article premier
Aux fins de la présente directive:
a) les "marchés publics de travaux" sont des contrats à titre onéreux, conclus par écrit entre, d'une part, un entrepreneur et, d'autre part, un pouvoir adjudicateur défini au point b) et ayant pour objet soit l'exécution, soit conjointement l'exécution et la conception des travaux relatifs à une des activités visées à l'annexe II ou d'un ouvrage défini au point c), soit la réalisation, par quelque moyen que ce soit, d'un ouvrage répondant aux besoins précisés par le pouvoir adjudicateur;
b) sont considérés comme "pouvoirs adjudicateurs", l'État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public et les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou de ces organismes de droit public.
On entend par "organisme de droit public" tout organisme:
- créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial
et
- doté de la personnalité juridique
et
- dont soit l'activité est financée majoritairement par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public, soit la gestion est soumise à un contrôle par ces derniers, soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié est désignée par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public.
Les listes des organismes et des catégories d'organismes de droit public qui remplissent les critères énumérés au deuxième alinéa du présent point figurent à l'annexe I. Ces listes sont aussi complètes que possible et peuvent être révisées selon la procédure prévue à l'article 35. À cet effet, les États membres notifient périodiquement à la Commission les modifications intervenues dans leurs dites listes;
c) on entend par "ouvrage" le résultat d'un ensemble de travaux de bâtiment ou de génie civil destiné à remplir par lui-même une fonction économique ou technique;
d) la "concession de travaux publics" est un contrat présentant les mêmes caractères que ceux visés au point a), à l'exception du fait que la contrepartie des travaux consiste soit uniquement dans le droit d'exploiter l'ouvrage, soit dans ce droit assorti d'un prix;
e) les "procédures ouvertes" sont les procédures nationales dans lesquelles tout entrepreneur intéressé peut présenter une offre;
f) les "procédures restreintes" sont les procédures nationales dans lesquelles seuls les entrepreneurs invités par les pouvoirs adjudicateurs peuvent présenter une offre;
g) les "procédures négociées" sont les procédures nationales dans lesquelles les pouvoirs adjudicateurs consultent les entrepreneurs de leur choix et négocient les conditions du marché avec un ou plusieurs d'entre eux;
h) l'entrepreneur qui a présenté une offre est désigné par le mot "soumissionnaire"; celui qui a sollicité une invitation à participer à une procédure restreinte ou à une procédure négociée est désigné par le mot "candidat".
Article 2
1. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les pouvoirs adjudicateurs respectent ou fassent respecter les dispositions de la présente directive lorsqu'ils subventionnent directement à plus de 50 % un marché de travaux passé par une entité autre qu'eux-mêmes.
2. Le paragraphe 1 ne concerne que les marchés figurant dans la classe 50 groupe 502 de la nomenclature générale des activités économiques dans les Communautés européennes (NACE) et les marchés qui portent sur les travaux de bâtiment relatifs aux hôpitaux, aux équipements sportifs, récréatifs et de loisirs, aux bâtiments scolaires et universitaires et aux bâtiments à usage administratif.
Article 3
1. Dans le cas où les pouvoirs adjudicateurs concluent un contrat de concession de travaux publics, les règles de publicité définies à l'article 11 paragraphes 3, 6, 7 et 9 à 13 et à l'article 15 sont applicables à ce contrat lorsque sa valeur égale ou dépasse 5 000 000 d'écus.
2. Le pouvoir adjudicateur peut:
- soit imposer au concessionnaire de travaux publics de confier à des tiers des marchés représentant un pourcentage minimal de 30 % de la valeur globale de travaux faisant l'objet de la concession de travaux, tout en prévoyant la faculté pour les candidats de majorer ce pourcentage. Ce pourcentage minimal doit être indiqué dans le contrat de concession de travaux,
- soit inviter les candidats concessionnaires à indiquer eux-mêmes, dans leurs offres, le pourcentage, lorsqu'il existe, de la valeur globale des travaux faisant l'objet de la concession qu'ils comptent confier à des tiers.
3. Lorsque le concessionnaire est lui-même un des pouvoirs adjudicateurs visés à l'article 1er point b), il est tenu, pour les travaux à exécuter par des tiers, de respecter les dispositions de la présente directive.
4. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour que les concessionnaires de travaux publics autres que les pouvoirs adjudicateurs appliquent les règles de publicité définies à l'article 11 paragraphes 4, 6, 7 et 9 à 13 et à l'article 16 dans la passation des marchés de travaux avec des tiers lorsque la valeur de ces marchés égale ou dépasse 5 000 000 d'écus. Une publicité n'est cependant pas requise lorsqu'un marché de travaux remplit les conditions d'application des cas énumérés à l'article 7 paragraphe 3.
Ne sont pas considérées comme tierces les entreprises qui se sont groupées pour obtenir la concession ni les entreprises qui leur sont liées.
On entend par "entreprise liée" toute entreprise sur laquelle le concessionnaire peut exercer, directement ou indirectement, une influence dominante, ou toute entreprise qui peut exercer une influence dominante sur le concessionnaire ou qui, comme le concessionnaire, est soumise à l'influence dominante d'une autre entreprise du fait de la propriété, de la participation financière ou des règles qui la régissent. L'influence dominante est présumée lorsqu'une entreprise, directement ou indirectement, à l'égard d'une autre entreprise:
- détient la majorité du capital souscrit de l'entreprise
ou
- dispose de la majorité des voix attachées aux parts émises par l'entreprise
ou
- peut désigner plus de la moitié des membres de l'organe d'administration, de direction ou de surveillance de l'entreprise.
La liste limitative de ces entreprises est jointe à la candidature à la concession. Cette liste est mise à jour en fonction des modifications qui interviennent ultérieurement dans les liaisons entre les entreprises.
Article 4
La présente directive ne s'applique pas:
a) aux marchés qui sont passés dans les domaines mentionnés aux articles 2, 7, 8 et 9 de la directive 90/531/CEE ni aux marchés qui répondent aux conditions de l'article 6 paragraphe 2 de ladite directive;
b) aux marchés de travaux lorsqu'ils sont déclarés secrets ou lorsque leur exécution doit s'accompagner de mesures particulières de sécurité, conformément aux dispositions législatives, réglementaires ou administratives en vigueur dans l'État membre considéré, ou lorsque la protection des intérêts essentiels de l'État membre l'exige.
Article 5
La présente directive ne s'applique pas aux marchés publics régis par des règles de procédure différentes et passés en vertu:
a) d'un accord international, conclu en conformité avec le traité, entre un État membre et un ou plusieurs pays tiers et portant sur des travaux destinés à la réalisation ou à l'exploitation en commun d'un ouvrage par les États signataires; tout accord est communiqué à la Commission, qui peut procéder à une consultation au sein du comité consultatif pour les marchés publics, institué par la décision 71/306/CEE(5) ;
b) d'un accord international conclu en relation avec le stationnement de troupes et concernant des entreprises d'un État membre ou d'un pays tiers;
c) de la procédure spécifique d'une organisation internationale.
Article 6
1. La présente directive s'applique aux marchés publics de travaux dont le montant estimé hors TVA égale ou dépasse 5 000 000 d'écus.
2.a) La contre-valeur du seuil en monnaies nationales est en principe révisée tous les deux ans avec effet au 1er janvier 1992. Le calcul de cette contre-valeur est basé sur la moyenne des valeurs quotidiennes de ces monnaies, exprimées en écus, durant les vingt-quatre mois qui se terminent le dernier jour du mois d'août qui précède la révision ayant effet le 1er janvier. Ces contre-valeurs sont publiées au Journal officiel des Communautés européennes dès les premiers jours de novembre.
b) La méthode de calcul prévue au point a) est réexaminée, sur proposition de la Commission, par le comité consultatif pour les marchés publics, en principe deux ans après sa première application.
3. Lorsqu'un ouvrage est réparti en plusieurs lots faisant chacun l'objet d'un marché, la valeur de chaque lot doit être prise en compte pour l'évaluation du montant indiqué au paragraphe 1. Lorsque la valeur cumulée des lots égale ou dépasse le montant indiqué au paragraphe 1, les dispositions de ce paragraphe s'appliquent à tous les lots. Toutefois, les pouvoirs adjudicateurs peuvent déroger à l'application du paragraphe 1 pour des lots dont la valeur estimée hors TVA est inférieure à 1 000 000 d'écus, pour autant que le montant cumulé de ces lots n'excède pas 20 % de la valeur cumulée des lots.
4. Aucun ouvrage ni aucun marché ne peut être scindé en vue d'être soustrait à l'application de la présente directive.
5. Pour le calcul du montant visé au paragraphe 1 ainsi qu'à l'article 7, est prise en considération, outre celle des montants des marchés publics de travaux, la valeur estimée des fournitures nécessaires à l'exécution des travaux et mises à la disposition de l'entrepreneur par les pouvoirs adjudicateurs.
Article 7
1. Pour passer leurs marchés publics de travaux, les pouvoirs adjudicateurs appliquent les procédures définies à l'article 1er points e), f) et g), adaptées à la présente directive.