ARRÊT N° 1
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que, le 14 mars 1996, à 8 heures du matin, Loïc X..., ingénieur salarié de la société Framatome, qui se trouvait en mission à Zizong (République populaire de Chine), a été victime dans sa chambre d'hôtel d'une hémorragie cérébrale dont il est décédé le 18 mars 1996 à l'hôpital local ; que la caisse primaire d'assurance maladie a refusé la prise en charge de ce décès au titre de la législation professionnelle ; que la cour d'appel (Dijon, 19 octobre 1999) a fait droit au recours de Mme X... ;
Attendu que la société Framatome fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1o que le salarié en mission bénéficie de la présomption d'imputabilité de l'accident du travail sauf à démontrer que l'accident est survenu à un moment et en un lieu où le salarié, recouvrant son indépendance, n'était plus sous les instructions de l'employeur ; qu'en l'espèce, il ressortait du rapport d'enquête établi par la caisse primaire d'assurance maladie le 4 décembre 1996 que Loïc X... avait été retrouvé inanimé dans la salle de bains de sa chambre d'hôtel à 8 heures du matin ; que ce rapport d'enquête mentionnait que le salarié disposait d'un local situé dans l'usine chinoise pour y effectuer son travail ; que, dans ses conclusions d'appel, la société Framatome faisait valoir que, s'agissant de la troisième mission consécutive de Loïc X... au cours de l'année à Zizong en Chine, l'ensemble du travail de préparation était déjà effectué, de sorte que Loïc X... n'avait aucun travail à effectuer dans sa chambre d'hôtel ; qu'en se contentant dès lors d'affirmer, pour juger que Loïc X... se trouvait dans l'exercice de sa mission lors de la survenance de son accident, que la nature de la mission du salarié le contraignait à travailler dans sa chambre d'hôtel pour préparer ses interventions, sans nullement justifier par des éléments de fait et de preuve précis et concrets cette constatation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale ;
2o que le salarié en mission qui prend son petit déjeuner et retourne dans sa salle de bains avant de se rendre sur son lieu de travail a interrompu sa mission par une activité purement personnelle et ne se trouve plus sous la subordination de son employeur ; qu'en l'espèce, il résultait des pièces versées aux débats que l'accident était survenu dans la salle de bains de Loïc X... après qu'il ait pris son petit déjeuner ; qu'en affirmant dès lors que le salarié se trouvait dans l'exercice de sa mission, sans rechercher si celle-ci n'avait pas été interrompue par la prise par le salarié de son petit déjeuner et son activité dans la salle de bains de sa chambre d'hôtel, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale ;
3o qu'en affirmant péremptoirement, pour conforter sa décision, que l'état d'hypertension à l'origine de l'accident était nécessairement lié aux conditions d'exécution de la mission en Chine et, dès lors, avait un lien avec l'activité professionnelle, sans nullement préciser sur quels éléments de fait et de preuve elle se fondait pour parvenir à une telle affirmation, la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que le salarié effectuant une mission a droit à la protection prévue par l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale pendant tout le temps de la mission qu'il accomplit pour son employeur, peu important que l'accident survienne à l'occasion d'un acte professionnel ou d'un acte de la vie courante, sauf la possibilité pour l'employeur ou la Caisse de rapporter la preuve que le salarié avait interrompu sa mission pour un motif personnel ;
Et attendu qu'en estimant, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de fait qui lui étaient soumis, que la société Framatome ne rapportait pas la preuve qu'au moment de son accident, Loïc X... avait interrompu sa mission pour un motif personnel ni que la lésion dont il est décédé avait une cause totalement étrangère au travail, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi .