ARRÊT N° 1
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 juin 1997), que Mme X... a donné naissance, le 31 octobre 1989, à une fille atteinte d'un spina-bifida entraînant de graves séquelles ; que les époux X... ont engagé une action en réparation du préjudice subi par leur fille contre MM. Y... et Z..., médecins gynécologues consultés par Mme X... pendant le cours de sa grossesse, auxquels ils reprochaient d'avoir commis des fautes dans la pratique et l'interprétation d'échographies réalisées après la dixième semaine de la grossesse qui n'avaient pas permis de déceler les anomalies ;
Attendu que les époux X... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté cette demande, alors, selon le moyen :
1° que le débiteur peut être condamné au paiement de dommages-intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation ; que la cour d'appel, qui a relevé la faute des praticiens, qui, par leur absence de diagnostic du spina-bifida, ont privé les parents de la faculté d'envisager la possibilité d'une interruption volontaire de grossesse thérapeutique et qui a cependant refusé d'indemniser le préjudice subi par l'enfant qui a, avant sa naissance, été privée des choix dont ses parents devaient disposer pour elle, a ainsi violé les articles 1137 et 1147 du Code civil ;
2° que l'enfant peut être indemnisée, lorsqu'en raison d'une faute des médecins découlant de leur obligation d'information, il était possible d'éviter, par un refus du projet parental, les conséquences de cette naissance ; qu'en reconnaissant que les praticiens ont privé les parents de la possibilité d'envisager une interruption de grossesse thérapeutique, tout en rejetant l'action de l'enfant, car il n'est pas certain que l'interruption de grossesse eût été autorisée, sans rechercher si l'enfant, en raison de la faute des médecins, n'avait pas perdu la chance que cette autorisation fût obtenue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1137 et 1147 du Code civil ;
Mais attendu que l'enfant né handicapé peut demander la réparation du préjudice résultant de son handicap si ce dernier est en relation de causalité directe avec les fautes commises par le médecin dans l'exécution du contrat formé avec sa mère et qui ont empêché celle-ci d'exercer son choix d'interrompre sa grossesse ; que, dans le cas d'une interruption pour motif thérapeutique, il doit être établi que les conditions médicales prescrites par l'article L. 2213-1 du Code de la santé publique étaient réunies ; qu'ayant constaté qu'il n'en avait pas été ainsi, la cour d'appel a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.
MOYEN ANNEXÉ
Moyen produit par M. Roger, avocat aux Conseils pour les époux X...
MOYEN UNIQUE DE CASSATION :
Le pourvoi fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir débouté les époux X... ès qualités d'administrateurs légaux de leur enfant mineure de leur demande d'indemnisation du préjudice corporel de Jessica ;
AUX MOTIFS QUE il est établi en l'espèce que les conditions défectueuses dans lesquelles ont été réalisés les examens échographiques pendant la grossesse de Mme X... n'ont pas permis de déceler [le spina-bifida avec atteinte de la motricité des membres inférieurs et béance du sphincter anal qui a entraîné, malgré de nombreuses opérations que l'enfant Jessica reste atteinte d'une paraplégie complète des membres inférieurs, d'une hydrocéphalite, d'une incontinence sphinctérienne anale avec vessie neurologique secondaire à la paraplégie] ; que les médecins par leur carence, ont fait perdre aux époux X... même si statistiquement cette possibilité n'était que de 40 à 50 % toute chance de voir déceler la grave malformation dont était atteinte Jessica ;
Que certes les praticiens par leur absence de diagnostic du spina-bifida, ont privé les parents de la possibilité d'envisager une interruption volontaire de grossesse thérapeutique ; que M... et Mme X... pouvaient, s'ils avaient appris le spina-bifida dont était atteint l'enfant, malformation majeure, demander une interruption volontaire de grossesse pour motif thérapeutique sur le fondement de l'article L. 662-12 du Code de la santé publique, mais que le jugement doit être réformé en ce qu'il a accordé aux époux X..., ès qualités d'administrateurs légaux de leur enfant mineur, une indemnisation du préjudice corporel sur le fondement d'une perte de chance, le dommage corporel subi par Jessica n'ayant pas de lien de causalité direct avec les fautes commises par les médecins dans les actes médicaux de suivi de la grossesse ;
ALORS QUE le débiteur peut être condamné au paiement de dommages-intérêts à raison de l'inexécution de l'obligation ; que la cour d'appel qui a relevé la faute des praticiens, qui, par leur absence de diagnostic du spina-bifida ont privé les parents de la faculté d'envisager la possibilité d'une interruption volontaire de grossesse thérapeutique et qui a cependant refusé d'indemniser le préjudice subi par l'enfant Jessica qui a, avant sa naissance été privée des choix dont ses parents devaient disposer pour elle, a ainsi violé les articles 1137 et 1147 du Code civil ;
ET AUX MOTIFS QUE certes les praticiens par leur absence de diagnostic du spina-bifida ont privé les parents de la possibilité d'envisager une interruption volontaire de grossesse thérapeutique ; que M. et Mme X... pouvaient, s'ils avaient appris le spina-bifida dont était atteint l'enfant, malformation majeure, demander une interruption volontaire de grossesse pour motif thérapeutique sur le fondement de l'article L. 662-12 du Code de la santé publique, que cependant, il n'est pas certain que l'interruption de grossesse eût été autorisée surtout si le diagnostic du spina-bifida avait été fait à la trente-cinquième semaine du terme ;
ALORS QUE l'enfant peut être indemnisée lorsqu'en raison d'une faute des médecins découlant de leur obligation d'information, il était possible d'éviter, par un refus de projet parental, les conséquences de cette naissance ; qu'en reconnaissant que les praticiens ont privé les parents de la possibilité d'envisager une interruption de grossesse thérapeutique, tout en rejetant l'action de l'enfant, car il n'est pas certain que l'interruption de grossesse eût été autorisée, sans rechercher si l'enfant en raison de la faute des médecins n'avait pas perdu la chance que cette autorisation fut obtenue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1137 et 1147 du Code civil .