CIV. 2
COUR DE CASSATION
Audience publique du 9 novembre 2000
M. BUFFET, président
Pourvoi n° C 98-22.865
Aides juridictionnelles totales en demande au profit de MM. ... et Z Z. Admissions du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de Cassation en date du 8 décembre 1998.
Irrecevabilité et Rejet
Arrêt n° 1130 F P+B
RÉPUBLIQUE FRANÇAIS
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par
1°/ M. Charles Z, demeurant Reims,
2°/ M. Robert Z, demeurant Reims,
3°/ M. Y, domicilié Créteil l'Echat, agissant en sa qualité de liquidateur de la liquidation judiciare de M. Robert Z,
en cassation d'un arrêt rendu le 24 septembre 1997 par la cour d'appel de Reims (Chambre civile, Ire section), au profit de la société anonyme Sofinabail, dont le siège est Paris,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 4 octobre 2000, où étaient présents M. Buffet, président, M. Etienne, conseiller rapporteur, M. Séné, conseiller, M. Kessous, avocat général, Mme Laumône, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Etienne, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de MM. ... et Z Z et de M. Y, ès qualités, de la SCP Baraduc et Duhamel, avocat de la société Sofinabail, les conclusions de M. Kessous, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 24 septembre 1997), que statuant dans une instance opposant la société Sofinabail (la société) à MM. Z et Z Z, qui s'étaient portés cautions solidaires des engagements d'une société en liquidation judiciaire, un arrêt du 20 mars 1996, retenant qu'il n'y avait pas lieu à révocation de l'ordonnance de clôture, a constaté l'extinction de la créance de la société à l'égard de M. Robert Z, et avant dire droit sur la demande de la société à l'égard de M. Charles Z, a ordonné la réouverture des débats et renvoyé l'affaire à une audience ultérieure en invitant les parties à fournir leurs explications sur l'admission de la créance au passif de la liquidation judiciaire, que l'arrêt attaqué, statuant au vu des conclusions déposées sur cette injonction, a déclaré irrecevable la demande incidente de dommages-intérêts formée par M. Charles Z contre la société ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé par M. Robert Z et M. Y, contestée par la défense ;
Attendu que M. Robert Z et M. Y, qui se sont pourvus en cassation par le même acte que M. Charles Z, sont sans intérêt à critiquer l'arrêt qui, ayant statué sur la demande de dommages-intérêts formée par M. Charles Z seul, ne leur fait pas grief ;
Sur le moyen unique du pourvoi formé par M. Charles Z
Attendu que M. Charles Z fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré sa prétention irrecevable, alors, selon le moyen, que les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; qu'en l'espèce, M. Z n'a appris l'existence des quittances subrogatives établies les 19 octobre 1990 et 13 avril 1993 par la société Sofinabail au profit de la Société générale qu'au cours de la procédure d'appel, ce qui résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué ; que la seconde de ces quittances, établie le 13 avril 1993 pour un montant de 1 573 392,94 francs, était d'ailleurs postérieure au jugement entrepris, rendu le 14 janvier 1992 ; que la demande de dommages-intérêts formulée pour la première fois en cause d'appel par M. Charles Z était donc justifiée par l'évolution du litige à hauteur d'appel, et qu'en statuant comme comme elle l'a fait pour la déclarer irrecevable, la cour d'appel a violé l'article 564 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que la réouverture des débats n'emportant pas la révocation de l'ordonnance de clôture lorsqu'elle est ordonnée en application des dispositions de l'article 444 du nouveau Code de procédure civile pour permettre aux parties de conclure sur une question précisée, c'est à bon droit que la cour d'appel, qui a relevé que la demande incidente de dommages-intérêts était postérieure à l'arrêt par lequel elle avait ordonné la réouverture des débats afin que les parties concluent uniquement sur le montant de la créance de la société, a déclaré cette demande nouvelle irrecevable,
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS
Déclare IRRECEVABLE le pourvoi formé par M. Robert Z et M. Y, ès qualités ;
REJETTE le pourvoi formé par M. Charles Z ;
Condamne MM. ... et Z Z et M. Y, ès qualités aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de MM. ... et Z Z et M. Y, ès qualités ; condamne M. Charles Z à payer à la société Sofinabail la somme de 12 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille.
Moyen produit par Me Balat, avocat aux Conseils pour MM. ... et Z Z et M. Y, ès qualités.
MOYEN ANNEXE à l'arrêt n°1130 (CIV 2)
DISCUSSION
MOYEN UNIQUE DE CASSATION
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande incidente de dommages et intérêts formée par Monsieur Charles Z, tendant à la condamnation de la Société SOFINABAIL au paiement d'une somme de 10.000.000 F ;
AUX MOTIFS QUE la demande reconventionnelle en dommages et intérêts sera déclarée irrecevable par application de l'article 564 du nouveau Code de procédure civile ; que cette demande nouvelle, au surplus postérieure à un arrêt ordonnant une réouverture des débats limitée à la détermination du quantum de la créance, ne tend manifestement pas à une compensation avec les sommes réclamées, contestées dans leur totalité, puisqu'elle vise à la réparation du préjudice subi du fait de manoeuvres prétendues frauduleuses dans le cadre de la procédure ; qu'elle n'est pas plus justifiée par l'évolution du litige, à savoir la révélation prétendument tardive de l'existence de quittances subrogatives, dès lors qu'il est acquis aux débats au moins depuis l'origine de la procédure devant la cour, que la Société SOFINABAIL ne prétend qu'à une partie de la créance résultant de la résiliation des contrats, précisément en raison des paiements effectués par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE en sa qualité de caution ; qu'elle sera en conséquence déclarée irrecevable, étant au surplus observé qu'elle tend, pour partie, à la réparation du préjudice qui aurait été subi par Monsieur Robert Z ;
ALORS QUE les parties ne peuvent soumettre à la cour d'appel de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait ; qu'en l'espèce, Monsieur Z n'a appris l'existence des quittances subrogatives établies les 19 octobre 1990 et 13 avril 1993 par la Société SOFINABAIL au profit de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE qu'au cours de la procédure d'appel, ce qui résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué ; que la seconde de ces quittances, établies le 13 avril 1993 pour un montant de 1.573 392,94 F, était d' ailleurs postérieure au jugement entrepris,rendu le 14 janvier 1992 ; que la demande de dommages et intérêts formulée pour la première fois en cause d'appel par Monsieur Charles Z était donc justifiée par l'évolution du litige à hauteur d'appel, et qu'en statuant comme elle l'a fait pour la déclarer irrecevable, la cour d'appel a violé l'article 564 du nouveau Code de procédure civile.