ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Commerciale
09 Février 1999
Pourvoi N° 97-10.907
Directeur général des Impôts
contre
société Les Adhésifset insonorisants modernes.
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de grande instance de Nevers, 21 novembre 1996), que le représentant légal de la société anonyme Les Adhésifs et insonorisants modernes (société SAIM), a signé le 26 mai 1989 avec le mandataire de la totalité des associés de la SARL Caourep un " protocole " par lequel ces derniers promettaient de lui céder pour un prix déterminé la totalité de leurs parts, promesse acceptée par la société Saim, sous réserve de la levée de plusieurs conditions suspensives stipulées dans le même acte, et particulièrement la transformation de la société à responsabilité limitée en société anonyme ; que cet acte fut suivi de deux autres, des 19 février et 16 mai 1990, intitulés " modalités d'exécution du protocole du 26 mai 1989 " ; que, le 21 mai 1990, l'assemblée générale extraordinaire de la société Caourep votait la transformation de la SARL en SA, et que les cessions d'actions étaient formalisées à la fin du même mois ; qu'à la suite d'une vérification de comptabilité, l'administration des Impôts notifiait un redressement tendant à soumettre l'opération aux droits de mutation calculés au taux de 4,80 %, applicable aux cessions de parts de SARL ; que la société Saim a demandé l'annulation de l'avis de mise en recouvrement des sommes résultant de ce redressement et que le Tribunal a accueilli cette demande ;
Attendu que le directeur général des Impôts reproche au jugement d'avoir ainsi statué alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résulte de l'article 7262 du Code général des impôts, que les cessions de droits sociaux sont soumises à un droit d'enregistrement dont le taux est fixé à 4,80 % pour les cessions de parts sociales dans les sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions ; que l'acte du 16 mai 1990, porte expressément cession des parts sociales de la SARL Caourep pour un prix convenu de 16 184 136,37 francs avec versement immédiat d'un acompte de 4 545 280,48 francs ; que cet acte constate donc l'accord, sur la chose et sur le prix, des parties à la convention ; qu'ainsi, en considérant que ledit acte ne pouvait à lui seul servir d'assiette à la perception de l'impôt, le Tribunal a violé les dispositions de l'article susvisé ; alors, d'autre part, qu'aux termes de l'acte du 16 mai 1990, les parties avaient convenu du prix de la cession, du versement immédiat d'un acompte et de la transformation de la société Caourep en société anonyme ; qu'en se bornant à constater que la transformation convenue n'était pas réalisée à la date de l'acte et qu'elle dépendait de la décision de l'assemblée générale de la société Caourep, pour en déduire que la cession elle-même était subordonnée à ladite transformation, le Tribunal a privé sa décision de base légale au regard des articles 1181 du Code civil et 7262 du Code général des impôts ; et alors, enfin, qu'il résulte de l'acte du 16 mai 1990, dont les juges ont reproduit les termes clairs et précis, que l'accord des parties sur la chose et sur le prix était ferme et définitif dès cette date ;
que la transformation de la société Caourep n'était pas " voulue " par l'acte mais seulement mentionnée dans cet acte pour expliciter les conditions de paiement du prix, lui-même déterminé en fonction des modalités de financement de la recapitalisation de la société Caourep arrêtées par le protocole d'accord du 26 mai 1989 et l'acte du 19 février 1990 ; qu'ainsi, en décidant que cet acte était affecté d'une condition suspensive, le Tribunal a violé l'article 1134 du Code civil en dénaturant la convention du 16 mai 1990 ;
Mais attendu qu'ayant apprécié l'intention des parties, telle qu'elle résultait du contenu de leurs conventions, le Tribunal a retenu qu'en l'espèce l'exécution de l'accord du 16 mai 1990 était subordonnée à la transformation préalable de la société à responsabilité limitée en société anonyme, transformation qui, alors non réalisée, présentait le caractère d'un événement futur et incertain ; que c'est donc hors toute dénaturation, qu'il a décidé que la clause litigieuse s'analysait en une condition suspensive ;
que le moyen n'est fondé en aucune de ses trois branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.