Cour de Cassation
Chambre civile 3
Audience publique du 8 Juillet 1998
Rejet.
N° de pourvoi 96-21.629
Président M. Beauvois .
Demandeur Société de l'avenue Auguste ...
Défendeur syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Sainte-Luce
Rapporteur M. ....
Avocat général M. Sodini.
Avocats MM ..., ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le premier moyen
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 septembre 1996), que l'assemblée générale des copropriétaires d'un immeuble ayant adopté, le 27 novembre 1990, une décision approuvant les comptes sous réserve que le coût de réfection des cages d'escalier soit réparti en charges générales, et non en charges d'ascenseurs, la société civile immobilière de l'avenue Auguste Renoir (SCI), propriétaire des lots 1, 4, 5 et 93 constituant une grande surface commerciale ne comportant pas de tantièmes de répartition au titre des charges d'ascenseur auxquelles étaient assimilées les charges d'escalier, a assigné le syndicat des copropriétaires en annulation de cette décision ; que celui-ci a reconventionnellement demandé que soient réputées non écrites les répartitions conventionnelles des dépenses relatives aux façades et escaliers, telles que figurant au règlement de copropriété ;
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de constater l'inexistence des clauses du règlement exonérant les lots 1, 4, 5 et 93 des charges d'entretien et de réparation des entrées et cages d'escalier, et de juger que ces lots doivent participer au prorata de leurs tantièmes, aux charges de réparation et de conservation des escaliers sauf à celles de simple entretien de propreté ; alors, selon le moyen, qu'il résulte des articles 10, alinéa 2, et 24, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 et de l'article 1er, alinéa 3, du décret du 17 mars 1967, que le règlement de copropriété peut mettre à la charge de certains copropriétaires les dépenses d'entretien d'une partie de l'immeuble et donc exonérer les autres copropriétaires de ces mêmes dépenses ; que, dès lors, en considérant que devaient être déclarées non écrites les clauses du règlement de copropriété, exonérant la SCI des charges relatives à l'entretien et à la conservation des escaliers, au seul motif qu'ils sont des parties communes aux charges relatives à la conservation, et à l'entretien desquelles les copropriétaires sont tenus proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, sans rechercher si, comme le faisait valoir ladite SCI, les lots dont elle est propriétaire ne sont pas dépourvus d'accès auxdits escaliers, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
Mais attendu, qu'ayant relevé par motifs propres et adoptés que la réfection des murs et parterres composant les cages d'escalier, était effectivement une dépense permettant d'assurer la conservation des parties communes, la cour d'appel, sans avoir à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante a légalement justifié sa décision de ce chef, en retenant que les copropriétaires sont tenus au paiement des charges relatives à la conservation et à l'entretien de l'immeuble proportionnellement aux valeurs relatives des parties privatives comprises dans leurs lots, et que la clause du règlement de copropriété qui exonère la SCI de sa contribution devait être réputée non écrite ;
Sur le second moyen
Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de constater l'inexistence des clauses du règlement de copropriété, qui exonèrent les locaux du sous-sol et du rez-de-chaussée des charges de ravalement et de juger que ces lots devront participer aux frais de ravalement, alors, selon le moyen ; 1° qu'il résulte des articles 10, alinéa 2, et 24, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 et de l'article 1er, alinéa 3, du décret du 17 mars 1967, que le règlement de copropriété peut mettre à la charge de certains copropriétaires seulement les dépenses d'entretien d'une partie de l'immeuble ; que, dès lors, en affirmant que les dispositions de l'article 24, alinéa 2, de la loi susvisée ne permettent pas d'apporter une dérogation aux dispositions d'ordre public de l'article 10, alinéa 2, de la même loi relatives à la répartition des charges, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; 2° qu'en énonçant que le paragraphe du règlement de copropriété relatif aux ornements de façades, ne permet pas de déduire que ledit règlement classe parmi les parties privatives, les façades des lots à usage commercial appartenant à la SCI, la cour d'appel s'est prononcée par un motif ambigu qui ne permet pas de savoir si elle a statué en fait ou en droit, privant ainsi sa décision de base légale au regard des articles 2, 10, alinéa 2, et 24, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 et de l'article 1er, alinéa 3, du décret du 17 mars 1967, ensemble l'article 1134 du Code civil ; 3° que, si la cour d'appel est regardée comme ayant statué en droit, elle a alors violé l'article 1134 du Code civil, en dénaturant le règlement de copropriété qui, faisant la loi des parties, stipule que les ornements extérieurs des façades sont des parties communes, mais précise expressément, " en ce qui concerne les boutiques et magasins, à l'exception de leurs devantures et vitrines ou de leurs accessoires ", ce qui revient à classer les devantures et vitrines des boutiques et magasins, dans les parties privées ; 4° que la SCI faisait valoir dans ses conclusions, que la devanture de son magasin, étant constituée essentiellement de glaces occupant toute sa longueur ainsi qu'il résultait d'un constat d'huissier de justice versé aux débats, ne pouvait être qu'une partie privative en application même du règlement de copropriété ; que, dès lors, si elle a statué en fait, la cour d'appel devait rechercher, comme elle y était invitée, si cette circonstance n'était pas de nature à classer la devanture dans les parties privatives ; qu'en s'en abstenant, elle a privé sa décision de base légale au regard de l'article 10, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, ensemble l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé qu'étaient considérées par le règlement de copropriété comme parties communes les façades de l'immeuble à l'exception, en ce qui concerne les boutiques et magasins, de leurs devantures et vitrines et retenu, sans dénaturation, qu'il n'était pas possible d'en déduire que les façades des lots à usage commercial appartenant à la SCI étaient des parties privatives, même si l'entretien de ces devantures était à la charge du propriétaire de ces lots, la cour d'appel qui ne s'est pas prononcée par un motif ambigu et qui n'était pas tenue, au vu de ses constatations, de rechercher si la présence de glaces sur toute la longueur de la devanture et constituant essentiellement celle-ci n'était pas de nature à classer la façade dans les parties privatives, a décidé, à bon droit, que la qualification de travaux d'entretien de l'immeuble donnée aux travaux de ravalement devait entraîner l'application de la règle de répartition de l'article 10, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965, sans restriction aucune, notamment au profit de propriétaires de lots définis comme boutiques et en a exactement déduit que toute stipulation contraire du règlement de copropriété, relative aux lots du sous-sol et du rez-de-chaussée, devait être réputée non écrite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.