ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
06 Mai 1998
Pourvoi N° 96-40.867
M. ... et autres
contre
M. ...,ès qualités de mandataire-liquidateurde l'association FC
Sur le moyen unique Vu les articles 1148 du Code civil, L 122-3-8 et L 132-4 du Code du travail ;
Attendu que le 16 juin 1993, à la suite de graves difficultés financières, la Fédération française de football a retiré au Football club de Tours son statut de club professionnel ; que, le 30 juin 1993, le club a adressé à M. ... et à neuf autres joueurs professionnels, un certificat de travail leur indiquant que leur contrat prenait fin à cette date ; que, par jugement du 5 novembre 1993, le tribunal de grande instance de Tours a placé le club en redressement judiciaire ; que les joueurs ont alors saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement du salaire de juin 1993, une indemnité de congés payés et l'indemnité de l'article L 122-3-8 du Code du travail ; qu'ils sollicitaient également le paiement de l'indemnité spécifique prévue par la charte du football professionnel et des dommages-intérêts pour préjudice moral et atteinte à leur image de marque de professionnel du football ; Attendu que, pour débouter M. ... et les neuf autres joueurs de leurs demandes en paiement de l'indemnité prévue par l'article L 122-3-8 du Code du travail et de dommages-intérêts complémentaires, la cour d'appel a estimé que la rupture des contrats de travail respectifs intervenait non pas à la suite du non-paiement de leurs salaires mais après la mise en redressement judiciaire du club le 5 novembre 1993, que la rupture s'imposait tant au club qu'aux joueurs en application de l'article 2, in fine, du titre III, annexe 4, de la charte du football professionnel et que dans le cadre des dispositions légales rappelées par l'article 1 du chapitre 1 du titre 1 de la charte, l'intervention de la Fédération française de football ou de la Ligue nationale de football dans la définition de la durée des contrats, leur homologation ou l'énumération précise des modes de résiliation des engagements conclus, confère au statut du joueur professionnel, notamment en son article 13-2, une portée qui le fait déroger aux règles du droit commun notamment à celles de l'article L 122-3-8 du Code du travail ; Attendu, cependant, d'une part, que la mise en redressement judiciaire du club ne constituait pas en soi un cas de force majeure et, d'autre part, que la charte du football professionnel, qui a valeur d'une convention collective, ne pouvait déroger aux dispositions d'ordre public de l'article L 122-3-8 que dans ses dispositions plus favorables aux salariés ; qu'en statuant comme elle la fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. ... et neuf autres joueurs de leur demande en paiement de l'indemnité fondée sur l'article L 122-3-8 du Code du travail et de dommages-intérêts, l'arrêt rendu le 14 décembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bourges.