ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
06 Mai 1998
Pourvoi N° 96-40.610
M. ...
contre
M. ....
Sur les deux moyens, réunis Attendu que M. ..., employé par M. ..., a signé, le 18 juillet 1991 un " protocole d'accord " concernant la rupture du contrat de travail ; qu'invoquant la nullité de ce " protocole d'accord ", M. ... a saisi le conseil de prud'hommes de demandes en paiement de diverses sommes liées à l'exécution et à la cessation de son contrat de travail ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt (Aix-en-Provence, 23 novembre 1995) d'avoir déclaré nul le " protocole d'accord " après l'avoir qualifié de transaction et relevé l'absence de concession de la part de l'employeur, alors, selon le premier moyen, que, d'une part, la rupture amiable du contrat de travail se distingue de la transaction en ce que les parties n'y envisagent pas les conséquences d'une rupture déjà intervenue, mais s'entendent pour mettre fin, de leur volonté commune, à une relation de travail qui n'a pas encore cessé ; qu'en se prononçant de la sorte après avoir constaté que lorsque l'accord du 18 juillet 1991 a été conclu entre M. ... et M. ... aucune mesure de licenciement n'avait encore été notifiée à ce dernier, ce dont il résultait, peu important qu'elle ait pu être envisagée par l'employeur, que le contrat de travail avait été rompu du commun accord des parties, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient nécessairement au regard des articles 1134 et 2044 et suivants du Code civil, alors, d'autre part, et à titre subsidiaire, qu'en énonçant qu'aucune mesure de licenciement n'avait encore été notifiée à M. ... lors de la conclusion de l'accord du 18 juillet 1991, et que celui-ci était destiné à régler les conséquences d'une rupture déjà intervenue, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, violant ainsi l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, et alors, enfin, et également à titre subsidiaire, qu'en se bornant à relever que le salarié, qui avait déjà fait l'objet de sanctions disciplinaires, avait été convoqué à un entretien préalable, fixé au 18 juillet 1991, et que l'employeur admettait avoir renoncé à se prévaloir de la faute grave qu'il lui reprochait, la cour d'appel, qui a ainsi mis en évidence que le licenciement de M. ... avait été envisagé par M. ..., mais non qu'il avait été décidé, même dans son principe, lorsque les parties s'étaient entendues pour rompre le contrat de travail de leur commun accord, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 2044 et suivants du Code civil, alors, selon le second moyen, que l'existence de concessions réciproques, qui conditionne la validité d'une transaction, doit s'apprécier en fonction des prétentions des parties au moment de la signature de l'acte ; qu'il en résulte que le juge ne peut, pour se prononcer sur la validité d'une transaction, rechercher, en se livrant à l'examen des preuves, si ces prétentions étaient justifiées ; qu'en retenant, à l'appui de sa décision, que M. ... ne pouvait pas exciper, en droit, de la faute grave pour laquelle il avait envisagé de procéder au licenciement, sans indemnités de rupture, de M. ..., la cour d'appel a violé les articles 2044 et suivants du Code civil, et alors, d'autre part, qu'en énonçant que M. ... ne pouvait pas exciper d'une faute grave à l'encontre de M. ..., le 18 juillet 1991, puisque le salarié, dont les fautes antérieures avaient déjà été sanctionnées, se trouvait en situation d'arrêt de maladie et n'avait pas repris son activité au moment de la rupture du contrat, après avoir relevé que l'arrêt de maladie dont il avait bénéficié avait pris fin au mois de juin précédent, la cour d'appel, qui a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, qu'ayant constaté que le salarié, auquel une faute grave était reprochée, avait été convoqué à un entretien préalable pour le 18 juillet 1991, la cour d'appel a fait, par là même, ressortir qu'il existait entre les parties, lors de la conclusion de la convention, un litige sur la rupture du contrat de travail qui excluait toute rupture d'un commun accord ; que, hors toute contradiction, elle a, dès lors, décidé à bon droit que la convention du 18 juillet 1991 constituait une transaction ;
Et attendu, d'autre part, qu'une transaction ne peut être valablement conclue qu'une fois la rupture devenue définitive par la réception, par le salarié, de la lettre de licenciement ; que l'arrêt relève que l'employeur s'était abstenu de procéder au licenciement du salarié ; qu'il en résulte que la transaction était nulle ; que, par ce motif, substitué à ceux critiqués, la décision attaquée se trouve légalement justifiée ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.