Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 17 Février 1998
Rejet.
N° de pourvoi 95-17.490
Président Mme Pasturel, conseiller le plus ancien faisant fonction. .
Demandeur Société Poussard
Défendeur société Bonmort promotion immobilièreet autres
Rapporteur Mme ....
Avocat général M. Lafortune.
Avocats la SCP Boulloche, M. ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 13 juin 1995), qu'à la suite de la mise en redressement judiciaire des sociétés faisant partie du groupe Bonmort, la société Poussard, fournisseur de travaux publics, a fait opposition au paiement des sommes restant dues à ces sociétés pour des marchés de travaux publics et a été admise au passif de ce redressement judiciaire pour le montant de 1 447 841,73 francs, cette créance bénéficiant du privilège prévu par la loi du 26 pluviôse An ... et repris par les articles L 143-6 du Code du travail et 193 du Code des marchés publics ; que le jugement du 30 juin 1992 a arrêté le plan de continuation des sociétés du groupe Bonmort ; que la société Poussard a assigné, le 4 février 1993, la société Bonmort promotion immobilier et l'administrateur judiciaire en vue d'obtenir le paiement de sa créance ;
Attendu que la société Poussard fait grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'arrêt confirmatif attaqué a violé l'autorité de la chose jugée acquise par l'ordonnance du juge-commissaire du 30 janvier 1992, devenue définitive, admettant la créance de la société Poussard à titre privilégié pour la somme de 1 447 841,73 francs au titre du privilège de la loi du 26 pluviôse An ... repris aux articles L 143-6 du Code du travail et 193 du Code des marchés publics, en ce qu'il a rejeté sa demande tendant au paiement de ladite somme dès lors que celle-ci avait été réglée par les maîtres d'ouvrage publics ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué a violé l'article 1351 du Code civil, ensemble l'article 78 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, d'autre part, qu'en refusant de sanctionner le privilège susvisé, le jugement attaqué a violé ces textes ; et alors, enfin, que la renonciation à un droit ne se présume pas ; que le créancier admis au titre du privilège précité ne renonce pas à son droit en autorisant le paiement des sommes dues par les maîtres d'ouvrages publics entre les mains de l'administrateur du redressement judiciaire avec demande de règlement de ce dernier ; qu'ainsi, l'arrêt a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel a exactement énoncé que le bénéficiaire du privilège spécial mobilier prévu par l'article L 143-6 du Code du travail auquel ne s'appliquent pas les dérogations énumérées à l'article 76 de la loi du 25 janvier 1985, était soumis, comme les autres créanciers privilégiés, aux modalités d'apurement du passif décidées par le jugement arrêtant le plan de continuation ; que, sans porter atteinte à l'autorité de la chose jugée par la décision d'admission au passif de la société Poussard à titre privilégié et sans se fonder sur une renonciation de la société Poussard à son droit de paiement préférentiel, elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.