Jurisprudence : Cass. crim., 15-01-1998, n° 96-84832, publié au bulletin, Cassation

Cass. crim., 15-01-1998, n° 96-84832, publié au bulletin, Cassation

A2941ACW

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Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 15 Janvier 1998
Cassation
N° de pourvoi 96-84.832
Président M. Milleville, conseiller doyen faisant fonction.

Demandeur X et autre
Rapporteur Mme ....
Avocat général M. Amiel.
Avocats MM ..., ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
CASSATION sur les pourvois formés par X, Y, parties civiles, contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 6 septembre 1996, qui, dans la procédure suivie contre Z, A, B, C, et la société D, civilement responsable, pour diffamation non publique, a déclaré nulle la citation directe et condamné les parties civiles à verser une somme de 5 000 francs à chacun des prévenus, en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur le premier moyen de cassation (sans intérêt) ;
Mais sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 53 de la loi du 29 juillet 1881, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré nulle la citation directe délivrée par les demandeurs devant le tribunal de police du chef de diffamation non publique prévue par l'article 131-13-1 du Code pénal ;
" aux motifs que l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881 modifié par l'ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945, applicable en matière de diffamation non publique, prévue par l'article R 621-1 du Code pénal, stipule que "la citation précisera et qualifiera le fait incriminé, elle indiquera le texte de loi applicable à la poursuite Toutes ces formalités seront observées à peine de nullité de la poursuite" ; "qu'au cas d'espèce, il est soutenu que les faits sont suffisamment qualifiés dans le corps de la citation pour qu'aucune ambiguïté ne puisse subsister dans la mesure où il y est expressément mentionné que figurent sous la plume des rédacteurs du procès-verbal, en date du 29 juillet 1995, de l'assemblée des copropriétaires de la résidence du F à E, les termes suivants "L'assemblée générale du 2 août 1994 a été à nouveau contestée par Mme ..., ainsi que par MZ "Cette nouvelle assignation n'est motivée par aucune cause réelle et sérieuse" Et, devant cette situation, la copropriété a conclu en précisant que les actions des époux ..., à l'encontre des décisions de l'assemblée générale, constituent un véritable trouble pour la gestion de la copropriété (sic) ;
" Qu'il y est ensuite mentionné que l'allégation susvisée "est diffamatoire, étant destinée à porter atteinte à l'honneur et à la considération des époux ..." ; "que, cependant, la lecture de la citation peut amener à la conclusion que l'infraction reprochée a un caractère de publicité dans la mesure où il y est fait référence à une assemblée générale de copropriétaires et à la diffusion du procès-verbal établi à cette occasion ; "qu'il existe, en conséquence, une ambiguïté dans le corps de ce document qui est de nature à préjudicier à la défense qui doit être en mesure d'argumenter sur l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881 ; "qu'en l'espèce, le défaut de visa de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, texte de base en matière de diffamation, vicie la citation par l'ambiguïté qu'il laisse subsister et le grief qui peut être ainsi fait au prévenu ;
" alors que, satisfait aux prescriptions de l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, la citation qui indique exactement aux prévenus les faits et l'infraction qui leur sont reprochés et les met en mesure de préparer utilement leur défense ; qu'il en est ainsi lorsque la citation précise les faits incriminés et mentionne les textes de loi applicables à la poursuite, à savoir l'article R 621-1 du Code pénal visant la contravention de diffamation non publique envers une personne, et l'article 131-13-1 du Code pénal qui édicte la peine et sanctionne l'infraction ;
" Qu'ainsi, le fait articulé a été qualifié sans ambiguïté de diffamation non publique ;
" Que, pour en avoir autrement décidé, la Cour a méconnu le sens et la portée du texte susvisé " ;
Vu lesdits articles ;
Attendu que le texte de loi dont l'article 53 de la loi du 29 juillet 1881, applicable à la poursuite de la diffamation non publique, exige l'indication, est celui qui édicte la peine ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, par acte d'huissier en date des 27 septembre et 9 octobre 1995, les époux ... ont fait citer directement, devant le tribunal de police de Vanves, les signataires du procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence du F à E, en date du 29 juillet 1995, Z, A, B, C, et la société D, civilement responsable de ce dernier, à raison de propos mettant en cause les plaignants ; que la citation a articulé les propos incriminés, les a qualifiés de diffamation non publique envers les plaignants, et a visé les articles R 621-1 et 131-13, 1°, du Code pénal ;
Attendu que, pour déclarer nulle la citation introductive d'instance, l'arrêt confirmatif attaqué énonce que le défaut de visa de l'article 29 de la loi du 29 juillet 1881, texte de base en matière de diffamation, vicie la citation par l'ambiguïté qu'il laisse subsister et le grief qui peut être ainsi fait au prévenu ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte et le principe ci-dessus rappelés ;
Que la cassation est encourue de ce chef ;
Et sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 475-1 et 593 du Code de procédure pénale
" alors que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné solidairement les demandeurs à verser à 5 000 francs sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale à chacun des prévenus ;
" alors que l'abus de constitution de partie civile ne constitue pas une infraction pénale pouvant ouvrir droit à l'indemnité de l'article 475-1 du Code de procédure pénale " ;
Que, par suite, la cour d'appel ne pouvait confirmer la décision des premiers juges prononçant la condamnation des parties civiles pour abus de constitution de parties civiles à payer des dommages-intérêts aux prévenus relaxés sur le fondement du texte précité ;
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte de l'article 475-1 du Code de procédure pénale que seul l'auteur de l'infraction peut être condamné à payer à la partie civile, lorsqu'il parait inéquitable de laisser à la charge de celle-ci les sommes exposées par elle et non comprises dans les frais et dépens, un montant que le juge détermine ;
Attendu que, pour condamner solidairement les époux ... à verser à chacun des prévenus la somme de 5 000 francs en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, les juges énoncent que les parties civiles ont contraint les prévenus à engager des frais irrépétibles pour faire reconnaître leurs droits en justice, et qu'il paraît manifestement inéquitable de leur laisser la charge de l'intégralité de ces frais ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a violé le texte et le principe ci-dessus rappelés ;
Et attendu que si, aux termes des articles 58 de la loi du 29 juillet 1881 et 567 du Code de procédure pénale, la partie civile ne peut se pourvoir que quant à ses intérêts civils, cette restriction aux effets de son pourvoi n'a pas lieu lorsqu'il n'a été statué que sur la validité de la poursuite ;

Par ces motifs
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, en date du 6 septembre 1996, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris.

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