Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 3 Décembre 1996
Cassation
N° de pourvoi 96-84.503
Président M. Le Gunehec
Demandeur El Saidi ...
Rapporteur M. ....
Avocat général M. Dintilhac.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
CASSATION sur le pourvoi formé par El Saidi ..., contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 4 juillet 1996, qui, dans l'information suivie contre lui pour escroqueries, tentative d'escroqueries, falsification de chèques, usage de documents administratifs falsifiés et séjour irrégulier, a rejeté sa requête aux fins d'annulation d'actes de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle en date du 29 octobre 1996 prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Attendu qu'aucun mémoire n'est produit par le demandeur ;
Mais, sur le moyen de cassation relevé d'office, pris de la violation des articles 63-1, 171, 593 et 802 du Code de procédure pénale
Vu lesdits articles ;
Attendu qu'il résulte de l'article 63-1 du Code de procédure pénale que l'officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire, a le devoir de notifier immédiatement les droits attachés au placement en garde à vue ; que tout retard injustifié dans la mise en uvre de cette obligation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué qu'Ibrahim El ... a été interpellé à Bagnolet le 11 décembre 1995 à 17 heures 15 pour des faits de tentative d'escroquerie ; que, le même jour à 18 heures, il a été placé en garde à vue à compter de son interpellation ; que, l'intéressé ne comprenant pas le français et l'interprète en langue arabe requis par les policiers ayant déclaré ne pouvoir se présenter avant le lendemain, il n'a été procédé, avec l'assistance de ce dernier, à la notification du placement en garde à vue et des droits y étant attachés que le 12 décembre 1995, à 9 heures 15 ;
Attendu que, pour rejeter la requête en annulation présentée par le demandeur et prise de ce que la notification de ses droits avait été effectuée sans motif légitime, plus de 16 heures après son placement en garde à vue, les juges énoncent que l'irrégularité alléguée n'a pas porté atteinte à ses intérêts ; qu'ils relèvent qu'Ibrahim El ... ne peut tirer argument de n'avoir pu s'entretenir avec un avocat à l'issue de la 20e heure de garde à vue, dès lors que " le barreau " avait été avisé dans des délais suffisants de la demande qu'il avait formée à cette fin ; qu'ils ajoutent que, conformément à sa volonté, l'intéressé a été examiné par un médecin avant le terme de la mesure, qu'il a refusé de faire prévenir sa famille et qu'il n'a été entendu sur le fond qu'après avoir été informé de ses droits ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que l'arrêt attaqué n'invoque aucune circonstance pouvant justifier qu'il ait été impossible, en l'espèce, de faire appel à un autre interprète que celui qui avait été requis, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée du principe susénoncé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs
CASSE ET ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 4 juillet 1996, et pour qu'il soit jugé à nouveau conformément à la loi
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris autrement composée.