Cour de Cassation
Chambre commerciale
Audience publique du 5 Décembre 1995
Rejet.
N° de pourvoi 94-10.990
Président M. Bézard .
Demandeur M. ..., ès qualités d'administrateur de la société Le Vourc'h
Défendeur société Rallye Super et autre
Rapporteur M. ....
Avocat général M. Raynaud.
Avocats MM ..., ... ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Attendu, selon le jugement attaqué (tribunal de commerce de Morlaix, 24 novembre 1993), rendu en dernier ressort, que la société Rallye super (société Rallye) a fait opposition à deux ordonnances portant injonction de payer des sommes à la société Le Vourc'h, à raison de factures des 24 octobre 1990 et 21 janvier 1991, en soutenant que ces dettes étaient entrées en compte courant avant que la société Le Vourc'h ne fût mise en redressement judiciaire, par jugement du 12 mars 1991, et qu'elles ne pouvaient donner lieu à règlement séparé ;
Attendu que l'administrateur de la procédure collective reproche au jugement d'avoir rejeté sa demande en paiement alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'existence d'un compte courant ne se présume pas, ni ne se prouve par indices et présomptions ; que, dès lors, manque de base légale, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, le jugement qui, en l'absence de toute convention écrite, qualifie de comptes courants, de simples comptes-fournisseurs, ainsi qu'il était soutenu dans des conclusions laissées sans réponse ; et alors, d'autre part, que la compensation n'est admise, dans une procédure de redressement judiciaire, que dans la mesure de la déclaration faite par celui qui l'invoque ; qu'en décidant que la créance était soldée par compensation, ce qui rend inopérant l'intérêt d'une " production " au passif, bien que cette créance n'eût pas été déclarée, le Tribunal a violé les articles 1289 du Code civil, 50 et 53 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu, d'une part, que le Tribunal, après avoir exactement énoncé que deux personnes peuvent être en compte courant pour leurs fournitures réciproques et que la preuve de l'existence d'une telle convention entre commerçants peut être faite par tous moyens, a retenu qu'il existait des fournitures croisées entre les différents établissements de la société Rallye et la société Le Vourc'h, que ces opérations étaient enregistrées dans un seul compte dont les débits et crédits représentaient les créances réciproques correspondant à ces fournitures et que ces remises s'incorporaient dans un solde ; qu'il a ainsi, en répondant aux conclusions invoquées, légalement justifié sa décision ;
Attendu, d'autre part, que le Tribunal a retenu qu'en raison de la compensation légale de plein droit qui avait eu lieu entre les remises réciproques existant en sens inverse entre les sociétés Rallye et Le Vourc'h nées de l'exécution de la convention de compte courant, la créance litigieuse de la société Rallye était éteinte avant l'ouverture du redressement judiciaire de la société Le Vourc'h ; qu'il en a déduit exactement qu'elle n'avait pas à être déclarée au passif de cette dernière ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi.