Jurisprudence : Cass. crim., 22-06-1994, n° 93-83.900, Irrecevabilité et rejet

Cass. crim., 22-06-1994, n° 93-83.900, Irrecevabilité et rejet

A7961AGX

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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Criminelle
22 Juin 1994
Pourvoi N° 93-83.900
Allain ... et autres
IRRECEVABILITÉ et REJET des pourvois formés par 1° Allain ..., contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris,13e chambre, du 3 mai 1993, qui, dans la procédure suivie notammentcontre lui pour tromperie, sur ses conclusions contestant larégularité de sa citation et sollicitant un renvoi, a jointl'incident au fond ;
2° Allain Jean-Pierre, Garetta ..., contre l'arrêt de la mêmecour d'appel, du 25 mai 1993, qui, dans cette procédure suivienotamment contre eux pour tromperie et, en outre, contre le second,pour homicide involontaire, a dit n'y avoir lieu à audition d'untémoin ;
3° Allain ..., prévenu, ... Joëlle, agissant tant enson nom personnel qu'en sa qualité d'administrateur légal des biensde son fils mineur Ludovic, ... Jean-Yves, ... Marie-Christine,épouse Lesne, agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualitéd'administrateur légal des biens de ses enfants mineursJean-Christophe et Vincent, ... Renée, épouse Gilbert, agissanttant en son nom personnel qu'aux droits de son fils François ... le 28 janvier 1991, ... Rosita, agissant tant en son nompersonnel qu'en sa qualité d'administrateur légal des biens de sonfils mineur Frankie Ziegler, Henry ..., Deverre-FollJean-Pierre, Garro Jeannette, Daviet Bernard, Saint-Prix Alain,Pastour ..., épouse ..., ... Dominique, veuveBorriglione, l'Association française des hémophiles, KarchenJonathan, parties civiles, contre l'arrêt de la même cour d'appel, du13 juillet 1993 qui, notamment, a relaxé Michel ... du chefd'homicide involontaire, a condamné
a) pour tromperie sur la marchandise avec la circonstance que ledélit a eu pour conséquence de rendre l'utilisation de celle-cidangereuse pour la santé de l'homme, Michel ..., à 4 ansd'emprisonnement et 500 000 francs d'amende, Jean-Pierre ..., à4 ans d'emprisonnement dont 2 ans assortis du sursis simple, enordonnant le maintien en détention de Michel ... et décernantmandat de dépôt contre Jean-Pierre ... ;
b) pour abstention volontaire d'empêcher la commission des délitsde tromperie précités, contre l'intégrité corporelle des personnes,Jacques ..., à 3 ans d'emprisonnement assortis du sursis simple,Robert ..., à 1 an d'emprisonnement assorti du sursis simple, etqui a prononcé sur les intérêts civils. LA COUR, Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I Sur les pourvois formés par Jean-Pierre ... contre l'arrêtdu 3 mai 1993 et par le même prévenu et Michel ... contre l'arrêtdu 25 mai 1993
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
II. Sur le pourvoi de Jean-Yves ...
Attendu que le pourvoi formé le 13 juillet 1993 au nom deJean-Yves Lesne, contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris rendu lemême jour, l'a été par Marie-Christine ..., épouse ..., sansque celle-ci justifie d'un pouvoir spécial du demandeur, enméconnaissance des prescriptions de l'article 576, alinéa 2, du Codede procédure pénale ; que ce pourvoi est, dès lors, irrecevable ; III. Sur les pourvois de Renée ..., épouse ..., de RositaZiegler et de Jeannette Garro
Attendu qu'aucun moyen n'est produit ;
IV. Sur les pourvois des autres parties civiles et sur le pourvoide Jean-Pierre ... contre l'arrêt du 13 juillet 1993
Vu les mémoires ampliatifs, le mémoire additionnel et le mémoirepersonnel produits par les demandeurs et les mémoires en défense ;
Attendu que Michel ... et Jean-Pierre ..., qui ont exercérespectivement les fonctions de directeur général du Centre nationalde la transfusion sanguine (CNTS) et de responsable du département" recherches et développement " de cet établissement, sont poursuivispour avoir, entre le 21 mars 1985 et le 1er octobre 1985, trompé lescocontractants en l'espèce tous les hémophiles acquéreurs deproduits sanguins dits " concentrés facteur 8 ou facteur 9 decoagulation ", fabriqués, importés ou distribués par le CNTS surl'aptitude à l'emploi, les risques inhérents à l'utilisation duproduit, les contrôles effectués ou les précautions à prendre, avecla circonstance que la tromperie a eu pour effet de rendrel'utilisation de la marchandise dangereuse pour la santé de l'homme,faits prévus et réprimés par les articles 1 et 2 de la loi du1er août 1905, devenus les articles L 213-1 et L 213-2 du Code dela consommation ;
Que Jacques ... et Robert ..., qui ont été respectivementdirecteur général de la santé publique et directeur général dulaboratoire national de la santé, sont poursuivis pour s'être, dansles mêmes circonstances de temps, volontairement abstenus d'empêcher,par une action immédiate qui ne présentait pas de risques pour eux oupour les tiers, la commission de délits contre l'intégrité corporelledes personnes, en l'espèce les délits de tromperie sur les qualitéssubstantielles de produits dont les hémophiles étaient acquéreurs etdont l'utilisation était rendue dangereuse pour leur santé, faitsprévus et réprimés par l'article 63, alinéa 1er, du Code pénalancien, remplacé par l'article 223-6, alinéa 1er, du Code pénal entréen vigueur le 1er mars 1994 ;
En cet état
Sur le premier moyen de cassation, proposé par Edmond-Luc Henry,Jean-Pierre Deverre-Foll, Bernard Daviet, Alain Saint-Prix,Alexandrine ..., épouse ..., Dominique ..., veuveBorriglione et l'Association française des hémophiles, et pris de laviolation des articles 4 et 301 du Code pénal, 231, 381, 469, 591 et593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de baselégale
" en ce que, statuant sur les faits reprochés aux docteursGaretta, Allain, Roux et Netter qui, entre le 21 mars et le1er octobre 1985, ont sciemment fait administrer aux hémophiles desfacteurs sanguins de coagulation contaminés par le virus du sida,l'arrêt attaqué a écarté la qualification d'empoisonnement et, parvoie de conséquence, a rejeté l'exception d'incompétence du tribunalcorrectionnel soulevée par les parties civiles au profit de la courd'assises ;
" aux motifs qu'en application du principe de légalité des délitset des peines, consacré par l'article 4 du Code pénal, la loirépressive est d'interprétation stricte ; qu'il résulte desarticles 295 à 304 du Code pénal que l'empoisonnement visé à l'article 301 constitue un meurtre spécial en raison du moyen employépar son auteur ; que ce crime implique, pour être constitué, que soitrapportée la preuve chez son auteur de la volonté de donner la mort ;
que, si l'on peut induire l'intention homicide de la connaissance parl'agent du caractère mortifère du produit qu'il administre à autrui,cette induction n'est possible que lorsque les circonstances de lacause le justifient ainsi l'existence par exemple de rapportsconflictuels entre l'auteur et la victime, qu'il n'en va pas de mêmedans la présente espèce où les faits incriminés s'inscrivent dans lecadre d'une relation fabricant de produitthérapeutique-médecin-malade ; qu'en effet, bien que les docteursGaretta et Allain aient connu les dangers présentés par l'utilisationdes facteurs de coagulation, contaminés par le VIH, cédés par leCNTS, il est constant qu'ils n'avaient pas, à l'égard de quiconque,d'intention homicide ; qu'au surplus l'utilisation de ces fractionscoagulantes contaminées pouvait, à titre exceptionnel, être justifiéepar l'état de nécessité à défaut de toute autre solution, en cas depéril grave et imminent mettant en danger la vie d'un hémophile ;
" alors, de première part, que l'élément moral du crimed'empoisonnement réside dans la conscience de l'agent d'administrerou de faire administrer des substances pouvant entraîner la mort dela victime plus ou moins promptement ; qu'en écartant laqualification de crime d'empoisonnement au seul motif que lesdocteurs Garetta et Allain n'avaient eu aucune intention homicideenvers les hémophiles contaminés par le virus du sida, la Cour aajouté à l'infraction un élément constitutif qu'elle ne comporte paset a violé les textes susvisés ;
" alors, de seconde part, et en tout état de cause, qu'en écartantl'existence d'une intention homicide chez les docteurs ... etAllain au seul motif qu'il n'existait pas de relations conflictuellesentre ces derniers et les hémophiles tout en constatant, qu'en dépitde cette circonstance, les prévenus avaient, volontairement etsciemment, fait administrer, entre le 21 mars et le 1er octobre 1985,des facteurs sanguins de coagulation contaminés par le virus du sidaen toute connaissance de ce que leur utilisation allait entraînernécessairement la contamination puis la mort d'une partie au moinsdes hémophiles utilisateurs, éléments caractérisant l'intentionhomicide, la Cour s'est contredite et n'a pas légalement justifié sadécision au regard des textes visés ci-dessus ;
" alors, de troisième part, qu'en se fondant sur l'absence derelations conflictuelles entre les prévenus et les victimes pourécarter l'existence de l'élément moral du crime d'empoisonnement, laCour a confondu l'intention coupable, élément constitutif des délitset des crimes dont la définition est unique pour une même infraction,avec les mobiles de l'agent, variables pour une même infraction, etindifférents quant à la qualification, et violé les textessusvisés ;
" alors, de quatrième part, qu'aux termes de leurs conclusions lesparties civiles faisaient valoir que la juridiction correctionnelleétait incompétente pour statuer, non seulement sur les faitsreprochés aux docteurs ... et ..., mais également sur ceuximputés au professeur ... et au docteur ... au motif que leurréunion caractérisait le crime d'empoisonnement ; que dès lors en secontentant d'examiner les faits reprochés à ces derniers au regard dela seule qualification du délit d'omission d'empêcher une infraction,la Cour a omis de répondre au chef péremptoire des conclusions desparties civiles tiré de la qualification de l'infraction en violationde l'article 593 du Code de procédure pénale ;
" alors, qu'enfin, en énonçant que l'utilisation des fractionscoagulantes contaminées pouvait, à titre exceptionnel, être justifiéepar l'état de nécessité à défaut de toute autre solution, en cas depéril grave et imminent mettant en danger la vie d'un hémophile sansconstater précisément et concrètement que tel avait été le cas dechacune des parties civiles, la Cour, qui a statué par un motifd'ordre général et abstrait, n'a pas donné de base légale à sadécision " ;
Sur le second moyen de cassation proposé par les mêmes partiesciviles et pris de la violation de l'article 2 de la Conventioneuropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales et des articles 591 et 593 du Code de procédure pénale,défaut de motifs et manque de base légale " en ce que, statuant sur les faits reprochés auxdocteurs Garetta, Allain, Roux et Netter qui, entre le 21 mars et le1er octobre 1985, ont sciemment permis l'administration auxhémophiles des facteurs sanguins de coagulation contaminés par levirus du sida, l'arrêt attaqué a omis de dire, ainsi qu'il y étaitinvité, que les inculpés avaient violé l'article 2 de la Conventioneuropéenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertésfondamentales ;
" alors qu'aux termes de l'article 2 de la Convention européennede sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ledroit de toute personne à la vie est protégé par la loi et la mort nepeut être infligée à quiconque intentionnellement sauf en exécutiond'une sentence capitale prononcée par un tribunal au cas où le délitest puni de cette peine par la loi ; qu'en omettant de rechercher,ainsi qu'elle y était invitée, si la violation de l'article 2 deladite Convention était établie, l'Etat et ses agents s'étantabstenus de prendre les mesures nécessaires à la protection de la viedes hémophiles, la Cour a omis de statuer et violé les textessusvisés " ;
Sur le moyen unique de cassation proposé parMarie-Christine Gicquel, épouse Lesne, pour elle-même et ses enfantsmineurs Jean-Christophe et Vincent et pris de la violation desarticles 4 du Code pénal, VIII de la Déclaration des droits del'homme et du citoyen du 26 août 1789 énonçant le principe de lalégalité des délits et des peines, 301 du Code pénal, 593 du Code deprocédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale
" en ce que l'arrêt attaqué, rejetant les conclusionsd'incompétence déposées par Marie-Christine ..., a décidé que lajuridiction correctionnelle était compétente pour connaître des faitsreprochés aux docteurs ... et ... en déniant qu'ils aient étéconstitutifs du crime d'empoisonnement ;
" aux motifs que la loi répressive est d'interprétation stricte,"qu'il résulte des articles 295 à 304 du Code pénal quel'empoisonnement visé à l'article 301 constitue un meurtre spécial enraison du moyen employé par son auteur et que ce crime implique pourêtre constitué "que soit rapportée la preuve chez son auteur de lavolonté de donner la mort" ; "que si l'on peut induire l'intentionhomicide de la connaissance par l'agent du caractère mortifère duproduit qu'il administre à autrui, cette induction n'est possible quelorsque les circonstances de la cause le justifient", qu'il n'enest pas ainsi au cas de l'espèce "ou les faits incriminéss'inscrivent dans le cadre d'une relation fabricant de produitthérapeutique-médecin-malade", "qu'en effet, bien que les docteursGaretta et Allain aient connu les dangers présentés par l'utilisationdes facteurs de coagulation contaminés par le VIH cédés par le CNTS,il est constant qu'ils n'avaient pas, à l'égard de quiconque,d'intention homicide" ; qu'au surplus l'utilisation de ces fractionscoagulantes contaminées "pouvait, à titre exceptionnel, êtrejustifiée par l'état de nécessité à défaut de toute autre solution,en cas de péril grave et imminent mettant en danger la vie d'unhémophile" ;
" alors que, d'une part, en exigeant, pour qu'il y ait crimed'empoisonnement, que soit préalablement édifiée et constatéel'existence de "rapports conflictuels" entre l'agent et sa victime,la Cour a ajouté à la loi une condition qu'elle n'a pas prévue et aviolé, par fausse application, l'article 301 du Code pénal ;
" alors que, d'autre part, l'article 301 du Code pénal fait ducrime d'emprisonnement un crime spécifique, différent du meurtre, quele crime d'empoisonnement consiste dans l'administration desubstances mortifères et est indifférent du résultat, qu'il constitueune infraction de moyen qui relève directement de son élémentmatériel, que l'intention criminelle induit l'accomplissement del'action d'administrer une substance dont le prévenu sait qu'ellepeut donner la mort, l'intention d'empoisonner n'étant passtrictement liée à l'intention homicide, que la conscience de pouvoirdonner la mort suffit à caractériser l'élément intentionnel quin'exige pas une volonté de tuer, que la Cour ayant constaté que lesdocteurs Garetta et Allain "connaissaient les dangers présentés par l'utilisation des facteurs de coagulation contaminés par le VIH cédéspar le CNTS" et qu'ils avaient, malgré ce, administré le sangcontaminé aux enfants des époux ..., éléments constitutifs du crimed'empoisonnement, elle ne pouvait refuser de faire droit auxconclusions déniant la compétence de la juridiction correctionnelleau profit de celle de la cour d'assises, qu'en violation del'article 301 du Code pénal ;
" alors qu'enfin, la Cour ne pouvait écarter l'incrimination ducrime d'empoisonnement au motif hypothétique que l'utilisation dessubstances contaminées "pouvait" à titre exceptionnel être justifiéepar l'état de nécessité, en cas de péril grave et imminent mettant endanger la vie d'un hémophile, sans constater que tel ait été le cas,en fait, pour les enfants des époux ... " ;
Sur le moyen unique de cassation proposé par Jonathan ... etpris de la violation par non-application des articles 318, 59 etsuivants du Code pénal, ensemble violation de l'article 593 du Codede procédure pénale, manque de base légale
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a décidé que les faitscompris dans la poursuite étaient de la compétence d'une juridictioncorrectionnelle parce que constitutifs du délit de tromperie prévupar la loi de 1905, avec comme peine encourue, celle de 6 mois à4 ans d'emprisonnement ;
" alors qu'il ressort des faits compris dans la poursuite etdéclarés établis par l'arrêt attaqué, que la qualification pénaledesdits faits, était celle de l'infraction prévue et réprimée parl'article 318 du Code pénal, la substance nuisible à la santé etvolontairement administrée sans être, par elle-même, de nature àentraîner la mort, ayant entraîné pour la partie civile uneincapacité permanente de travail de plus de 20 jours, cependant quela peine encourue en ce cas est la réclusion criminelle à temps de 5à 10 ans " ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par Ludovic et JoëlleBouchet et pris de la violation de l'article 301 du Code pénal ;
Sur le second moyen de cassation, proposé par Ludovic Bouchet etJoëlle Bouchet et pris de la violation des articles 386 et 593 duCode de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions ;
Les moyens étant réunis ;
Sur leur recevabilité
Attendu qu'en l'absence de pourvoi du ministère public, la partiecivile, sur son pourvoi et celui du prévenu, est irrecevable àsoulever devant la Cour de Cassation l'incompétence de la juridictioncorrectionnelle qui, par un même arrêt, a statué sur la compétence etl'action publique, lorsque le prévenu n'invoque pas cetteincompétence ;
D'où il suit que les moyens sont irrecevables ;
Sur le premier moyen de cassation proposé par Jean-Pierre ... pris de la violation des articles L 1, L 17, L 18, L 372,L 666 et L 670, L 673, L 675 du Code de la santé publique, de laloi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications, 6 et 15 de laConvention européenne des droits de l'homme, 593 du Code de procédurepénale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délitde tromperie visé par la loi du 1er août 1905 et en répression l'acondamné à 4 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis, outre desdommages-intérêts au profit des parties civiles ;
" aux motifs que par sa participation au processus décisionnel quia abouti à la poursuite des cessions de produits contaminés, par lapoursuite également de ses expérimentations sur les hémophiles de cesmêmes produits et par leur prescription aux hémophiles qu'il suivait,il s'est personnellement rendu coupable des faits qui lui sontreprochés en qualité d'auteur principal ; que connaissant la gravitéde la situation et les risques qu'elle faisait courir aux hémophileset à leurs proches (il estimait avec son épouse [D 687] que 10 à50 hémophiles étaient contaminés par mois) il n'en a pas informé lesmembres du bureau de l'AFH le 10 mai 1985 lors de la réunion àlaquelle il représentait le CNTS ; que de même le 19 juin 1985 lorsde la réunion du CNH au cours de laquelle il a été décidé que durantune période intermédiaire de quelques semaines des produits nonchauffés coexisteraient avec des produits chauffés, il n'a donnéaucune indication sur l'étendue de la contamination des lots,confortant ainsi la dissimulation dont étaient victimes les membresdu bureau de l'AFH assistant à cette réunion ; qu'il a participé auxréunions internes du CNTS au cours desquelles a été prise la décisionde poursuivre la cession des produits incriminés ; il est l'un desdestinataires de la note "Jacquin du 7 mai 1985" où il est exposé quela stratégie reposant sur un "basculement à 100 %" à une date donnéesuppose que le stock de produits "contaminants" soit distribué danssa totalité avant de proposer les produits chauffés de substitution ;
il est présent le 29 mai 1985 lorsqu'est prise la décision depoursuivre les cessions de produits contaminés sauf interdictionéventuelle par les autorités de tutelle ; qu'en outre, à la date du20 juin 1985, il poursuivait encore ses expérimentations sur leshémophiles avec des produits non chauffés du CNTS dont il connaissaitla dangerosité ; que ces faits sont d'autant plus graves, en ce quile concerne, qu'il jouissait d'une confiance toute particulière de lapart de l'AFH tant en raison de ses titres (docteur ès sciences etmédecin), de sa qualité de secrétaire médical de la Fédérationmondiale de l'hémophilie, que du fait qu'il représentait souvent leCNTS auprès d'elle et qu'il avait été pendant plusieurs annéesresponsable médical au centre de traitement des jeunes hémophiles dela Queue-en-Yvelines ; que par sa présence effective à ces réunions,par ses silences, dissimulations et réticences à informer leshémophiles qui lui faisaient confiance, il a accrédité auprès d'euxles propres silences, dissimulations et réticences du docteur ...(arrêt attaqué p 100 et 101) ;
" 1° alors que les dispositions de la loi du 1er août 1905 quisanctionnent une infraction aux biens sont inapplicables aux actesrelevant de l'exercice de la médecine que cette loi ne vise ni lesprescriptions médicales ni davantage les "expérimentations" sur despatients ; d'où il suit qu'en étendant la prévention à de tels actes,la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;
" 2° alors qu'aucun des actes auxquels l'arrêt se réfère en lesqualifiant abusivement d'"expérimentations" n'est l' uvre personnelledu professeur ... ; qu'il s'agit là d'actes collectifs établis etexécutés sous le contrôle des membres les plus éminents de lacommunauté scientifique et hospitalière ; que l'arrêt attaqué necomporte aucun motif par lequel il critiquerait l'opinion commune desexperts scientifiques ; qu'en reprochant dès lors au prévenu d'yavoir participé sans pour autant avoir relevé à la charge de cedernier aucun fait par lequel il se serait écarté de l'observationstricte des principes mis en uvre par la communauté scientifique, lacour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de motifs et par là mêmed'une violation des textes visés au moyen ;
" 3° alors que l'essai thérapeutique se distingue de"l'expérimentation" en ce que cette dernière n'a pas pour objet desoigner le patient ; qu'il ne résulte d'aucune constatation del'arrêt que le demandeur se serait livré à des "expérimentations" ;
qu'au contraire, il résulte des constatations des juges du fond quele docteur ..., d'ailleurs associé à un groupe de professionnelsde renom, a entrepris des essais thérapeutiques en vue de déterminer,parmi les dérivés sanguins disponibles, celui qui donnerait lesmeilleurs résultats, étant précisé que de tels essais ont étépréalablement définis de manière à donner aux malades une chanced'amélioration et jamais de créer un risque d'aggravation ; d'où ilsuit que la cour d'appel n'a pu conférer à son arrêt une base légaleau regard des textes visés au moyen ;
" 4° alors que les prescriptions du docteur ... à l'égard desmalades qu'il suivait personnellement étaient fondées sur ladistinction entre les patients présentant déjà une déficienceimmunitaire et ceux qui ne présentaient pas une telle déficience ;
qu'il ne résulte d'aucune constatation de l'arrêt que lesprescriptions de ce médecin aient entraîné chez aucun malade uneséroconversion, pas plus d'ailleurs qu'une aggravation de l'étatd'immuno-déficience contractée auparavant ; qu'en reprochant dès lorsau praticien de tels actes médicaux par voie d'affirmation généraleet lapidaire, la cour d'appel a derechef violé les textes visés aumoyen " ;
Sur le deuxième moyen de cassation proposé par Jean-Pierre ... pris de la violation des articles L 1, L 17, L 18, L 666 à670, L 673, L 675 du Code de la santé publique, de la loi du1er août 1905 sur les fraudes et falsifications, du décret n° 54-65du 16 janvier 1954, des articles 6 et 15 de la Convention européennedes droits de l'homme, 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délitde tromperie visé par la loi du 1er août 1905 et en répression l'acondamné à 4 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis, outre desdommages-intérêts au profit des parties civiles ;
" aux motifs que par sa participation au processus décisionnel quia abouti à la poursuite des cessions de produits contaminés, par lapoursuite également de ses expérimentations sur les hémophiles de cesmêmes produits et par leur prescription aux hémophiles qu'il suivait,il s'est personnellement rendu coupable des faits qui lui sontreprochés en qualité d'auteur principal ; que connaissant la gravitéde la situation et les risques qu'elle faisait courir aux hémophileset à leurs proches (il estimait avec son épouse [D 687] que 10 à50 hémophiles étaient contaminés par mois) il n'en a pas informé lesmembres du bureau de l'AFH le 10 mai 1985 lors de la réunion àlaquelle il représentait le CNTS ; que de même le 19 juin 1985 lorsde la réunion du CNH au cours de laquelle il a été décidé que durantune période intermédiaire de quelques semaines des produits nonchauffés coexisteraient avec des produits chauffés, il n'a donnéaucune indication sur l'étendue de la contamination des lots,confortant ainsi la dissimulation dont étaient victimes les membresdu bureau de l'AFH assistant à cette réunion ; qu'il a participé auxréunions internes du CNTS au cours desquelles a été prise la décisionde poursuivre la cession des produits incriminés ; il est l'un desdestinataires de la note "Jacquin du 7 mai 1985" où il est exposé quela stratégie reposant sur un "basculement à 100 %" à une date donnéesuppose que le stock de produits "contaminants" soit distribué danssa totalité avant de proposer les produits chauffés de substitution ;
il est présent le 29 mai 1985 lorsqu'est prise la décision depoursuivre les cessions de produits contaminés sauf interdictionéventuelle par les autorités de tutelle ; qu'en outre, à la date du20 juin 1985, il poursuivait encore ses expérimentations sur leshémophiles avec des produits non chauffés du CNTS dont il connaissaitla dangerosité ; que ces faits sont d'autant plus graves, en ce quile concerne, qu'il jouissait d'une confiance toute particulière de lapart de l'AFH tant en raison de ses titres (docteur ès sciences etmédecin), de sa qualité de secrétaire médical de la Fédérationmondiale de l'hémophilie, que du fait qu'il représentait souvent leCNTS auprès d'elle et qu'il avait été pendant plusieurs annéesresponsable médical au centre de traitement des jeunes hémophiles dela Queue-en-Yvelines ; que par sa présence effective à ces réunions,par ses silences, dissimulations et réticences à informer leshémophiles qui lui faisaient confiance, il a accrédité auprès d'euxles propres silences, dissimulations et réticences du docteur ...(arrêt attaqué p 100 et 101) ;
" 1° alors qu'en vertu du décret n° 54-65 du 16 janvier 1954,applicable à l'époque des faits, les établissements de transfusionsanguine étaient placés sous contrôle de l'Etat, dirigés par un"directeur" assisté d'un "comité consultatif" ; que chacun de cesorganes devait être agréé par le ministre ; que l'arrêt constate quele docteur ... se trouvait dans une "situation de subordination"(arrêt p 101, alinéa 3) vis-à-vis du directeur de l'établissement ;
qu'en déclarant que le prévenu avait "participé au processusdécisionnel" au prétexte qu'il aurait été "présent" à certainesréunions et "destinataire" d'une note émanant de la direction, lacour d'appel, qui ne relève pas que le prévenu fût investi d'unequelconque compétence définie réglementairement, a par là mêmeentaché son arrêt d'une violation des textes visés au moyen ; " 2° alors que la cour d'appel constate par ailleurs que ledocteur Allain avait protesté tant par écrit qu'oralement contre ladécision prise par le directeur du CNTS de différer l'importation destechniques de chauffage et de refuser l'importation de produitschauffés destinés aux hémophiles, et par là même de poursuivre ladélivrance de produits non chauffés ; d'où il suit qu'en imputant audocteur Allain une adhésion, fût-elle passive, à la stratégie del'établissement, la cour d'appel a derechef entaché son arrêt d'unecontradiction de motifs ;
" 3° alors que l'arrêt attaqué ne justifie pas de ce que ledocteur Allain ait été jamais investi d'une fonction soit de conseilsoit de représentation du CNTS auprès de l'Association françaised'hémophilie ; que dès lors, en reprochant au docteur ... d'avoirmanqué à l'obligation d'informer ou de conseiller cette institution,la cour d'appel n'a pu légalement justifier sa décision ;
" 4° alors que le délit de tromperie est exclu dès lors que le"contractant" est informé des "risques inhérents à l'utilisation duproduit" ; qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaquéque, dès avant la période de la prévention, les hémophilesconnaissaient les risques de contamination inhérents à l'utilisationdes produits préparés par le CNTS ; qu'ils n'avaient dès lors àconnaître ni le nombre de lots contaminés ni davantage leur tauxd'infectivité ; qu'en effet, ces informations ne pouvaient éliminerle risque encouru lors de l'utilisation du produit infectant ; d'oùil suit qu'en reprochant au demandeur de ne pas avoir diffusé detelles informations manifestement inutiles pour la prévention durisque individuel, la cour d'appel a violé par fausse application lestextes visés au moyen ;
" 5° alors qu'il résulte du procès-verbal de l'Associationfrançaise de l'hémophilie du 10 mai 1985 que cette association avaitréclamé que des mesures soient prises "sans attendre" pour que "desproduits à contamination virale atténuée soient immédiatementdisponibles, ce qui peut impliquer des importations, pour assurer letraitement d'hémophiles dépourvus d'anticorps, anti-LAV" ; qu'enoutre, il avait été demandé qu'un dépistage soit mis en uvre defaçon qu'il soit "rigoureusement établi" que les donneurs "sontdépourvus d'anticorps anti-LAV" ; qu'en déclarant dès lors que l'AFHn'était pas informée de la gravité du risque, la cour d'appel aamputé les documents auxquels elle s'est référée d'une partiesubstantielle de son contenu et a, par là même, entaché son arrêtd'une contradiction de motifs ainsi que d'une violation des textesvisés au moyen " ;
Sur le troisième moyen de cassation proposé par Jean-Pierre ... et pris de la violation des articles L 1, L 17, L 18, L 666 àL 670, L 673, L 675 du Code de la santé publique, de la loi du1er août 1905 sur les fraudes et falsifications, des articles 6 et 15de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme etdes libertés fondamentales, 593 du Code de procédure pénale
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable du délitde tromperie visé par la loi du 1er août 1905 et en répression l'acondamné à 4 ans d'emprisonnement dont 2 ans avec sursis, outre desdommages-intérêts au profit des parties civiles ;
" aux motifs que les dispositions du Code de la santé publique nesont en rien exclusives de l'application des articles 1 et 2 de laloi de 1905 en cas de tromperie ; que cette loi s'applique à tous lesbiens corporels, et notamment aux dérivés du sang ;
" 1° alors qu'aux termes de l'article L 675 du Code de la santépublique, les dispositions répressives de la loi du 1er août 1905 nesont applicables, en matière de dérivés sanguins, que si ce produit aété préparé ou délivré "en infraction aux dispositions des articlesL 666 et L 670 dudit Code de la santé publique" ; que l'arrêtattaqué ne relève à la charge du prévenu aucune infraction à cesdispositions sanitaires lesquelles ne visent pas le délit de"tromperie" ; d'où il suit que les condamnations prononcées parl'arrêt attaqué procèdent de la violation des textes visés aumoyen ;
" 2° alors que le délit de tromperie est exclu dès lors quel'effet déceptif du produit résulte exclusivement de laréglementation en vigueur, que l'arrêt attaqué constate que leproduit litigieux préparé par un établissement placé sous le contrôlede l'Etat était strictement conforme à la réglementation en vigueuret que celle-ci n'autorisait la délivrance d'aucun autre produitsimilaire ; d'où il suit qu'en déclarant le demandeur coupable dudélit de tromperie sur un tel produit réglementaire, la cour d'appela violé les textes visés au moyen " ;
Les moyens étant réunis ;
Sur la première branche du premier moyen et le troisième moyen
Attendu que, pour écarter l'argumentation du prévenu qui soutenaitque la loi du 1er août 1905 à laquelle l'article L 675 du Code de lasanté publique ne se réfère que lorsque la préparation, la détentionou la délivrance des produits sanguins ont lieu en infraction auxdispositions des articles L 666 à L 670 de ce Code, en leurrédaction en vigueur à l'époque des faits serait inapplicable auxdérivés sanguins distribués et administrés conformément à laréglementation, les juges d'appel retiennent, d'une part, que cesdispositions ne font pas obstacle à ce que les dérivés sanguinsfabriqués industriellement, tant par le CNTS que par d'autresproducteurs français ou étrangers, entrent dans la catégorie desmarchandises visées par les articles 1 et 2 de la loi de 1905,d'autre part, qu'il n'importe qu'il n'ait pas existé de relationdirecte entre le prévenu et certains hémophiles ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que ni le respect formel de laréglementation en vigueur ni la tutelle de l'Etat sur le CNTS nesauraient exonérer les agents de cet établissement, au cas detromperie, de leur responsabilité pénale à raison de leur faitpersonnel, la cour d'appel n'encourt pas les griefs allégués ;
Sur le premier moyen en ses autres branches et sur le deuxièmemoyen
Attendu que, pour déclarer Jean-Pierre ... coupable del'infraction reprochée, la juridiction du second degré retient qu'àpartir de 1983 les responsables du CNTS, dont l'activité consistaitnotamment à mettre à la disposition des hémophiles les produitssanguins précités, ont eu la révélation progressive que l'utilisationde tels dérivés sanguins, non chauffés, provoquait la contaminationdes hémophiles par le virus de l'immuno-déficience humaine (VIH),agent causal du Sida ; que, dès avant le 21 mars 1985, le docteurGaretta, directeur général de cet établissement, et le docteurAllain, hématologue responsable de son département " recherches etdéveloppement ", étaient informés de la contamination massive deslots commercialisés ; que cependant le docteur ... a alors manquéà son obligation de tout mettre en uvre, d'une part, pour fairecesser immédiatement l'usage de ces produits en informant par tousmoyens les hémophiles et les prescripteurs du " danger mortelvéhiculé par ces produits ", d'autre part, pour faire cesser sansdélai leur distribution " quitte à leur substituer des produitsinactivés d'origine étrangère disponibles sur le marché ou d'originefrançaise " ; qu'il a, au contraire, par souci d'épuiser les stocks,accepté le risque couru par les hémophiles en fonction deconsidérations économiques étrangères à la santé de ceux-ci ; que lesjuges ajoutent que le docteur ... s'est abstenu d'informer lesmembres du bureau de l'Association française des hémophiles (AFH) le10 mai 1985, lors d'une réunion à laquelle il représentait le CNTS ;
que, de même, le 19 juin 1985, lors de la réunion du Comité nationalde l'hémophilie au cours de laquelle il a été décidé que, durant unepériode intermédiaire de quelques semaines, des produits non chaufféscoexisteraient avec des produits chauffés, il n'a donné aucuneindication sur l'étendue de la contamination des lots, confortantainsi la dissimulation dont étaient victimes les membres présents dubureau de l'AFH ; qu'il a participé aux réunions internes du CNTS aucours desquelles a été prise la décision de poursuivre la cession desproduits contaminés, sauf interdiction éventuelle des autorités detutelle ; que le 20 juin 1985 " il poursuivait encore sesexpérimentations sur les hémophiles avec des produits non chauffés duCNTS dont il connaissait la dangerosité " ; qu'ainsi " il aaccrédité " auprès des hémophiles " les propres silences,dissimulations et réticences du docteur ... " et que " par saparticipation au processus décisionnel ayant abouti à la poursuitedes cessions de produits contaminés, par la poursuite également deses expérimentations de ces mêmes produits et par leur prescriptionaux hémophiles qu'il suivait, il s'est personnellement rendu coupabledes faits qui lui sont reprochés en qualité d'auteur principal " ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance ou decontradictions, qui procèdent de l'appréciation souveraine des faitset circonstances de la cause, ainsi que de la valeur et de la portéedes éléments de preuve contradictoirement débattus, les juges dufond, qui n'avaient pas à répondre mieux qu'ils ne l'ont fait auxconclusions dont ils étaient saisis, ont caractérisé en tous seséléments, tant matériels qu'intentionnel, à l'encontre de Jean-PierreAllain, à raison de son fait personnel, le délit reproché ;
D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;
Sur le quatrième moyen de cassation proposé par Jean-Pierre ... pris de la violation des articles 13 de la loi des1er août 1905 sur les fraudes et falsifications, de l'article 1382 duCode civil, des articles 6 et 15 de la Convention européenne desauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, desarticles 2 et 593 du Code de procédure pénale
" en ce que l'arrêt attaqué a condamné le demandeur in solidum aupaiement des indemnités allouées aux parties civiles ;
" aux motifs que chacune des parties civiles a subi un préjudicemoral résultant de l'atteinte à l'intégrité de son consentement ;
qu'il importe peu qu'avant l'acquisition du produit, l'acquéreur aitété contaminé et même qu'il en ait eu connaissance ; qu'il n'y a paslieu de rechercher s'il y a eu séroconversion ou surcontamination(arrêt p 125) ;
" 1° alors que la partie civile ne peut poursuivre la réparationd'un dommage que pour autant que ce dernier découle directement desfaits, objet de la poursuite ; que le délit de tromperie suppose,pour revêtir un caractère préjudiciable, notamment quant à"l'intégrité du consentement", que le produit délivré étaitdéceptif ; que la cour d'appel s'est refusé à rechercher si leproduit litigieux avait été agréé par l'acheteur et s'il étaitsusceptible d'exercer sur ce dernier un effet aggravant de son étatau moment de l'acquisition, et a par là même entaché son arrêt d'uneviolation des textes visés au moyen ;
" 2° alors que la cour d'appel n'a pu sans se contredire affirmertout à la fois qu'il n'y avait pas lieu de rechercher s'il y a eucontamination, séroconversion ou surcontamination et que les maladeshémophiles auraient été exposés à un risque mortel ; qu'en statuantde la sorte, la cour d'appel a violé l'article 593 du Code deprocédure pénale ;
" 3° alors que, et à titre très subsidiaire, l'agent d'un servicepublic n'est personnellement responsable des conséquencesdommageables de l'acte délictueux que si celui-ci constitue une fautedétachable des fonctions ; qu'il résulte des constatations de l'arrêtattaqué que le docteur ... aurait agi dans le cadre du CNTS,lui-même dépendant de l'Etat lors de la perpétration du faitdélictueux, lequel n'est pas détachable du service public ; d'où ilsuit que la réparation des conséquences dommageables du délit ne peutêtre mise à la charge du prévenu ; qu'en statuant comme elle l'afait, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;
Attendu que, pour condamner Jean-Pierre ... au paiementd'indemnités envers un certain nombre de parties civiles, les jugesd'appel retiennent notamment que, l'infraction établie à son encontre" étant constituée indépendamment de la contamination ", il n'y a paslieu " de rechercher s'il y a eu séroconversion ousurcontamination " ; qu'il n'importe qu'avant même l'acquisition," l'acquéreur ait été contaminé et même qu'il en ait euconnaissance " ; que le préjudice découle de l'atteinte à l'intégritédu consentement de l'acquéreur, auquel il appartenait seul, même s'ilétait déjà contaminé, de décider s'il devait s'exposer au risqueinhérent à l'utilisation des produits incriminés ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que la tutelle exercée parl'Etat sur un établissement de droit privé, même si celui-ci assumeune mission de service public, n'est pas, par elle-même, de nature àexclure la compétence de la juridiction de l'ordre judiciaire pourstatuer sur l'action en indemnisation dirigée contre un agent duditétablissement reconnu coupable d'une infraction, la cour d'appel ajustifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et sur le moyen relevé d'office, pris de la violation desarticles 301 du Code pénal ancien et 221-5 du Code pénal entré envigueur le 1er mars 1994 et de l'article 469 du Code de procédurepénale ;
Attendu qu'il ne peut être fait grief aux juges correctionnels desmotifs surabondants par lesquels ils se sont reconnus compétents ;
qu'étant saisis de la prévention de tromperie dont ils ont à bondroit déclaré Jean-Pierre ... coupable, ils ne pouvaient, sansajouter à cette prévention, retenir une qualification criminelled'empoisonnement comportant des éléments constitutifs distincts, auregard notamment de l'intention coupable essentiellement différente,et qui serait susceptible de poursuites séparées ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'ordonner la réouverturedes débats demandée en cours de délibéré
I Sur le pourvoi de Jean-Pierre ... contre l'arrêt du3 mai 1993 et sur les pourvois de Michel ... et de Jean-PierreAllain contre l'arrêt du 25 mai 1993
Les REJETTE ;
II. Sur le pourvoi de Jean-Yves ... contre l'arrêt du13 juillet 1993 Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;
III. Sur les pourvois des autres parties civiles et sur celui deJean-Pierre Allain contre l'arrêt du 13 juillet 1993
Les REJETTE.

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