ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
22 Juin 1994
Pourvoi N° 89-42.461
M. ...
contre
société Carpano et Pons.
Attendu que M. ... a été engagé en qualité de travailleur à domicile à compter du 26 mars 1980 par la société Sibel, aux droits de laquelle se trouve la société Carpano et Pons, et qu'il a été licencié par lettre du 17 octobre 1985 ;
Sur le premier moyen
Vu les articles L 721-7, L 721-16 du Code du travail et 1134 du Code civil ;
Attendu que, pour infirmer le jugement qui avait ordonné une expertise avant de statuer sur le montant des sommes réclamées à titre d'heures supplémentaires et débouter M. ... de ce chef de demande, l'arrêt attaqué, après avoir exactement relevé que la rémunération des heures supplémentaires effectuées par le travailleur à domicile est prévue et réglementée par les articles L 721-16 et R 721-8 du Code du travail et qu'en application de ces articles, le donneur d'ouvrage doit verser les majorations de salaire prévues en cas d'heures supplémentaires ou de travail le dimanche ou un jour férié lorsque le travail donné ou les délais de livraison l'exigent, énonce qu'en l'espèce les documents produits ne permettaient pas de calculer le complément de salaire éventuellement dû à M. ... de ce chef pour son temps de travail à son domicile, pour le compte de la société Carpano et Pons, du 1er juin 1981 au 17 octobre 1985, en l'absence de production des documents prévus à l'article L 721-7 du Code du travail, plus précisément des bulletins ou carnets qui doivent être remis au travailleur à domicile lors de la remise du travail, mentionnant notamment la nature du travail, la date à laquelle il est donné, les temps d'exécution et sur lesquels doit être portée, lors de la livraison du travail achevé, la date de livraison ; qu'étant constant que ces documents, que le donneur d'ordre doit conserver pendant au moins 5 années, n'ont jamais été établis, l'expertise ordonnée par les premiers juges apparait comme devant être inopérante et que M. ... n'apportant pas la preuve de l'exécution des heures supplémentaires qu'il réclame, doit être débouté de sa demande en paiement d'un rappel de salaire ;
Attendu, cependant, que les dispositions de l'article L 721-7 du Code du travail imposent à l'employeur d'établir en deux exemplaires au moins, et de les conserver pendant 5 ans, un bulletin ou carnet sur lequel doivent figurer certaines mentions qui sont de nature à permettre d'établir le temps de travail et la rémunération perçue par le travailleur à domicile ; qu'il s'ensuit que l'employeur ne peut tirer parti de la faute qu'il a commise en n'établissant pas de tels documents et que le salarié doit être autorisé à faire procéder, au besoin par voie d'expertise, à des investigations auprès de l'employeur ; Qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'elle relevait la carence fautive de l'employeur, la cour d'appel n'a pas tiré de ses propres énonciations les conséquences qui en résultaient ;
Sur le second moyen
Vu les articles L 351-25, L 721-6 du Code du travail, ensemble l'accord interprofessionnel du 21 février 1968 ;
Attendu que, pour débouter M. ... de sa demande d'application du régime de chômage partiel pour ses périodes d'inactivité, l'arrêt attaqué énonce que les dispositions relatives à l'indemnisation du chômage partiel supposent pour leur application que le contrat de travail comporte un horaire au moins égal à la durée légale hebdomadaire du travail et que tel n'était pas le cas de l'intéressé envers qui la société ne s'était pas engagée à fournir un minimum de tâches à effectuer ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions tant légales que conventionnelles concernant l'indemnisation du chômage partiel sont applicables aux travailleurs à temps partiel, la cour d'appel, en exigeant que le contrat de travail comporte un horaire au moins égal à la durée légale hebdomadaire du travail, a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la demande en paiement d'heures supplémentaires et d'allocations d'indemnités de chômage partiel, l'arrêt rendu le 21 mars 1989, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.