ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
28 Avril 1994
Pourvoi N° 91-20.609
Caisse organic Cavicorg
contre
Mme ...
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant
Sur le pourvoi formé par la Caisse interprofessionnelle d'assurance vieillesse des industriels et commerçants d'Outre-Mer et Français de l'étranger (Organic Cavicorg), dont le siège est à Paris (20e), en cassation d'un arrêt rendu le 31 mai 1991 par la cour d'appel de Paris (8e Chambre, Section B), au profit de Mme Gillette ..., épouse ..., demeurant à Boulogne (Hauts-de-Seine), défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 4 mars 1994, où étaient présents M. Kuhnmunch, président, M. Choppin Haudry de Janvry, conseiller référendaire rapporteur, MM ..., ..., ..., ..., ..., ..., conseillers, M. Chauvy, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M le conseiller référendaire Choppin Haudry de Janvry, les observations de la SCP Tiffreau et Thouin-Palat, avocat de la Caisse Organic Cavicorg, de Me ..., avocat de Mme ..., les conclusions de M. Chauvy, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 31 mai 1991), que, née le 24 novembre 1922, Mme ... se trouve en état d'invalidité depuis le 2 août 1982 et perçoit depuis octobre 1984 une pension de vieillesse liquidée par la CNAVTS au titre de l'inaptitude au travail ; que la Caisse interprofessionnelle d'assurance vieillesse des industriels et commerçants, à laquelle est affiliée M. ..., est réglementairement tenue de verser au conjoint du titulaire, s'il est âgé de 65 ans, ou de 60 ans en cas d'inaptitude au travail, une allocation égale à la moitié de celle servie à l'assuré ; qu'ayant été avisé en septembre 1987 par la caisse que son épouse remplissait les conditions pour percevoir un complément de pension, M. ... en a réclamé le bénéfice à compter du 1er octobre 1984 en rappelant que son épouse avait fait valoir, à compter de cette date, ses droits à la retraite et se trouvait en état d'invalidité depuis août 1982 ; que la caisse ayant refusé de lui verser rétroactivement cette allocation, Mme ... a saisi le tribunal d'instance d'une demande en paiement de dommages-intérêts ;
Sur le premier moyen
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable l'exception d'incompétence qu'elle avait soulevée, alors, selon le moyen, qu'en matière de sécurité sociale, la procédure contentieuse est obligatoirement précédée d'un recours gracieux de l'assuré, sous peine d'irrecevabilité de la demande de ce dernier, qui peut être soulevée en tout état de cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la Caisse avait soutenu que, dans la mesure où les réclamations devaient obligatoirement être soumises à une commission de recours gracieux, la cour d'appel ne pouvait statuer en l'état et devait obligatoirement renvoyer Mme ... à mieux se pourvoir ;
qu'en se bornant à déclarer irrecevable l'exception d'incompétence soulevée par la Caisse, sans rechercher si la demande de Mme ..., qui n'avait fait l'objet d'aucune décision de la commission de recours gracieux, n'était pas irrecevable, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 123 du nouveau Code de procédure civile et L142-1 et R142-1 du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que si la procédure de sécurité sociale comporte, en principe, une saisine préalable de la commission de recours amiable dont l'omission constitue une fin de non-recevoir qui peut être soulevée en tout état de cause, les actions en dommages-intérêts engagées devant les juridictions de droit commun échappent à cette règle ; que, dès lors, c'est à bon droit que la cour d'appel a écarté la fin de non-recevoir soulevée par la Caisse ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen
Attendu que la caisse fait encore grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer une certaine somme à Mme ..., alors, selon le moyen, qu'en condamnant la Caisse à réparer le préjudice de Mme ..., conjointe de l'assuré, après avoir relevé la négligence de la Caisse qui aurait été tenue d'un devoir général d'information, sans préciser le fondement légal, contractuel ou délictuel, de sa décision, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1147, 1382 et 1383 du Code civil ; qu'à supposer que la cour d'appel se soit fondée sur la responsabilité contractuelle de la Caisse, il lui incombait de caractériser le lien contractuel existant entre Mme ... et la Caisse ; qu'en se bornant à constater que Mme ... était le conjoint de l'assuré, sans procéder à cette recherche, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ; que, et dans cette hypothèse, la cour d'appel ne pouvait, en dehors de toute disposition légale spécifique, imposer à la Caisse un devoir général d'information, revenant à mettre à sa charge une obligation générale indéterminée, impossible à exécuter ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé les articles 5 et 1147 du Code civil ; qu'au surplus, nul n'étant censé ignorer la loi, la cour d'appel ne pouvait valablement reprocher à la Caisse, en dehors de toute disposition légale spécifique l'y obligeant, d'avoir omis d'informer le conjoint de l'assuré de dispositions légales et réglementaires relatives à ses droits ; qu'ainsi, la cour d'appel a violé le principe précité et les articles L634-3 du Code de la sécurité sociale et 21 du décret n° 66-248 du 31 mars 1966 ; qu'à supposer que la cour d'appel ait retenu la responsabilité délictuelle de la Caisse, en se fondant exclusivement sur la prétendue violation d'un devoir général d'information qui aurait été issu d'un contrat d'assurance vieillesse conclu avec le conjoint de la victime, la cour d'appel n'a pas caractérisé la faute délictuelle ou quasidélictuelle de la Caisse en relation de causalité directe avec le dommage souffert par Mme ... ; que la cour d'appel a ainsi violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui, par motifs propres et adoptés, a caractérisé l'existence du lien contractuel entre Mme ... et la caisse, a relevé que cette dernière reconnaissait être tenue à une obligation d'information à l'égard des conjoints d'assurés atteignant 65 ans ; qu'en l'état de ces constatations, elle a pu décider que la caisse était tenue de la même obligation à l'égard de ceux qui, reconnus inaptes au travail, atteignaient 60 ans ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
Code de procédure civile
Attendu que Mme ... demande une somme de 12 000 francs en Attendu qu'il n'y a pas lieu d'accueillir cette demande ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;
nouveau Code de procédure civile ;
Condamne la Caisse Organic Cavicorg, envers Mme ..., aux dépens et aux frais d'exécution du présent arrêt ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M le président en son audience publique du vingt-huit avril mil neuf cent quatre-vingt-quatorze.