ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
14 Octobre 1993
Pourvoi N° 91-12.892
URSSAF de l'Orne
contre
Mme ... et autres.
Vu leur connexité, joint les pourvois n°s 91-12892 à 91-12974 ; Sur le premier moyen, commun aux pourvois
Attendu que la société RTIC a, au cours du premier semestre de 1988, versé à ses salariés licenciés, bénéficiaires d'une convention de conversion, une indemnité compensatrice de préavis conventionnelle, sur laquelle elle a précompté les cotisations sociales ; qu'ayant estimé que celles-ci avaient été acquittées indûment, les intéressés ont présenté directement à l'URSSAF une demande en remboursement, qui n'a pas été accueillie ;
Attendu que cet organisme fait grief aux jugements attaqués (tribunal des affaires de sécurité sociale d'Alençon, 18 janvier et 22 février 1991) d'avoir admis la recevabilité d'une telle demande, alors, selon le moyen, qu'en vertu de l'article R243-6 du Code de la sécurité sociale l'employeur est, dans le régime général, le seul débiteur vis-à-vis des organismes de recouvrement des cotisations dues au titre des assurances maladie, maternité, invalidité, vieillesse, décès, veuvage, des accidents du travail et des allocations familiales ; qu'en affirmant, néanmoins, que les salariés, licenciés de la société RTIC, pouvaient réclamer directement à l'URSSAF le remboursement des cotisations sociales prélevées sur une indemnité qui leur avait été versée à la suite de leur licenciement, bien que l'URSSAF ne soit en relation directe qu'avec l'employeur, s'agissant du règlement des cotisations sociales, le Tribunal a violé le texte précité ;
Mais attendu que les dispositions légales et réglementaires qui imposent à l'employeur le versement de l'ensemble des cotisations sociales ne peuvent être étendues au-delà de leurs prévisions et ne sauraient être invoquées pour retirer aux salariés la qualité pour agir en restitution de la part de ces cotisations ayant fait l'objet d'un précompte ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen, également commun aux pourvois
Attendu que l'URSSAF reproche, en outre, au jugement d'avoir accueilli la demande en remboursement des salariés, pour la part de cotisations les concernant, alors, selon le moyen, qu'en vertu de l'article 1377 du Code civil, celui qui réclame la restitution d'une somme comme l'ayant indûment payée par suite d'une erreur doit justifier non seulement du paiement dont il réclame la restitution, mais encore de l'erreur qui aurait été la cause déterminante de son acte ; qu'il résulte des propres constatations des jugements, qui relèvent que les derniers licenciements des salariés de la RTIC ont eu lieu de mars à juin 1988, que l'indemnité litigieuse a été versée aux salariés à une date où elle était encore considérée comme une indemnité compensatrice de préavis soumise à cotisations sociales ;
qu'en accueillant, cependant, la demande de ces salariés sur le fondement d'une interprétation ministérielle postérieure au versement des cotisations sociales, bien que ses motifs fassent ressortir l'absence d'erreur commise par le solvens au moment où il s'est acquitté de sa dette, le Tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé le texte précité ;
Mais attendu que, n'étant pas discuté devant les juges du fond que les sommes allouées par l'employeur présentaient un caractère indemnitaire, les cotisations précomptées avaient été payées sans cause et étaient sujettes à répétition sans que soit exigée la preuve de l'erreur commise par celui qui les avait acquittées, les articles 1235 et 1376 du Code civil ne faisant pas de l'erreur une condition nécessaire de la répétition de l'indu ; que les décisions attaquées se trouvent, dès lors, légalement justifiées ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE les pourvois.