ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Assemblée Plénière
31 Octobre 1991
Pourvoi N° 88-17.449
Union des assurances de Paris (UAP) et autre
contre
M. ... et autres
ARRÊT N° 1 Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 juin 1988), qu'une collision s'est produite entre l'automobile conduite par M. ..., employé de la société Percevault, ayant comme passager M. ..., employé dans la même entreprise, et l'autobus de la Société des cars de Villebon ; que M. ... a été blessé ; que celui-ci a demandé à la Société des cars de Villebon et à son assureur, l'UAP, la réparation de son préjudice ; que ceux-ci ont appelé en garantie M. ..., son employeur, et son assureur, la compagnie GAMF ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir débouté la Société des cars de Villebon et son assureur de leur recours, alors que, d'une part, l'accident étant survenu dans des circonstances indéterminées et la dette se divisant entre les deux gardiens par part virile, la cour d'appel aurait violé l'article 1384 du Code civil en déniant le principe même de la responsabilité de M. ... et de son employeur ; alors que, d'autre part, à supposer même l'employeur protégé de toute action à son encontre par une " immunité " qui lui est propre, l'assureur du véhicule appartenant à cet employeur ne saurait bénéficier d'une telle " immunité ", étant tenu à garantie en vertu des dispositions contractuelles, de sorte qu'en déclarant irrecevable le recours en garantie contre l'assureur du véhicule de la société Percevault, employeur de la victime, la cour d'appel aurait violé les articles 1384, alinéa 1er, du Code civil et L 211-1 du Code des assurances ;
Mais attendu qu'en vertu des articles L 451-1 et L 452-5 du Code de la sécurité sociale, sauf si la faute de l'employeur est intentionnelle, le tiers étranger à l'entreprise condamné à réparer l'entier dommage de la victime d'un accident du travail n'a de recours ni contre l'employeur ou ses préposés ni contre leur assureur ;
Attendu que l'arrêt énonce, à bon droit, que la Société des cars de Villebon, tenue d'indemniser l'entier préjudice de la victime, ne pouvait reporter sur l'autre coauteur la charge d'une indemnité que la victime ne pouvait réclamer à son employeur et qu'en application de l'article L 451-1 du Code de la sécurité sociale, la Société des cars de Villebon ne pouvait avoir plus de droits que la victime vis-à-vis de son employeur ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi MOYEN ANNEXE Moyen produit par la SCP Célice et Blancpain, avocat aux Conseils pour l'Union des assurances de Paris et la Société des cars de Villebon. Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté les exposantes de leur recours en garantie dirigé à l'encontre de la société des Établissements Percevault et de son assureur, la compagnie GAMF ;
AUX MOTIFS QUE sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985, l'implication de deux véhicules fait supporter à chacun de leurs propriétaires l'obligation d'indemniser entièrement le préjudice de la victime ; que cette obligation consacrée dans l'intérêt de la victime ne saurait se retourner définitivement contre celui qui a payé en le privant de tout recours contre le conducteur de l'autre véhicule impliqué ; qu'il ne peut toutefois reporter sur ce dernier la charge d'une indemnité que la victime n'aurait pas été en devoir de lui réclamer ; que c'est donc à bon droit que les premiers juges, rappelant les dispositions de l'article L 466, devenu l'article L 451-1 du Code de la sécurité sociale ont estimé que la Société des cars de Villebon ne pouvait avoir plus de droit que la victime vis-à-vis de son employeur et ont rejeté son recours en garantie ;
ALORS, D'UNE PART, QUE lorsqu'au cours d'une collision, survenue dans des circonstances demeurées indéterminées, un salarié a été blessé alors qu'il était passager du véhicule appartenant à son employeur, ce dernier qui a conservé la garde dudit véhicule est responsable au même titre que le gardien de l'autre véhicule impliqué dans l'accident, la dette se divisant entre eux par part virile dans leurs rapports réciproques, régis par les seuls dispositions de l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil, de sorte qu'en déboutant les exposantes de leur recours contributoire, la cour a dénié le principe même de cette responsabilité et a ainsi violé, par refus d'application, l'article 1384 du Code civil ; ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUT ÉTAT DE CAUSE, QU'à supposer même l'employeur protégé de toute action à son encontre par une immunité qui lui est propre, tenant à la législation spéciale sur les accidents du travail, l'assureur du véhicule appartenant à cet employeur ne saurait bénéficier d'une telle immunité dès lors qu'il est tenu à garantie en vertu de dispositions exclusivement contractuelles, de sorte qu'en déclarant irrecevable le recours en garantie des exposantes dirigé contre la compagnie GAMF, assureur du véhicule appartenant aux Établissements Percevault, employeur de la victime, la Cour a encore violé, par refus d'application, l'article 1384, alinéa 1er, du Code civil et L 211-1 du Code des assurances.