Jurisprudence : Cass. soc., 26-09-1990, n° 88-41.375, Rejet.

Cass. soc., 26-09-1990, n° 88-41.375, Rejet.

A1518AAH

Référence

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**ARRET DE LA COUR DE CASSATION**
**Chambre Sociale**
**26 Septembre 1990**
**Pourvoi N° 88-41.375**
_Compagnie lyonnaise des goudrons et des bitumes

contre

M Aa et autres_

Sur les trois moyens réunis :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 15 février 1988), que le 5 octobre
1987 la société Compagnie lyonnaise des goudrons et des bitumes (CLGB), a
envoyé quinze ouvriers sur un chantier de construction ; qu'en raison d'une
pluie torrentielle et d'un vent violent qui rendaient dangereux leur travail,
M Aa et six autres salariés ont refusé d'exécuter l'ordre qui leur était
donné de dégager le terrain d'un futur parking de tous les débris qui
l'encombraient et ont réclamé le bénéfice du régime des intempéries ;

que, devant le refus de l'employeur de satisfaire à cette revendication, ils
ont déclaré cesser le travail ; que la société qui, sur l'intervention de
l'inspecteur du travail, a placé vers 10 heures l'ensemble du personnel du
chantier en intempéries a néanmoins licencié, le 12 octobre 1987, M Aa et
les six autres salariés pour faute grave ;


Attendu que la société fait grief à la cour d'appel, statuant en référé,
d'avoir déclaré atteint d'une nullité absolue les sept licenciements, d'avoir
ordonné la réintégration des salariés licenciés et de l'avoir condamnée à
payer aux intéressés leur salaire depuis le 12 octobre 1987, alors, selon le
pourvoi, de première part, que l'existence même de la grève faisait en
l'occurrence l'objet d'une contestation sérieuse ; que la cour d'appel,
statuant en référé, ne pouvait ordonner la réintégration des salariés sans
excéder sa compétence en tranchant une difficulté sérieuse sur l'existence
d'un trouble manifestement illicite ; qu'elle a ainsi violé l'article R
516-31, alinéa 1er, du Code du travail ; alors, de deuxième part, que le juge
des référés ne peut accorder une provision au créancier que si l'existence de
l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que l'existence et la
licéité de la grève invoquée par les salariés pour justifier leur refus de
travailler était sérieusement contestable ; que la cour d'appel, en leur
accordant le paiement de leur salaire depuis la date du licenciement, a donc
violé l'article R 516-31, alinéa 2, du Code du travail ;

alors, de troisième part, que la grève est un arrêt de travail tendant à ce
que satisfaction soit donnée à une revendication professionnelle ; qu'un arrêt
de travail pour raison d'intempérie de salariés ayant déjà fait usage d'un
droit de retrait ne tend pas à la satisfaction de revendications
professionnelles puisqu'il ne peut, par nature, avoir d'incidence sur la
décision de l'entrepreneur de mettre son personnel « en intempéries » dans les
conditions prévues par les articles L 731-1 et suivants du Code du travail ;
que la cour d'appel, statuant en référé, en retenant l'existence d'une grève,
a violé les articles L 521-1 et suivants du Code du travail ;

alors, de quatrième part, que la réintégration des salariés licenciés ne peut
être imposée à l'employeur que dans les cas expressément prévus par la loi ;
que l'arrêt attaqué n'a donc pu ordonner la réintégration des intéressés sans
violer les articles L 521 et L 124-142 du Code du travail ; alors, enfin,
qu'un licenciement prononcé du fait de l'exercice du droit de retrait n'est
pas nul de plein droit et ne saurait donner lieu à réintégration ; que la cour
d'appel, si tant est qu'elle a justifié sa décision par le fait que les
salariés licenciés exerçaient leur droit de retrait en raison des risques
encourus, a nécessairement violé l'article L 122-14-4 du Code du travail ;


Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a relevé qu'après avoir refusé
d'exécuter un ordre qui s'avérait dangereux pour leur santé et pour leur vie,
les salariés ont présenté une revendication professionnelle, à savoir
l'obtention du bénéfice de la position chômage-intempéries ; que l'arrêt de
travail qui s'en est suivi caractérise l'exercice par les salariés du droit de
grève ;

Attendu, d'autre part, que le licenciement des salariés grévistes étant
entaché de nullité, c'est à bon droit, et sans excéder ses pouvoirs, que le
juge des référés, pour faire cesser un trouble manifestement illicite, a
ordonné la poursuite du contrat de travail, qui n'avait pu être valablement
rompu ;

Attendu, enfin, qu'après avoir justement constaté l'absence de contestation
sérieuse, la cour d'appel a pu condamner l'employeur à verser les salaires
indûment retenus depuis la date du licenciement nul ; d'où il suit que les
moyens doivent être rejetés en leurs diverses branches ;




PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi

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