Cour de Cassation
Chambre SOC.
Audience publique du 11 juillet 1989
Cassation
N° de pourvoi 86-43.497
Publié au bulletin
Président M. Cochard Rapporteur M. ...
Avocat général M. Picca
Avocat Mme ....
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le moyen unique
Vu les articles L. 112-40 et L. 231-8-1 du Code du travail ;
Attendu, selon les énonciations du jugement attaqué, que le 21 septembre 1984 lors du déhalage du navire " Angelim " le personnel occupé habituellement sur ce navire devait effectuer un horaire de quart de 13 heures 30 à 21 heures 18 ; qu'estimant que les conditions de sécurité n'étaient pas remplies, MM. ... et ... ainsi que les autres membres de l'équipe, ont refusé de prendre leur poste de travail ; que la Société nouvelle des ateliers et chantiers de La Rochelle-Pallice (SNACRP), considérant qu'il s'agissait d'un arrêt concerté du travail, constitutif d'une grève, a retenu une heure de travail sur le salaire de MM. ... et ... ;
Attendu qu'après avoir relevé que l'arrêt de travail ne constituait pas un mouvement de grève, le conseil de prud'hommes a estimé que les ouvriers n'avaient pas rapporté la preuve qu'il existait un danger imminent, tel que l'entend la loi du 13 décembre 1982 pour leur vie ou leur santé et qu'en réalité la retenue sur salaire effectuée constituait une sanction disciplinaire illégale ;
Attendu cependant que s'il est exact que les salariés qui se retirent d'une situation de travail, au motif qu'elle présente un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d'eux, n'exercent pas le droit de grève, ils peuvent néanmoins faire l'objet, indépendamment de toute sanction, d'une retenue sur salaire, s'ils n'avaient pas un motif raisonnable de penser que la situation présentait un tel danger ; qu'ayant constaté que MM. ... et ... s'étaient absentés de leur poste de travail en prétendant que les conditions de sécurité n'étaient pas remplies, le conseil de prud'hommes qui a qualifié la mesure dont ces salariés avaient fait l'objet de sanction, quand il s'agissait d'une retenue de salaire pour absence de service fait, et qui n'a pas recherché si les salariés avaient un motif raisonnable de croire à l'existence d'un danger grave et imminent pour la vie ou pour la santé de chacun d'eux, a faussement appliqué l'article L. 122-40 du Code du travail et violé l'article L. 231-8-1 du même Code ;
PAR CES MOTIFS
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 3 juin 1986, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de La Rochelle ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le conseil de prud'hommes de Saintes.