ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Commerciale
27 Juin 1989
Pourvoi N° 87-19.514
Mme ...
contre
directeur général des Impôts
Attendu qu'il résulte du jugement attaqué que M. ... a vendu le 14 janvier 1981 à M et Mme ... une maison d'habitation dont il se réservait l'usufruit moyennant un prix de 300 000 francs dont 200 000 francs étaient payés comptant et le reste par une rente viagère annuelle de 12 000 francs revalorisable ainsi que par l'engagement des époux ... de s'occuper de M. ... sa vie durant ; que M. ... a institué Mme ... comme sa légataire universelle le 3 novembre 1983 et est décédé le 25 mai 1984 ; que l'administration des Impôts a estimé que la vente était fictive et constituait un legs particulier à Mme ... ; que par ailleurs elle a également, par notification de redressement du 9 octobre 1985 réintégré dans la succession en application de l'article 784 du Code général des impôts une somme globale de 570 936 francs correspondant à des valeurs mobilières vendues par M. ... pour le compte de Mme ... et des sommes retirées du compte de M. ... et versées au compte bancaire de Mme ... ; que Mme ... a alors contesté le caractère de don manuel de ces sommes en faisant valoir M. ... ; que devant le tribunal de grande instance saisi par Mme ... l'administration des Impôts a demandé que soit sur le fondement soit de l'article 784 soit de l'article 752 du Code général des impôts demandant ainsi des droits complémentaires à ceux portés dans l'avis de mise en recouvrement ainsi que la réintégration d'une somme de 30 000 francs retirée du compte de M. ... au profit de Mme ... ; Sur le premier moyen Attendu que Mme ... fait grief au jugement attaqué d'avoir dit que devait être réintégrée dans la succession de M. ... la part indivise de l'immeuble qu'elle avait acquis avec son époux le 14 janvier 1981 alors, selon le pourvoi, que, le tribunal qui constate que M et Mme ... se sont acquittés des obligations prévues par l'acte notarié de vente du 14 janvier 1981 d'une part, en versant le jour même 200 000 francs, d'autre part, en règlant la rente viagère annuelle et enfin en s'occupant de M. ... jusqu'à son décès, soit pendant plus de trois ans, ne pouvait décider que Mme ... ne rapportait pas cependant la preuve de la réalité de la vente dont il constatait qu'elle avait eu une contrepartie réelle, régulièrement exécutée, peu important que M. ... n'ait pas eu besoin de vendre son immeuble, que la rente n'ait pas été revalorisée et qu'il n'ait pas été justifié de la provenance d'une somme de 200 000 francs sur le compte de M et Mme ... ; que le tribunal n'a pas ainsi tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 751 du Code général des impôts ; Mais attendu que c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain que le tribunal a apprécié la portée des éléments versés par les parties et estimé que Mme ... ne rapportait pas la preuve contraire lui permettant de faire échec à la présomption légale de fictivité résultant de l'article 751 du Code général des impôts ;
que, dès lors, il a pu décider que l'opération dont il rétablissait le véritable caractère était passible des droits de mutation à titre gratuit ; que le premier moyen est donc sans fondement ; Mais sur le second moyen pris en ses deux branches Vu l'article L 55 du Livre des procédures fiscales et les articles L 199 et R 202 du même Code ; Attendu que pour accueillir la demande de réintégration dans la 30 000 francs dont l'Administration se prévalait pour la première fois dans l'instance, le tribunal a énoncé qu'il était peu M. ... par Mme ... le 5 janvier 1984 et qu'en tout état de cause cette somme était présumée en vertu de l'article 752 du Code général des impôts faire partie de la succession ; que pour la somme de 30 000 francs aucune précision n'était apportée par Mme ... ; Attendu qu'en statuant ainsi alors qu'en matière d'enregistrement, les redressements doivent être effectués selon la procédure contradictoire prévue à l'article L 55 du Livre de procédures fiscales, de sorte qu'en accueillant les demandes de l'Administration qui n'avaient pas été formulées dans la notification de redressement et qui étaient fondées sur l'article 752 du Code général des impôts tandis que la procédure contradictoire préalable ne portait que sur l'application de l'article 784 du même Code, le tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qui concerne la la succession de M. ..., le jugement n° 187486 rendu le 6 octobre 1987, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Tours ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Blois