ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Civile 1
10 Mai 1989
Pourvoi N° 87-14.294
Epoux Pougnand
contre
caisse régionale de crédit agricole mutuel des Deux-Sèvres
Sur le deuxième moyen Vu les articles 1116 et 1134, alinéa 3, du Code civil ; Attendu que, par acte sous seing privé du 20 juin 1979, intitulé " contrat d'ouverture de crédit en compte courant ", la caisse régionale de crédit agricole mutuel des Deux-Sèvres a prêté à M et Mme ... la somme de cent mille francs " destinée à leur permettre de faire face à leurs besoins courants de trésorerie " ;
qu'à cette même date M et Mme ... ont signé un engagement de caution, limité à la somme de cent mille francs, stipulant qu'après avoir pris connaissance des clauses et conditions du contrat précité, ils s'engageaient solidairement " à garantir à la caisse régionale prêteuse le remboursement de toutes sommes qui pourrait être dues par l'emprunteur, y compris les intérêts, frais et accessoires " ;
qu'après que la liquidation des biens de M. ... eut été prononcée, le crédit agricole, se prévalant du cautionnement consenti par M et Mme ..., a assigné ceux-ci en remboursement de sommes qui lui étaient dues par M et Mme ... ; Attendu que pour infirmer la décision du tribunal qui, sur la demande reconventionnelle formée par M et Mme ..., avait annulé pour dol leur cautionnement et condamné la banque à leur restituer les sommes qu'ils lui avaient déjà versées en exécution de celui-ci, l'arrêt attaqué retient que s'il est exact que le crédit agricole n'a pas pris l'initiative de faire connaître aux intéressés, lorsque ceux-ci ont consenti ce cautionnement, que la dette de M. ... à son égard s'élevait à 113 366,86 francs, M et Mme ... n'apportent pas la preuve que cette réticence a été pour eux dolosive dès l'instant où il n'est pas certain que, même valablement renseignés sur la situation financière réelle de M. ... et sur sa dette envers la banque, ils n'auraient pas consenti à cautionner ce dernier ; Attendu cependant que manque à son obligation de contracter de bonne foi et commet ainsi un dol par réticence la banque qui, sachant que la situation de son débiteur est irrémédiablement compromise ou à tout le moins lourdement obérée, omet de porter cette information à la connaissance de la caution afin d'inciter celle-ci à s'engager ; D'où il suit qu'en statuant comme ils ont fait alors qu'ils ne pouvaient exclure le caractère dolosif de la réticence par eux retenue à l'encontre du crédit agricole sans relever aucun élément propre à établir qu'en l'espèce ladite réticence n'était pas de nature à inciter les intéressés à consentir le cautionnement litigieux, les juges du second degré n'ont pas donné de base légale à leur décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les premier et troisième moyens CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 février 1987, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux