ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION
Chambre Sociale
27 Avril 1989
Pourvoi N° 86-45.253
Mme ...
contre
société Betag Ingénierie
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme ... a été embauchée le 28 février 1983 par la société Betag en qualité de secrétaire dactylographe et a été licenciée par lettre du 30 mars 1983 ;
qu'ayant, par retour de courrier, adressé à son employeur un certificat de grossesse prévoyant son accouchement vers le 20 novembre 1983, elle a été invitée à réintégrer son poste par télégramme du 5 avril 1983, puis, après un entretien, a été à nouveau licenciée par lettre du 13 avril 1983 avec un préavis d'un mois ;
qu'elle n'a pas été réintégrée dans son emploi à la fin de son préavis ; Sur le pourvoi incident formé par la société Betag Ingénierie, qui est préalable Attendu que la société Betag fait grief à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à Mme ... une certaine somme pour la période couverte par la nullité du licenciement, alors, selon le moyen, qu'en premier lieu les juges d'appel indiquent que la société Betag produit deux attestations régulières et plusieurs documents qui établissent la réalité des griefs invoqués, ajoutant que les faits reprochés à la salariée constituent des motifs réels et sérieux de licenciement ; et alors, en second lieu, que, d'une part, l'article L 122-30, alinéa 2 prévoit que " lorsqu'en application des dispositions des articles L 122-25 à L 122-28-4, le licenciement est nul, l'employeur est tenu de verser le montant du salaire qui aurait été perçu pendant la période couverte par la nullité " et que, d'autre part, l'article L 122-25-2 prévoit " qu'aucun employeur ne peut résilier le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constatée, mais que toutefois, sous réserve d'observer les dispositions de l'article L 122-27, il peut résilier le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressé, non liée à l'état de grossesse ou de l'impossibilité où il se trouve, pour un motif étranger à la grossesse, à l'accouchement ou à l'adoption, de maintenir ledit contrat " ; que, dès lors, les juges d'appel, qui ont qualifié de réel et sérieux les motifs invoqués par l'employeur, ont justifié de l'impossibilité où celui-ci se trouvait de maintenir le contrat de travail de la salariée, pour un motif étranger à sa grossesse ; et alors enfin que l'arrêt qui constate que Mme ... a été licenciée par lettre du 13 avril 1983, soit sept mois avant la date présumée de l'accouchement, c'est-à-dire hors le délai prévu aux articles L 122-26, alinéa 1er, et L 122-27, n'a relevé aucune inobservation par l'employeur des dispositions des articles L 122-25 à L 122-28-4 ; que les juges d'appel ne pouvaient donc, sans violation de l'article L 122-30 du Code du travail et sans contradiction de motifs, faire application de ce texte ; Mais attendu que la cour d'appel a retenu, par des motifs non critiqués, que les faits reprochés à la salariée ne pouvaient être considérés comme des fautes graves ; qu'ayant constaté, sans se contredire, que l'employeur ne justifiait pas de l'un des motifs étrangers à la grossesse, pour lesquels l'article L 122-25-2 du Code du travail autorise la résiliation du contrat de travail de la salariée enceinte, elle a fait une exacte application de l'article L 122-30 du même Code en condamnant la société à verser à Mme ... le montant du salaire qu'elle aurait du percevoir pendant la période couverte par la nullité, telle que fixée par l'article L 122-25-2 ; Que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ; Mais sur le pourvoi principal formé par Mme ... Vu l'article L 122-30 du Code du travail ; Attendu que pour débouter Mme ... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement " illégitime ", la cour d'appel s'est bornée à énoncer que le licenciement n'était pas dépourvu de cause réelle et sérieuse ; Qu'en statuant ainsi, sans constater que la salariée n'avait pas subi de préjudice résultant de l'inobservation par l'employeur des dispositions des articles L 122-25 à L 122-28-7 du Code du travail, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS CASSE ET ANNULE, mais en ses seules dispositions relatives à la demande de dommages-intérêts " pour licenciement illégitime ", l'arrêt rendu le 29 septembre 1986, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes