Cour de Cassation
Chambre civile 1
Audience publique du 13 Mai 1986
Rejet
N° de pourvoi 84-17.246
Président M. Joubrel
Demandeur Société civile immobilière des Tilleuls
Défendeur Établissement Public d'Aménagement de la Ville de Vaudreuil
Rapporteur M. Z
Avocat général M. Gulphe
Avocats La Société civile professionnelle Labbé et Delaporte et la Société civile professionnelle Boré et Xavier.
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, par acte notarié du 17 décembre 1976, l'Établissement public d'aménagement de la ville nouvelle du Vaudreuil (EPVN) a donné à bail à construction, à la société civile immobilière des Tilleuls (la SCI), un terrain de 1200 mètres carrés environ ; que le prix du loyer annuel dû par le preneur était ainsi fixé à l'acte " - nul jusqu'au 30 septembre 1978 ; F,50 pour la période comprise entre le 1er octobre 1978 et le deuxième jour anniversaire de la signature du présent acte ; F,30 pour la période restant à courir jusqu'au terme de la 65e année du bail " ; que, soutenant que cet acte était entaché d'une erreur matérielle, l'EPVN a assigné la SCI pour voir dire que dans celui-ci le mot " deuxième " serait remplacé par celui de " douz
Attendu que la SCI reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir accueilli la demande de l'EPVN, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il résulte de l'acte que les parties avaient entendu viser " le deuxième jour anniversaire de la signature du présent acte ", de sorte qu'en décidant que cette stipulation contenait le mot " douz" deuxième ", la Cour d'appel en a dénaturé les termes clairs et précis, et, alors, d'autre part, que l'acte authentique fait foi jusqu'à inscription de faux des faits que l'officier public y a énoncés comme s'étant passés en sa présence dans l'exercice de ses fonctions et qu'en décidant de rectifier, en dehors de la procédure d'inscription de faux, les énonciations de l'acte authentique relatives à l'expression de la volonté des parties, la Cour d'appel a violé l'article 1319 du Code civil ;
Mais attendu, d'abord, que s'agissant en l'espèce d'énonciations des parties et non pas de faits personnellement constatés par l'officier public la preuve contraire était admise contre celles-ci, sans qu'il soit nécessaire de recourir à la procédure d'inscription de faux ;
Attendu, ensuite, que la Cour d'appel énonce que dans la graphie du mot " deuxième ", " la deuxième lettre n'est pas un " e " mais, à l'évidence, un " o " dans lequel on a tracé un diamètre horizpour en faire un caractère inexistant dans l'alphabet français " ; qu'ayant ainsi relevé le caractère ambigu du mot litigieux, les juges du second degré se sont trouvés dans l'obligation de rechercher quelle avait été la commune intention des parties, en se fondant sur différents documents antérieurs à l'acte de bail ;qu'une telle interprétation est exclusive, par sa nécessité, de la dénaturation alléguée ;
D'où il suit qu'en aucune de ses deux branches le moyen n'est fondé ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE le pourvoi ;