Cour de Cassation
Chambre criminelle
Audience publique du 22 Janvier 1986
REJET
N° de pourvoi 85-92.620
Pdt M. ...
Demandeur ... Patrick, ... Alain
Rapp M. ...
AvGén M. ...
Av demandeur SCP Waquet
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
REJET des pourvois formés par Hufschmidt (Patrick), Perrinelle (Alain), contre un arrêt de la Cour d'appel d'Angers, Chambre correctionnelle, en date du 23 avril 1985 qui les a condamnés pour association de malfaiteurs chacun à 3 années d'emprisonnement, a ordonné leur maintien en détention et a prononcé contre chacun d'eux l'interdiction de séjour pour une durée de cinq années ;
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit commun aux deux demandeurs ;
(Sur le premier moyen de cassation sans intérêt)
Sur le second moyen de cassation pris de la violation des articles 265 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale, défaut de réponse à conclusions,
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Perrinelle et Hufschmidt coupables d'association de malfaiteurs ;
" aux motifs que Tranier qui avait conçu l'idée d'un vol de numéraire à l'agence du Crédit lyonnais avait réuni au Mans ses deux coprévenus ; qu'ils avaient, dans la nuit du 8 au 9 mars, volé une voiture dans un parking de la ville ; que le 9 mars au matin, de bonne heure, les trois prévenus avaient effectué une "reconnaissance" près de l'agence bancaire ; qu'ayant revêtu des K-Way, ils s'étaient approchés de celle-ci mais, estimant qu'il y avait des difficultés ou des risques, ils avaient sursis à opérer ; que les inspecteurs de police qui les avaient pris en filature avaient constaté, vers midi, au moment où, revenus près de la Simca 1OOO de Perrinelle, ils enlevaient leur K-way, qu'ils portaient à la ceinture des armes de poing qu'ils avaient ensuite placées dans un sac de sport ; que Hufschmidt avait confirmé que tous deux étaient porteurs d'une arme et Tranier déclaré que Hufschmidt et Perrinelle devaient faire le braquage ; qu'ainsi ces personnes avaient établi une entente, concrétisée par plusieurs faits matériels en vue de préparer un crime contre les personnes et les biens ; qu'il s'agissait bien de la préparation d'un crime puisque le vol aggravé par le port d'une arme est qualifié crime par l'article 384, alinéa 2, du Code pénal ; qu'il était ainsi sans intérêt de rechercher si les prévenus avaient renoncé à passer à l'action parce qu'elle allait entraîner l'usage des armes ou pour une raison indépendante de leur volonté ;
" alors, d'une part, qu'il n'y a association de malfaiteurs pénalement punissable que s'il y a entente concrétisée par un ou plusieurs faits matériels en vue de la commission d'une infraction qualifiée crime contre les personnes et les biens ; que l'entente en vue de commettre un délit n'est pas réprimée par la loi pénale ; qu'en l'espèce, il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que Tranier avait conçu l'idée d'un vol en numéraire de l'agence du Crédit lyonnais du centre commercial Carrefour et qu'il avait, à cette fin, réuni au Mans les deux prévenus ; qu'aucune des mentions de l'arrêt attaqué ne constate qu'au moment où ils ont été vus par les policiers tôt dans la matinée s'approchant de l'agence bancaire, Perrinelle et Hufschmidt eussent été porteurs d'une arme ; que l'arrêt constate seulement que ce n'est que vers midi, au moment où ils montaient dans la Simca I000 de Perrinelle, stationnée hors du
périmètre du centre commercial, que les prévenus auraient été vus par les policiers porteurs d'une arme ; que, dès lors qu'il n'est pas établi que les prévenus se seraient procurés ces armes avant d'effectuer leur approche de l'agence bancaire et en auraient été porteurs au moment où ils s'y seraient rendus, l'association de malfaiteurs en vue de commettre un crime n'est pas caractérisée ; qu'ainsi la déclaration de culpabilité est privée de base légale ;
" alors, d'autre part, que l'association de malfaiteurs prévue par l'article 265 du Code pénal n'est réprimée qu'en tant que la réunion a pour objectif la préparation d'un crime ; que, lorsque l'infraction entre dans sa phase d'exécution, seuls sont applicables les textes spéciaux qui la réprime à l'exclusion de l'article 265 du Code pénal ; qu'il s'ensuit que lorsque le commencement d'exécution est suivi d'un désistement volontaire, la tentative de crime n'est pas punissable et est exclusive des dispositions de l'article 265 susvisé qui n'est applicable qu'au stade préparatoire de l'infraction ; qu'en l'espèce, il est établi que les prévenus se sont rendus près d'une agence bancaire en vue de commettre un vol en numéraire ; il est également établi qu'ils ont volontairement renoncé à passer à l'action ; que, dès lors, la tentative de vol aggravé n'était pas punissable, non plus que l'association de malfaiteurs absorbée par la qualification plus grave de l'infraction tentée et volontairement abandonnée ; "
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que les nommés Hufschmidt, Perrinelle et Tranier se sont rendus le 9 mars 1982, à l'aide d'un véhicule dérobé pour cette occasion, aux abords d'une agence bancaire où ils avaient l'intention de commettre un vol ;
Qu'arrivés sur les lieux il ont sursis à opérer en raison des difficultés ou des risques que comportait cette action ; que quelques heures plus tard, alors qu'ils étaient revenus à leur point de départ, les policiers qui les avaient pris en filature constataient que Hufschmidt et Perrinelle étaient porteurs d'armes de poing ;
Attendu que pour déclarer les prévenus coupables du délit d'association de malfaiteurs et les condamner de ce chef, la Cour d'appel relève qu'ils avaient tous trois conçu une attaque à main armée et que l'un d'eux devait rester au volant du véhicule pendant que les deux autres entreraient dans la banque pour commettre le " braquage " ;
Attendu qu'en cet état, et alors que le délit d'association de malfaiteurs constitue une infraction indépendante du ou des crimes contre les personnes ou les biens préparés ou commis par les membres de l'association, la Cour d'appel, qui a caractérisé en tous ses éléments constitutifs le délit retenu, a donné une base légale à sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois