Jurisprudence : Cass. com., 22-11-2023, n° 22-14.253, F-B, Cassation

Cass. com., 22-11-2023, n° 22-14.253, F-B, Cassation

A861513H

Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2023:CO00745

Identifiant Legifrance : JURITEXT000048465616

Référence

Cass. com., 22-11-2023, n° 22-14.253, F-B, Cassation. Lire en ligne : https://www.lexbase.fr/jurisprudence/101715580-cass-com-22112023-n-2214253-fb-cassation
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Abstract

Il résulte des dispositions d'ordre public de l'article R. 112-1 du code des assurances que les polices d'assurance relevant des branches 1 à 17 de l'article R. 321-1 doivent rappeler les dispositions des titres I et II du livre Ier de la partie législative du code des assurances concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance, que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du code des assurances, les causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code. Il est fait exception à cette règle lorsqu'il est établi que la police d'assurance a pour objet de garantir l'un des risques énumérés au premier de ces textes, dont les risques maritimes, lesquels relèvent des règles énoncées au titre VII du code précité. Constitue un risque maritime tout risque qui peut se produire au cours de la navigation maritime, quelle qu'en soit la cause


COMM.

FB


COUR DE CASSATION
______________________


Audience publique du 22 novembre 2023


Cassation


M. VIGNEAU, président


Arrêt n° 745 F-B

Pourvoi n° X 22-14.253


R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________


ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 22 NOVEMBRE 2023


La société Le Piano barge, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 7], a formé le pourvoi n° X 22-14.253 contre l'arrêt rendu le 1er février 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société Generali IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à la société Tokio Marine Kiln Syndicate 510, dont le siège est [Adresse 4] (Belgique), syndicat des Lloyds de [Localité 6], représentée par la société Kiln Europe SA, société de droit belge, disposant d'une représentation pour ses opérations en France par son mandataire général la société Lloyds Insurance Company, société anonyme d'un Etat membre de la CE ou partie à l'accord sur l'espace économique européen, pris en son établissement en France, [Adresse 5], venant aux droits des Souscripteurs du Lloyd's de [Localité 6] par suite d'une procédure de transfert dite Part VII transfer autorisée par la High Court of Justice de Londres suivant ordonnance en date du 25 novembre 2020, prise en la personne de son mandataire général pour les opérations en France, M. [I] [K],

3°/ à la société MMA IARD, société anonyme,

4°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, société d'assurances mutuelles,

ayant toutes deux leur siège [Adresse 1],

5°/ à la société Axa XL Insurance Company (UK) Limited, dont le siège est [Adresse 3] (Royaume-Uni), anciennement dénommée Catlin Insurance Company (UK) Limited,

6°/ à la société Aa Ab e Riassicurazioni PA - SIAT, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 9] (Italie),

défenderesses à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.


Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Guillou, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Le Piano barge, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Generali IARD, après débats en l'audience publique du 3 octobre 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.


Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er février 2022), le 3 septembre 2010, la société Le Piano barge, exploitant une péniche restaurant à [Localité 8], a souscrit un contrat d'assurances maritimes corps, risques divers et responsabilité civile du navire auprès des sociétés d'assurances Generali IARD, MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles, Catlin Insurance Company Limited, Tokio Marine Kiln Syndicate 510 syndicat des Lloyds de [Localité 6] et Aa Ab E Riassicurazioni PA – SIAT (les assureurs). Par un avenant du 3 septembre 2011, la police a été étendue à la couverture des opérations nécessaires à la transformation et l'aménagement du bateau pour l'année 2011, laquelle a été renouvelée par tacite reconduction le 3 septembre 2012.

2. Le 25 octobre 2012, au cours des travaux de rénovation du bateau, un salarié de la société Sofradi, intervenant sur le chantier de rénovation, a été accidenté.

3. Le 7 janvier 2016, celle-ci a assigné en indemnisation de ses préjudices la société Le Piano barge, qui a assigné en garantie les assureurs.

4. Les assureurs ayant opposé à la société Le Piano barge la prescription biennale de l'article L. 172-31 du code des assurances🏛, celle-ci a soutenu que, n'ayant pas souscrit une police d'assurance maritime, son action était soumise aux règles de prescriptions de l'article L. 114-1 du même code et que, le contrat ne contenant aucune stipulation relative à la suspension ou d'interruption de la prescription, cette prescription abrégée lui était inopposable.


Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

5. La société Le Piano barge fait grief à l'arrêt de dire que la prescription biennale est opposable à l'assuré et de dire en conséquence que son action est prescrite, alors « qu'aux termes de l'article L. 171-1, 1°, du code des assurances🏛, est un contrat d'assurance maritime celui qui a pour objet de garantie les risques maritimes ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans répondre aux conclusions d'appel de la société Le Piano barge ayant fait valoir que la police litigieuse n'avait pas pour objet la garantie de "risques maritimes", au sens de l'article L. 171-1, 1°, du code des assurances qui définit le contrat d'assurance maritime, en ce que "les travaux réalisés dans un chantier ne correspondent ni à l'exécution d'une expédition maritime, ni à l'exécution d'un contrat de transport de marchandise par voie maritime, opérations qui relèvent, pour leurs parts, des "risques maritimes" pour lesquels un régime d'assurance spécifique est prévue", ce dont il résultait que, la police souscrite n'étant pas une assurance maritime régie par le titre septième du code des assurances, était applicable l'article R. 112-1 du même code🏛 dont la police relevait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée. »


Réponse de la Cour

Vu les articles L. 171-1, 1° du code des assurances et R. 112-1 du même code :

6. Il résulte des dispositions d'ordre public du second de ces textes, selon lequel les polices d'assurance relevant des branches 1 à 17 de l'article R. 321-1 doivent rappeler les dispositions des titres I et II du livre Ier de la partie législative du code des assurances concernant la prescription des actions dérivant du contrat d'assurance, que l'assureur est tenu de rappeler dans le contrat d'assurance, sous peine d'inopposabilité à l'assuré du délai de prescription édicté par l'article L. 114-1 du code des assurances🏛, les causes d'interruption de la prescription biennale prévues à l'article L. 114-2 du même code🏛.

7. Il est fait exception à cette règle lorsqu'il est établi que la police d'assurance a pour objet de garantir l'un des risques énumérés au premier de ces textes, dont les risques maritimes, lesquels relèvent des règles énoncées au titre VII du code précité.

8. Constitue un risque maritime, tout risque qui peut se produire au cours de la navigation maritime quelqu'en soit la cause.

9. Pour écarter l'application de l'article R. 112-1 du code des assurances au sinistre survenu au cours des opérations de rénovation du bateau, après avoir relevé que la société Le Piano barge avait souscrit le 3 septembre 2010 une police d'assurance maritime corps de navire ainsi qu'un avenant stipulant l'extension de la garantie aux risques construction de navire à compter du mois de décembre 2011 et qu'à compter de cette date, la couverture avait été étendue aux conditions de la police d'assurances maritime sur corps de navire en construction (imprimée du 20 décembre 1990 modifié le 1er janvier 2002), l'arrêt retient qu'il est établi que la commune intention des parties était de souscrire une police d'assurance maritime et en matière maritime dont les actions se prescrivent par deux ans.

10. En se déterminant ainsi, sans caractériser, comme il lui incombait, les circonstances permettant de qualifier de risques maritimes, exclus de l'application des dispositions d'ordre public de l'article R. 112-1 du code des assurances, les opérations couvertes par l'avenant au contrat d'assurances, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.


PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er février 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne les compagnies d'assurances Generali IARD, MMA IARD, MMA IARD assurances mutuelles, Axa XL Insurance Company (UK) Limited, anciennement dénommée Catlin Insurance Company (UK) Limited, Tokio Marine Kiln Syndicate 510 syndicat des Lloyds de [Localité 6] et Aa Ab E Riassicurazioni PA – SIAT aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile🏛, rejette la demande formée par la société Generali IARD et la condamne à payer à la société Le Piano barge la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux novembre deux mille vingt-trois.

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