CIV. 1
CF
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 18 octobre 2023
Cassation
Mme CHAMPALAUNE, président
Arrêt n° 557 F-D
Pourvoi n° G 22-20.818
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 18 OCTOBRE 2023
M. [T] [I], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 22-20.818 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2022 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen unique de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Jessel, conseiller, les observations de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de M. [I], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 septembre 2023 où étaient présents Mme Champalaune, président, M. Jessel, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre,
la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 10 mai 2022), à la demande de M. [D] et de Mme [Aa], propriétaires d'une maison d'habitation, M. [I] a procédé, le 16 septembre 2013, au ramonage d'une cheminée équipée d'un insert et d'une hotte.
2. A la suite d'un incendie survenu le 14 mars 2014, l'assureur des propriétaires, la société Axa France IARD a indemnisé le sinistre.
3. Subrogée dans les droits des assurés, la société Axa France IARD a assigné M. [I] en responsabilité pour obtenir le paiement de la somme versée à titre d'indemnité, invoquant un manquement du professionnel à son devoir de conseil et de mise en garde sur les défauts de conformité que présentait l'installation ayant pris feu.
Examen du moyen
Sur le moyen, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
4. M. [I] fait grief à l'arrêt de le condamner à payer à la société Axa France IARD la somme de 41 406,38 euros, alors « que l'auteur d'un manquement contractuel ne peut être condamné à réparation que si son manquement a contribué de façon directe à la production du dommage dont la réparation est demandée ; qu'en l'espèce, pour condamner M. [I] à indemniser la société d'assurance, la cour d'appel a retenu de façon générale et abstraite qu' "il y a bien eu manquement au devoir de conseil du professionnel, lequel engage sa responsabilité" et que "le principe du recours doit être admis" ; qu'en statuant ainsi sans rechercher, comme l'avait retenu le tribunal et qu'elle y était invité, si le manquement au devoir de conseil imputé à M. [Ab] avait joué un rôle causal dans la réalisation de l'incendie et si celui-ci n'avait pas pour seule cause l'installation non conforme aux règles de l'art, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'
article 1147 du code civil🏛 dans sa rédaction, applicable en la cause, antérieure à l'
ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016🏛. »
Réponse de la Cour
Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :
5. Selon ce texte, le débiteur est condamné au paiement de dommages-intérêts en raison de l'inexécution de l'obligation, lorsque celle-ci a entraîné un préjudice en relation causale avec le manquement.
6. Pour condamner M. [I] au paiement d'une somme correspondant au montant de l'indemnité versée par l'assureur, après avoir retenu que le ramoneur avait manqué à son devoir de conseil en ne signalant pas aux propriétaires les anomalies de l'installation compte tenu de leur dangerosité potentielle, l'arrêt se borne à retenir que ce manquement engage sa responsabilité et que le principe du recours doit être admis.
7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le manquement au devoir de conseil imputé au ramoneur était en lien causal avec la survenue de l'incendie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne M. [I] à payer à la société AXA France IARD la somme de 41 406, 38 euros outre les intérêts, l'arrêt rendu le 10 mai 2022, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ;
Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ;
Condamne la société Axa France IARD aux dépens ;
En application de l'
article 700 du code de procédure civile🏛, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit octobre deux mille vingt-trois.